Quand j'applaudis une initiative européenne : JEDI

XLogo JEDIQuel bonheur ! Quel plaisir j'ai pris à lire un document européen qui redonne confiance dans notre capacité à avoir une vision positive du futur technologique de l'Europe. Le numérique, il en parle, mais pas que.

Vous ne serez pas surpris de mon enthousiasme à la lecture de ce document: il reprend un grand nombre d’idées pour lesquelles je me bats depuis plusieurs années.

L’Europe doit passer à l’offensive si elle veut espérer garder une présence raisonnable dans l’industrie mondiale du numérique d’ici à 2030.

Vous pouvez consulter:

 

 JEDI Joint European Disruptive Initiative

La Joint European Disruptive Initiative (JEDI) est un organisme indépendant des pouvoirs politiques. Il souhaite être, pour l’Europe, l’équivalent de l’ARPA aux Etats-Unis, l'agence pour les projets de recherche avancée. 

Le JEDI se donne pour mission de placer l'Europe en position de leader dans des domaines des technologies émergentes et de rupture. 

Le JEDI a publié en mai 2023 un document de 15 pages qui propose à l’Europe de passer à l’offensive technologique.

XJEDI Réponse à l'IRA - Apollo 2 SLe titre de ce document devrait être placardé dans toutes les entreprises qui, de près ou de loin, agissent en Europe dans le domaine des technologies.

Ce document JEDI fait référence à l'IRA, Inflation Reduction Act, un plan d’action très ambitieux pour l’économie américaine, signé par le Président Biden.

Je le présente dans les lignes qui suivent.

 

IRA: Inflation Reduction Act

IRA - Clean EnergyLe Président Biden a signé le document IRA au milieu de l’année 2022.

Venant des Etats-Unis, cela peut surprendre, mais les objectifs principaux de ce projet sont:

  • Les énergies propres.
  • Les actions pour le climat.

Ce document de 184 pages liste la centaine de programmes que l’IRA va financer.

Il y a un chiffre essentiel à retenir: 738 milliards de dollars, ce sont les sommes en jeu. Cela représente beaucoup d’argent!

Pour tous ceux qui souhaitent plus de détails sur l’IRA, cet article de Wikipédia est très factuel et complet.

Une centaine de programmes différents ont été identifiés: pour chacun, il est indiqué quel organisme va le gérer et quel est le montant prévu.

A titre d’illustration, cette liste donne, pour quelques projets, les montants en jeu. Ils vont de quelques centaines de millions à plusieurs milliards de dollars.

XExemples projets IRA

 

JEDI, un constat : la situation est grave

J’ai extrait quelques phrases de ce document JEDI pour les commenter. 

Elles seront en italique pour être plus facilement identifiables.

  • La situation est grave : le déclassement européen est généralisé, sur le climat, la santé, le numérique. Fin 2022, les Européens ont manqué quatre révolutions qu’ils auraient dû mener. 

Faire un diagnostic réaliste, c’est une étape préalable obligatoire si l’on veut ensuite proposer des actions pour corriger le tir.

  • Commençons par nous montrer collectivement lucides: nous ne sommes plus leaders et le marché unique est une fable dans tous les domaines stratégiques du futur, comme le cyber, l’hydrogène, l’intelligence artificielle ou le quantique. Il y a dans ces domaines souvent vingt‐sept agences, vingt‐sept stratégies, vingt‐sept mises en œuvre, rarement coordonnées, aboutissant à une fragmentation du marché et à l’absence d’avantage compétitif par la taille, essentiel dans la technologie. 

On touche là une des plus grandes faiblesses de l’Europe: son incapacité à agir “comme un seul homme”. En face de l’Europe il y a deux grandes puissances technologiques, les Etats-Unis et la Chine, qui, eux, ont une seule stratégie.

  • AdS DPC Arrosoir en AIG S 571712018Le programme cadre européen de recherche 2014‐2020 – Horizon 2020 – avec près de 77 milliards € a financé 39 500 projets, ce qui rend impossible la lisibilité politique et l’évaluation. On parle même de « principe de l’arrosoir » (Giesskannenprinzip en allemand.) Il faudrait dédier une fraction d’Horizon Europe, son successeur pour 2021‐2027 et doté de 95 milliards €, à un projet Apollo 2.0, géré indépendamment des traditionnels appels à projets souvent bureaucratiques. 

La démarche privilégiée par l’Europe, les appels à projets, est mortelle. Elle est le contraire d’une stratégie à long terme.

39 500 projets sur une période de 7 années, cela veut dire 5 600 projets par an, 15 par jour! Ce n’est pas sérieux. 

J’ai fait le calcul pour vous: en moyenne, chaque projet à reçu moins de 2 M€, 1,94 M€ pour être précis.

Rappel: le programme IRA américain, c’est une centaine de projets, 400 fois moins!

Chaque projet IRA recevra, en moyenne, 738 M$.

Image Adobe Générée par IAGRemarque sur l’illustration de l’arrosoir. Comme la majorité des images que j’utilise dans mon blog, je l'ai achetée sur le site Adobe Stock. C’est la première fois que j’y trouve une image créée par de l’IAG, IA Générative. Cette révolution IAG est vraiment en marche!

  • Osons ensuite mettre fin au primat systématique du critère du retour géographique.

Et une erreur structurelle de plus de l’Europe pour tout projet supposé “Européen”.

Chaque pays qui y participe est supposé recevoir en retour des investissements au prorata de ce qu’il a mis dans le pot.

La distribution des investissements doit être pilotée par l’efficacité des acteurs que l’on va financer, pas par leur nationalité.

  • L’Europe a trouvé son nouvel épouvantail : l’Inflation Reduction Act (IRA) de Joe Biden, le grand plan américain de soutien à la transition énergétique, promulgué en août 2022.

On retrouve dans cette phrase une belle illustration de cet autre défaut des actions européennes: se positionner en réaction à des opérations menées par les autres grandes puissances mondiales, que ce soit les Etats-Unis ou la Chine.

  • L’Europe ne réussira jamais en se plaçant sur la défensive, en réglementant à outrance ou en promouvant une politique industrielle héritée du XXe siècle. 

C’est pour moi le constat le plus important, qu’il faudra marteler tous les jours auprès des décideurs politiques en France et en Europe.

Je l’ai résumé en une phrase: 

Une Europe de la technologie et du numérique 

sur la défensive est vouée à l’échec

 

Une Europe offensive: ne garantit pas le succès, mais le rend possible

AdS DPC Offensive défensive S 392108302Il est temps de reprendre une attitude positive et d’arrêter de se lamenter sur les retards technologiques actuels de l’Europe, même et surtout s’ils sont très nombreux et préoccupants.

C’est ce que fait aussi ce document JEDI en disant: 

  • Les Européens doivent déclencher une offensive technologique et scientifique tous azimuts, et non agir en suiveurs. 

Déclencher une offensive tous azimuts, cela ne veut pas dire essayer de tout faire, au contraire.

Le rapport JEDI aborde de très nombreux sujets, et pas seulement le numérique.

  • Choisissons quelques véritables priorités, précises et assorties d’objectifs clairs et mesurables à atteindre. Avançons tout au plus sur une poignée de sujets, qui peuvent marquer de véritables ruptures dans les domaines clés pour les Européens.
  • Pour réussir cet Apollo 2.0, voilà les grands projets qui pourraient en former la trame. 

Dans cette démarche “commando”, ce rapport a identifié cinq domaines prioritaires, dont l’un est le numérique.

Sur les quatre autres, je n’ai pas de compétences suffisantes pour en évaluer la pertinence. Je vais donc les citer, sans faire de commentaires.

  • Tout d’abord l’énergie, mère de toutes les batailles pour assurer à la fois l’indépendance énergétique du continent et la transition climatique, dont l’urgence se fait chaque jour plus grande. 
  • Deuxième volet majeur : passer d’une économie de l’extraction à une économie de la production. Les trois domaines privilégiés sont agriculture, métaux et matières premières.
  • Troisième grand pilier : la santé et la médecine, dont la pandémie de la Covid‐19 n’a fait que rappeler l’importance stratégique.
  • Enfin, cinquième pilier fondamental : l’éducation. 
  • Quatrième pilier : le numérique, avec un monde qui a connu une accélération prodigieuse de sa digitalisation à l’occasion de la pandémie. 

C’est sur ce quatrième pilier, le numérique, que j’ai beaucoup travaillé et réfléchi depuis plusieurs années. Les quatre références que j’ai données au début de ce billet vous permettent, si vous êtes intéressés, de découvrir les pistes que je propose.

Pour aller à l’essentiel, j’ai identifié quelques domaines du numérique où l’Europe peut investir et espérer garder une place raisonnable dans une industrie du numérique qui est mondiale.

En voici les principaux:

  • L’industrie des composants électroniques.
  • Les logiciels SaaS, Software as a Service.
  • L’informatique quantique.
  • Les jumeaux numériques industriels.
  • Le numérique au service des collaborateurs terrain.
  • Le numérique pour aider à réduire les impacts de l’humanité sur les dérèglements climatiques.

Pour terminer ce paragraphe sur une note positive, j’ai applaudi le Chip European Act qui va mobiliser 43 milliards d’euros pour l’industrie des composants électroniques.

 

De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace 

AdS DPC Chance sourit aux audacieux S 35806776Pour conclure cette ode à l’action à l’offensive, à l’audace, je cite une fois de plus ce rapport du JEDI.

  • JEDI lutte contre l’idée d'une Europe repliée sur elle-même, d’une Europe qui a la trouille du futur, parfaitement illustrée en France par le catastrophique principe de précaution.
  • Cessons de cultiver les angoisses de nos sociétés européennes en voulant les «protéger» à tout prix – une entreprise vaine – mais osons nous donner les moyens de développer des solutions qui permettront à tous nos concitoyens d’avoir un avenir meilleur. 

Choisir ses combats, passer à l’offensive, c’est tout le contraire d’une “abdication” devant les géants du numériques actuels, qu’ils soient américains ou chinois.

Dans mon billet de blog de 2021 sur l’Europe du numérique, j’avais tracé les quatre démarches possibles:

  • Fanfaronnade: l’Europe peut tout faire dans le numérique.
  • Bureaucratie: attendre des consensus à 27, créer des organisations avec des centaines de membres comme GAIA-X.
  • Désespoir: l’Europe est foutue, elle a définitivement perdu la bataille mondiale du numérique.
  • Pragmatisme: reconnaissons nos forces et nos faiblesses, investissons là où nous pouvons encore gagner. C’est bien évidemment celle que je préconise.

Je suis, plus que jamais, persuadé que l’Europe peut encore gagner de beaux combats dans le numérique et rester une force qui compte en 2030.

Par contre, il n’y a plus une minute à perdre pour mettre tous les talents européens au travail, en mode commando, pour créer des succès numériques éclatants.

 


Comment fonctionne un LLM, Large Language Model

 

AdS DPC LLM S 594717293Les LLM, Large Language Models, sont à la base des nouvelles solutions d’IAG, IA Générative, telles que ChatGPT.

Concernant les IAG, je vous renvoie à deux billets récents que j'ai publié sur mon blog.

Les LLM ne sont utilisés que pour un sous-ensemble des IAG. Il existe aussi des solutions de haute qualité pour les images et photos, les vidéos, les sons, les codes logiciels…

Au vu des impacts immédiats et majeurs des LLM et IAG, je pense que nous devons tous faire l’effort d’en comprendre les fonctionnements, quelle que soit notre activité.

Pour répondre à cette question, je vous propose deux réponses:

  • La première, c’est de poser la question à… ChatGPT.
  • La deuxième, c’est de regarder une vidéo d’un des dirigeants d’OpenAI, fondateur de ChatGPT.

J’avais prévu de publier ce texte directement sur LinkedIn, mais la réponse donnée par ChatGPT est trop longue pour tenir dans les limites de longueur autorisées par LinkedIn.
J’ai donc été amené à le publier sous la forme d’un billet sur mon blog.

 

Réponse de ChatGPT à la question:  Comment fonctionne un Large language model

OpenAI ChatGPT Logo
Les limites de ces outils m’ont sauté aux yeux, immédiatement.

La première question que j’avais posée était: 

Comment fonctionne un LLM?

La réponse que j’ai obtenue concernait… un Master of Laws, comme le montre ce début de réponse.

ChatGPT

Un Master of Laws (LLM) est un programme de troisième cycle qui permet d'approfondir ses connaissances juridiques dans un domaine spécifique. Voici comment fonctionne généralement un programme de LLM :

J’ai modifié ma question en précisant la signification que je donnais à LLM, Large Language Model et ChatGPT a répondu de manière pertinente à ma demande.

Comment fonctionne un Large Language Model?

J’ai été surpris, agréablement surpris, par la qualité et la pertinence de cette réponse.

J’ai posé la question en français et en anglais; les deux réponses étaient quasiment les mêmes.

Voici la réponse obtenue, en 7 points et un commentaire final.

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Un large modèle de langage, tel que GPT-3.5, fonctionne grâce à une technique d'apprentissage profond appelée réseau neuronal transformateur. Voici une explication simplifiée de son fonctionnement :

  1. Données d'entraînement : Les grands modèles de langage nécessitent une quantité considérable de données textuelles pour l'entraînement. Pendant la phase d'entraînement, le modèle est exposé à une grande variété de sources textuelles, notamment des livres, des articles, des sites web et d'autres textes écrits. Ces données textuelles servent de base de connaissances à partir de laquelle le modèle apprend des motifs, des structures linguistiques et des relations entre les mots.
  2. Architecture : Les grands modèles de langage utilisent une architecture transformateur, qui est un type de réseau neuronal profond spécialement conçu pour traiter des données séquentielles telles que du texte. Les transformateurs sont composés de plusieurs couches d'auto-attention et de réseaux neuronaux à propagation avant.
  3. Tokenisation : Les entrées textuelles sont divisées en unités plus petites appelées "tokens". Un token peut représenter un seul caractère, un mot ou même des sous-unités de mots, selon la stratégie de tokenisation utilisée. La tokenisation permet au modèle de traiter et de comprendre le texte de manière plus fine.
  4. Pré-entraînement : Les grands modèles de langage passent par une phase de pré-entraînement où ils apprennent à prédire le mot suivant dans une phrase ou à compléter des mots manquants. Ainsi, le modèle acquiert une compréhension des motifs statistiques et des relations contextuelles entre les mots dans les données d'entraînement. Ce processus de pré-entraînement aide le modèle à apprendre la grammaire, la syntaxe et un certain niveau de compréhension sémantique.
  5. Ajustement fin : Après le pré-entraînement, les grands modèles de langage passent par une phase d'ajustement fin pour adapter le modèle à des tâches ou des applications spécifiques. Cela implique d'entraîner le modèle sur des ensembles de données spécifiques qui sont adaptés à la tâche souhaitée, telle que répondre à des questions, générer du texte ou traduire des langues. L'ajustement fin permet au modèle de se spécialiser et de fournir des réponses plus précises et contextuellement appropriées pour des cas d'utilisation spécifiques.
  6. Inférence : Une fois que le modèle de langage est entraîné et ajusté finement, il est prêt pour l'inférence. Lors de l'inférence, un utilisateur saisit une consigne ou une question en texte et le modèle la traite, analyse le contexte et génère une réponse en fonction de ses connaissances acquises et des schémas appris à partir des données d'entraînement. La réponse est généralement générée en échantillonnant ou en classant une liste de mots ou de tokens susceptibles de suivre la séquence de texte en fonction des probabilités apprises par le modèle.
  7. Apprentissage itératif : Les grands modèles de langage peuvent être continuellement améliorés et mis à jour grâce à un processus d'apprentissage itératif. En exposant le modèle à de nouvelles données ou en l'ajustant finement avec des ensembles de données supplémentaires spécifiques à une tâche, le modèle peut acquérir de nouvelles connaissances et s'adapter à l'évolution des schémas et contextes linguistiques.

Il est important de noter que les grands modèles de langage tels que GPT-3.5 sont extrêmement complexes et impliquent de nombreux détails techniques au-delà de cette explication simplifiée. Cependant, cette vue d'ensemble devrait vous donner une compréhension générale des principes sous-jacents du fonctionnement d'un grand modèle de langage.

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Vous connaissez beaucoup de personnes qui seraient capables de répondre immédiatement à cette question d’une manière aussi claire et complète?

Moi, non.

 

Vidéo d’Andrej Karpathy pendant les journées Build de Microsoft en mai 2023

Andrej Karpathy OpenAIVous souhaitez en savoir plus?

Vous êtes prêt à faire l’effort de rentrer dans plus d’informations techniques?

Vous pouvez consacrer 45 minutes de votre temps à regarder une vidéo?

Si vous avez répondu oui à ces trois questions, alors je vous conseille vivement de regarder cette vidéo de l’intervention de l’un des fondateurs d’OpenAI, Andrej Karpathy, pendant les journées Build organisées par Microsoft en mai 2023.

Rappel: Microsoft a investi environ 10 milliards de dollars dans OpenAI.

C’est très dense. Pour en tirer vraiment profit, il vaut mieux rester concentré et ne pas essayer de consulter en même temps son smartphone ou sa boîte mail.

Je ne suis pas certain d’avoir tout compris, mais les messages essentiels, oui.

 

Le pragmatisme de Microsoft

 Nadella & Chief of research SCet article demande un abonnement payant pour être lu, mais les premières phrases sont suffisamment intéressantes pour que je le cite.

Il montre les réactions de Nadella, CEO de Microsoft, quand Peter Lee, responsable de la recherche chez Microsoft, lui explique que leurs chercheurs avaient été “estomaqués” par la performance de GPT-4.

Il l'interrompt et lui pose une question simple: “Comment OpenAI a pu construire cette solution avec 250 personnes quand nous avons chez Microsoft une équipe de recherche de 1 500 personnes qui travaille sur l’IA depuis des dizaines d’années?”

Cette remarque fera plaisir à tous ceux qui pensent que la taille d’une équipe de recherche n’est pas une garantie de réussite, et c’est même souvent le contraire.

En même temps, les ressources d’infrastructures informatiques nécessaires pour faire tourner ces modèles de LLM sont tellement importantes qu’OpenAI a besoin du Cloud Azure de Microsoft pour fonctionner.

OPenAI + Microsoft d’un côté, Google de l’autre pour créer BARD, on retrouve les deux géants du Cloud Public derrière les leaders actuels des outils d’IAG pour les textes.

 

Situation du marché LLM + IAG textes, fin 2024

Dans ce schéma, j’ai résumé ma vision de ce que “pourrait” être le marché des LLM et IAG textes à la fin de l’année 2024, dans 18 mois.

LLM main solutions

Je vous propose de l’analyser du bas vers le haut.

Les sources de LLM

Les quatre principales sources de LLM connues aujourd’hui sont:

  • Microsoft et OpenAI
  • Google
  • Facebook, dont on parle moins, avec LLaMa, qui est Open Source.
  • La communauté Open Source. Un texte attribué à un collaborateur de Google affirmerait que Google a très peur de ce que cette communauté pourrait produire.

Produits disponibles aujourd’hui

Les deux principaux produits issus de ces LLM que les entreprises peuvent utiliser directement aujourd’hui sont ChatGPT de Microsoft et BARD de Google.

Solutions disponibles, fin 2023

Microsoft et Google ont tous les deux annoncé qu’ils vont “intégrer” leurs solutions dans leurs produits logiciels ayant le plus d’utilisateurs dans le monde, leurs suites collaboratives Microsoft 365 et Google Workspace.

Solutions disponibles, fin 2024

Les principaux éditeurs de logiciels d’entreprise, aussi bien les historiques comme SAP que les natifs SaaS comme Workday vont ajouter des fonctionnalités issues des LLM dans leurs offres. Il est encore trop tôt pour savoir quels choix ils feront dans l’oligopole des fournisseurs de ces LLM.

A la fin de l’année 2024, je fais les hypothèses suivantes concernant les usages de ces LLM par les entreprises, publiques ou privées:

  • 10% en direct depuis ChatGPT ou BARD.
  • 30% à partir des solutions bureautiques collaboratives Microsoft 365 et Google Workspace.
  • 60% depuis tous les autres logiciels déjà déployés dans ces entreprises.

En résumé, les usages “indirects” de ces outils d’IAG devraient rapidement représenter 90% des usages face aux 10% d’usages en direct, qui sont ceux dont on parle le plus en ce moment.


Incendie Global Switch : réflexions sur la résilience des Clouds Publics

 

XData Center Global Switch ClichyL’un des centres de calcul d’un grand hébergeur mondial, Global Switch, situé à Clichy en région parisienne, a été victime d’un incendie dans la semaine du 24 avril 2023. 

Ces incendies sont rares, mais ils se produisent de temps en temps et aucune entreprise n’est à l’abri d’un tel accident dans un centre de calcul, qu’il soit:

  • Géré directement par l’entreprise, “On Premise”.
  • Chez un hébergeur.
  • Sous la responsabilité d’un acteur du Cloud Public.

Cet incendie a immédiatement déclenché une polémique sur la qualité des services proposés par les géants du cloud public américain. Pourquoi? Le Cloud Public GCP de Google a été touché et des services proposés par une “Zone France Paris” ont été indisponibles pendant plusieurs heures.

Mon ami Alain Garnier, PDG de Jamespot, a immédiatement publié sur LinkedIn une vidéo pour commenter cet incident. Il m’a personnellement cité en me reprochant gentiment d'être un “suppôt” des géants du Cloud Public. 

Suppôt, non, mais grand fan, oui. Sur ce point, il a tout à fait raison et je ne m’en suis jamais caché, depuis plus de 15 ans.

Cette mise en cause et cet accident m’ont donné l’envie et l’occasion d’apporter des éclaircissements sur les différentes implantations géographiques des géants du Cloud Public.

C’est un sujet qui est rarement abordé et amène trop d’entreprises à faire des erreurs qu’elles pourraient éviter quand elles travaillent avec les grands acteurs du Cloud Public.

Ce que j'explique dans ce texte est valable pour tous les grands acteurs du Cloud Public, AWS d’Amazon, Azure de Microsoft et GCP de Google. 

 

L’incendie: les faits

XDeux sites touchés par incendieDans la nuit du 25 au 26 avril 2023, un incendie a éclaté dans un des centres de calcul de l’hébergeur Global Switch, situé à Clichy, en région parisienne. Cet incendie a entraîné l’arrêt de ce centre de calcul.

De nombreuses organisations qui hébergeaient leurs services numériques dans ce centre de calcul ont annoncé que ces services étaient indisponibles. Parmi les organisations importantes touchées, on peut citer le service Cybermalvaillance du gouvernement français et la ville de Lille.

C'est à chacune de ces entreprises qu’il incombe la responsabilité d’avoir préparé leur PRA, Plan de Reprise d’Activité. J’espère que c’était le cas pour la majorité d’entre elles.

Mais c’est bien évidemment le “client” Google-GCP de ce centre de calcul qui a retenu l’attention et fait couler le plus d’encre, ce qui est logique.

Un géant du Cloud Public, un “Hyperscaler” qui subit une panne, c’est suffisamment rare pour que la planète numérique française s’en émeuve.

XGoogle Cloud sous l'eau

J’ai un “scoop” pour les personnes qui sont ravies de pouvoir critiquer le supposé manque de résilience des géants du Cloud Public: des pannes, ils en ont en permanence, et j’y reviens longuement dans le prochain paragraphe.

Depuis des années, Google met à la disposition de ses clients un tableau de bord de l’état de fonctionnement de tous ses services, dans chaque région géographique. 

Il est mis à jour en temps réel. Voilà un instantané d’une partie de ce tableau, le 26 avril 2023: il indique clairement que tous les services dans la “Zone Europe-West9, Paris” sont indisponibles.

XPanne GCP France 26:4:2023

Cette zone de GCP est répartie chez quatre hébergeurs différents, comme le rappelle Google dans un communiqué: 

Google Cloud se reposant sur trois autres datacenters de la région parisienne (Interxion, Data4 et Telehouse), la firme a proposé à ses clients de « basculer » temporairement et d’éviter la zone affectée (europe-west9).”

La redondance, le PRA natif font partie des services standards de GCP.
Aucun client n’a perdu de données comme le rappelait Emmanuelle Olivié-Paul, utilisatrice de GCP dans cette zone, dans sa réponse au billet LinkedIn d’Alain Garnier que je cite au début de ce billet.

XPanne GCP France 29:4:2023

Ce deuxième instantané du tableau de disponibilité des services de GCP, pris le 29 avril 2023, montre que la situation est normalisée.

 

Les Clouds Publics, des pannes en permanence

Qui peut croire, ou tenter de faire croire que les infrastructures géantes des fournisseurs de Clouds Publics ne tombent jamais en panne?

Je n’ai jamais, je ne tiendrai jamais un tel discours, ce serait ridicule.

XCloud Downtime 2018 - AWS  GCP  AzureDans un billet de blog publié en 2019, il y a quatre ans, sur le thème “Clouds Publics, la confiance”, j’abordais une fois encore ce sujet. J’avais inséré ce graphique qui mettait en évidence les temps de panne de GCP, AWS et Azure pour l’année 2018.

Toute personne qui essaie de me faire dire le contraire, ou est de mauvaise foi, ou n’a jamais lu mes écrits.

Une étude très récente, publiée en mars 2023 par Parametrix, société spécialisée dans l’assurance des risques numériques, fait le point sur toutes les pannes qui se sont produites en 2022 chez AWS, GCP et Azure.

XParametrix report title Cloud Downtime 2023

J’ai extrait de ce rapport cette phrase qui résume bien la situation:

“In 2022, Parametrix identified a total of 1190 performance disruptions across this cloud landscape. Some 41.4% of these events, 492 in total, were classified by Parametrix as critical.” (C’est moi qui ai mis en gras quelques mots.)

Oui, vous avez bien lu, près de 1200 incidents en une année, plus de 3 par jour! Ils sont nuls, ces géants du Cloud Public!

XParametrix Main Cloud Outages causes 2022Ce graphique, présent dans ce rapport, indique les principales causes de ces incidents.

Les incidents matériels sur les infrastructures physiques, comme les incendies, sont de loin les… moins fréquents, à 8,33%, 3,5 fois moins que ceux causés par des erreurs humaines.

Ce que demandent les clients d’AWS, GCP ou Azure, ce n’est pas qu’ils leur garantissent qu’ils n’auront jamais de pannes, ce qui serait une demande idiote.

Ce que demandent ces clients, c’est qu’AWS, GCP ou Azure mettent en œuvre toutes les procédures et méthodes nécessaires pour les mettre à l’abri de ces pannes inévitables.

XClouds Publics protection des clients des pannes

Et cela, AWS, GCP et Azure le font, et le font très bien!

Ce n’est pas pour cela que les entreprises doivent basculer dans les Clouds Publics sans prendre des précautions importantes, au contraire.

L’une des premières décisions à prendre, et elle est essentielle, c’est de bien choisir la ou les zones géographiques dans lesquelles elles vont déployer leurs applications.

C’est ce que j’analyse dans le paragraphe qui suit.

 

Les différentes familles d’implantation des géants du Cloud Public

Les informations que j’utilise sont publiques; toutes les entreprises peuvent y accéder quand elles doivent choisir leurs fournisseurs d’infrastructures Cloud Public.

Je vais illustrer mon analyse par l’exemple de GCP de Google, qui a été mis en cause à la suite de cet incendie.

Comme je l’ai écrit plus haut, j’aurais pu faire la même démonstration pour AWS ou Azure.

Les fournisseurs de Cloud Public proposent trois grandes familles d’implantations:

  • Les centres de calcul dont ils sont propriétaires et qu’ils gèrent eux-mêmes.
  • Des centres de calcul qui appartiennent à des hébergeurs et où ils localisent une partie de leurs services IaaS.
  • Des points de présence: ce sont des petits sites qui ont pour fonction principale de proposer des accès par fibres optiques à des centres de calcul GCP. Ils sont utilisés pour réduire la latence.

Cette liste, disponible sur le site de GCP, identifie en toute transparence ces différentes familles d’implantations.

XFamilles de centres de calcul Google

Centres de calculs appartenant à GCP

Un grand centre de calcul, construit et géré par GCP, représente un investissement supérieur à 500 millions de dollars et peut atteindre 1 ou 2 milliards de dollars.

Cette carte du monde montre l’implantation des centres de calculs qui appartiennent à GCP.

XCarte Mondiale Centre de Calcul Google

Google dispose de centres de calcul en propre dans 36 régions, réparties sur 109 zones. Ils sont en priorité installés aux Etats-Unis et en Europe.

Centres de calculs “Edge”, hébergés

Pour assurer une présence dans le plus grand nombre possible de pays, Google GCP installe une partie de ses services chez des hébergeurs locaux, comme Global Switch en France.

Dans cette configuration, GCP n’est pas maître de la gestion des centres de calcul, qui est déléguée aux hébergeurs.

C’est ce qui permet à GCP d’annoncer une présence dans plus de 200 pays.

Ce sont souvent des installations “politiques”, réalisées pour répondre aux exigences de certains pays ou entreprises qui exigent que leurs données soient stockées sur leur territoire.

“Edge” ne veut pas dire une installation unique: pour des raisons évidentes de résilience, GCP répartit ses installations “Edge” chez des hébergeurs différents. Dans le cas de Paris, ils sont quatre.

On le voit sur cette carte, où sont aussi indiqués les centres de calcul en périphérie, nommés “Edge".

XGoogle Data Center with Edge ones

Il existe un moyen simple de vérifier si une zone géographique GCP est gérée par Google en direct ou hébergée: il suffit de compter le nombre de services disponibles. Ils sont beaucoup plus nombreux dans les zones gérées en direct par Google.

Cette carte met aussi en évidence un autre investissement majeur de Google, dans les fibres optiques sous-marines.

Points de présence

Sur cette autre carte Google, les principaux points de présence sont visualisés.

XGoogle network with 7500 access point

Google annonce qu’il dispose de 7 500 points de présence dans le monde. C’est une bonne nouvelle. Ceci permet à toute entreprise, où qu’elle soit située, de trouver un point de présence proche qui garantit un accès rapide, par fibre optique, à GCP.

Le cas de l’Europe

En analysant les données fournies par Google, j’ai pu construire ce tableau qui fait le point sur la situation actuelle des implantations de GCP en Europe. Ce n’est qu’une photographie à un instant donné, de nouveaux investissements étant réalisés en permanence.

XData Center Google Europe

Au moment où je publie ce texte, GCP est présent dans la majorité des grands pays européens, dans 35 villes:

  • 6 implantations de centres de calcul appartenant à Google. Ils sont tous situés dans des pays de l’Europe du Nord.
  • 29 implantations “Edge”, hébergés. 
  • C’est le cas de la France, où il n’y a pas de centres de calcul appartenant à Google, mais deux “Edge” à Paris et Marseille. 

Dans le paragraphe qui suit, je présente mes recommandations concernant les différentes options qui s’offrent à une entreprise, publique ou privée, quand elle doit choisir les zones géographiques où elle souhaite déployer ses usages numériques dans un Cloud Public.

 

Recommandations

L’immense majorité des entreprises publiques et privées ont le libre choix du pays où elles peuvent utiliser des services de Clouds Publics, et c’est une très bonne chose.

Il y a quelques exceptions, variables selon les pays.

Listes hébergeurs certifiés HDSEn France, la plus connue est celle liée aux données de Santé. Il est obligatoire d’obtenir une certification HDS, Hébergement de Données de Santé, pour proposer des services dans ce domaine. Comme le montre cette liste officielle, publiée par le ministère de la Santé et de la Prévention, plusieurs centaines d’organisations sont certifiées HDS.

AWS, GCP et Azure font partie de cette liste, et cela ne surprendra personne.

Conséquence: Google est obligé d’utiliser les zones hébergées en France pour les données de santé et ne peut pas les porter sur des centres de calcul qu’il gère en direct.

Pour toutes les autres entreprises, le choix est libre, même s’il y a souvent des pressions politiques pour que l’hébergement ait lieu en France.

Si votre entreprise décide ou préfère héberger ses applications et ses données en France, elle a le choix entre des grands acteurs du Cloud Public, tous présents en France, ou des acteurs français eux aussi présents en France.

Si je fais le choix de travailler avec GCP pour tout ou partie de mes usages numériques, j’ai plusieurs options:

  • Je choisis un “Edge” en France: si tous les services dont j’ai besoin sont disponibles dans cette zone, c’est une piste raisonnable.
  • Je choisis une zone gérée directement par Google, par exemple en Belgique ou aux Pays-Bas. Je suis certain d’accéder à tous les services disponibles et à des infrastructures uniquement dédiées à GCP.
  • Je choisis d’utiliser plusieurs zones pour mes usages. C’est une évidence pour les entreprises qui sont présentes à l’international.

Depuis peu, GCP propose aux entreprises un nouveau service: Cloud Region Picker.

Il permet de choisir la zone où elles peuvent exécuter leurs programmes en tenant compte du poids respectif que l’on donne à trois paramètres:

  • L’impact carbone.
  • Le coût.
  • La latence.

Les réponses varient toutes les 5 minutes, en fonction des conditions météos des différentes zones et des taux d’utilisation des ressources.

GCP Region Picker 2 optionsDans cet exemple, réalisé à Paris le 1er mai 2023 à 13h, j’ai regardé deux options. Dans les deux cas j’ai gardé une latence identique, à 50% d’importance:

  • Option du haut: prix,critère essentiel. Impact carbone, critère pas important.
  • Option du bas: prix, critère pas important. Impact carbone, critère essentiel.

Les résultats sont spectaculaires: GCP propose 4 zones pour chaque option, et ce sont au total 8 zones différentes qui sont proposées.

Je trouve cette initiative excellente et elle n’est disponible que chez les géants du Cloud Public, qui ont des installations dans le monde entier et peuvent faire profiter leurs clients de toutes les possibilités d’ensoleillement ou de vent.

C’est une excellente opportunité pour les entreprises de montrer concrètement qu’elles ont envie d’œuvrer pour une véritable frugalité numérique.

Reste une option que je n’ai pas encore abordée, le multi-cloud. Elle est recommandée par Alain Garnier dans la vidéo dont je parle au début.

Que faut-il en penser?

 

Multi Cloud et résilience

AWS Azure GCP logosUne démarche Multi Cloud consiste à utiliser plusieurs fournisseurs différents de services Cloud pour son entreprise.

C’est une idée vieille comme le monde, celle qui consiste à ne pas mettre “tous ses œufs dans un même panier”.

Est-ce une bonne idée d’utiliser une démarche Multi Cloud pour améliorer la résilience de son Système d’Information en cas d’accidents comme l’incendie de Global Switch?

La réponse est claire: non, non et non!

Pourquoi? Imaginez que vous utilisez GCP pour votre application de gestion commerciale et que le site qui l’héberge prend feu. Combien de temps vous faudrait-il pour trouver une version de cette application compatible avec un autre Cloud comme AWS et l’y déployer? Poser la question, c’est y répondre.

Si la réponse Multi Cloud n’est pas la bonne, quelle démarche faut-il privilégier? 

Elle est beaucoup plus simple, et je l’ai présentée dans ce billet: une démarche multi sites chez le même fournisseur de Cloud. Rien de plus simple! La réplication dans une autre zone géographique prendra instantanément le relais, sans aucun délai.

Ceci ne veut absolument pas dire que la démarche Multi Cloud n’a aucun intérêt, au contraire. La majorité des entreprises avec lesquelles je travaille ont choisi deux ou au maximum trois fournisseurs parmi AWS, GCP ou Azure.

Ce n’est jamais pour répondre à des problèmes de résilience.

Quelles sont les raisons qui militent pour le Multi Cloud?

  • Résilience? Non.
  • Services Clouds de base? Non. Tous les fournisseurs proposent des services de base en calcul, stockage, bases de données qui sont très proches les uns des autres.
  • Services avancés différents? Oui. C’est de loin la raison principale. Chaque grand acteur a des domaines spécialisés pour lesquels il propose des services meilleurs que ses concurrents. C’est le cas avec AWS pour l’informatique industrielle et IoT. C’est le cas pour GCP dans le domaine du Big Data et du décisionnel.
  • Faire jouer la concurrence entre les fournisseurs? C’est parfois le cas, mais moins souvent qu’on ne le croit.

 

Résumé

J’ai eu l’opportunité d’acquérir en France une formation d’ingénieur, qui m’a aidé à avoir des raisonnements scientifiques, rationnels et pragmatiques.

AdS DPC Résilience S 101375048Ce texte ne parle que de la meilleure manière de garantir la fiabilité et la résilience de ses infrastructures dans des Clouds Publics, de garantir une continuité de services quand des catastrophes comme un incendie ou une erreur humaine se produisent, incidents qui sont inévitables.

Traiter les sujets importants, un par un, c’est la seule manière rationnelle de progresser que je connaisse.

Rappel: Il y a de nombreux autres sujets “chauds” quand on aborde le thème des Clouds Publics. Ils ne sont pas traités dans ce texte.

J’ai écrit des dizaines de billets sur mon blog qui parlent de toutes les autres facettes du Cloud Public, et ce depuis 15 ans.

 


Quand un travailleur terrain donne des leçons de management aux dirigeants d'une entreprise du CAC 40

 

Couverture Ouvrier qui murmuraitPendant cette fin de semaine, j’ai dévoré d’une seule traite un livre exceptionnel qui… ne parle pas de numérique!

Il s’agit de “L’ouvrier qui murmurait à l’oreille des cadres”, écrit par Jean-Michel Frixon

Je vous recommande chaudement de le lire. C’est un livre court, bien écrit et personne ne peut rester insensible aux messages humanistes qu’il véhicule.

C’est le deuxième livre écrit par Jean-Michel Frixon. Dans son premier ouvrage, “Michelin, Matricule F7246710”, il raconte ses 43 ans passés chez Michelin comme ouvrier. 

Ce premier livre a eu des impacts surprenants, qu’il raconte dans le deuxième.

Je vais utiliser plusieurs citations tirées de ce livre pour illustrer les messages essentiels qu’il porte.

Ils sont rares, les livres écrits par un ouvrier et qui parlent d’une manière aussi brillante des graves erreurs de management trop souvent commises dans les entreprises.

J’y suis d’autant plus sensible que depuis plusieurs années, avec WizyVision, la solution SaaS/Cloud que nous avons développée, nous équipons en priorité les équipes terrain, les personnes dont parle Jean-Michel Frixon.

Nous rencontrons trop souvent des problèmes similaires à ceux évoqués dans ce livre.

Je n’ai pas souhaité faire un résumé de ce livre. J’ai fait le choix, personnel, de mettre en lumière les thèmes qui m’ont le plus marqués. Chacun d’entre vous, après l’avoir lu, pourra y trouver d’autres enseignements utiles.

Vous êtes dirigeant, cadre, confortablement installé dans votre bureau, ou en télétravail, à l’abri du bruit, de la chaleur ou du froid: lisez ce livre, tous!

Vous comprendrez la réalité de la vie de ces travailleurs terrain, que vous ne rencontrez jamais. Ce sont des hommes et des femmes de très grande valeur, pour qui la qualité du travail réalisé est essentielle, qui ne peuvent pas télétravailler et vous demandent simplement… d’aller à leur rencontre et de les respecter.

 

Le sujet du livre

Livre 1 Jean-Michel Frixon Matricule 7246710Après le succès surprise de son premier livre, et une forte exposition médiatique, Jean-Michel Frixon a été contacté par les dirigeants de Michelin.

Je cite:

  • P 79 - Demande faite par le Directeur industriel monde de Michelin, Jean-Christophe Guérin. Mr Frixon, accepteriez-vous de réaliser un tour de France des usines Michelin au début de l’année 2022, pour rencontrer les ouvriers dans les ateliers, mais aussi d’intervenir auprès des différents cadres, dans le but de témoigner votre vision du management…?
  • P 64 - C’est un col bleu qui s’exprimera à des cols blancs!
  • P 91 - Demande faite par Mr Florent Ménégaux, PDG de Michelin:… mais j’ai vraiment besoin de vous, de votre aide, et sincèrement je vous en remercie par avance…

Ce livre, c’est l’histoire extraordinaire de ce projet, des rencontres avec les dirigeants du COMEX de Michelin et de plusieurs de ses visites dans des usines du Groupe Michelin.

 

Managers, allez sur le terrain !

C’est un reproche unanime de l’auteur et des personnes qu’il a rencontrées: les cadres et les dirigeants ne vont jamais assez au contact du terrain.

Je cite:

  • Page 75 - Je comprends aisément que vos emplois du temps ne vous laissent guère le loisir de vous rendre dans les ateliers. Cela dit, ne serait-ce que deux ou trois fois par an, il est nécessaire et indispensable d’aller sur le terrain. Ne déléguez surtout pas cette mission à un subalterne! Oui, il faut vous rendre physiquement dans les ateliers pour rencontrer les ouvriers… Une dernière chose, dans la mesure de vos possibilités, ne prévenez pas de votre venue!
  • Page 107 - Un ouvrier: Nos hiérarchiques…? Bah, il faudrait qu’ils viennent un peu plus nous voir sur le terrain, pour se rendre compte de la charge de travail. 
  • Page 115 - Commentaire d’un directeur d’usine: nous n’avons pas su détecter cette évidence pourtant simple, de l’utilité de notre présence plus fréquente auprès d’eux.

La déconnexion entre le monde du terrain des bureaux, des cadres et dirigeants est généralisée. Elle est très mal vécue par les personnes sur le terrain.

C’est une démarche que je pratique depuis des années: à chacune de mes missions de transformation numérique, je passe plus de 70% de mon temps sur le terrain, pour rencontrer les personnes qui “font”. 

Mon constat est le même: rien ne se passe sur le terrain comme l’imaginent les cols blancs de la DSI. Eux aussi, ils ne vont jamais assez sur le terrain; j’y reviendrai à la fin de ce texte.

 

Et le respect ?

Ce qui choque le plus les collaborateurs terrain, les ouvriers de Michelin, c’est le manque de considération de leurs activités par les responsables, qu’ils soient les chefs directs ou les dirigeants de haut niveau.

Je cite encore Jean-Michel Frixon:

  • P56 - Je ne porte plus les regards lourds et trop souvent condescendants de certains cols blancs.
  • P 60 - Jean-Christophe Guérin, directeur industriel monde, membre du COMEX… Son état de sidération à la découverte de comportements avilissants de certains managers rencontrés au cours de ma carrière.
  • P 61 - Ma rage et ma colère étaient seulement à l’encontre de mon chef de service injurieux, insolent et irrespectueux.
  • P 105 - Un ouvrier: je n’en dirais pas autant avec mon hiérarchique! D’ailleurs, si j’ai un souci dans mon travail, ce n’est pas la peine que j’aille le voir, il n’y connaît rien!
  • P 128 -  Là où les erreurs de management engendrent le plus souvent des blessures profondes et indélébiles
  • P 166 - Ma plus grande adversité fut bien celle d’affronter à longueur de temps, le manque de légitimité et de reconnaissance de la part de nombreux hiérarchiques, habillés des seuls vêtements de l’arrogance, de la suffisance et de l’incompétence.

Et il y a des dizaines d’autres citations du même type que j’aurais pu reprendre.

Et on ne parle pas des usines du XIXe siècle. Il s’agit d’une grande entreprise française, à la fin du XXe et au début du XXIe siècle.

Méconnaissance de la noblesse des métiers manuels, mépris pour les personnes qui les exercent, ces comportements sont encore beaucoup trop fréquents chez les chefs directs de ces collaborateurs terrain et les dirigeants des entreprises en France, et dans le monde entier.

Et ne me dites pas que cela ne se passe pas dans votre entreprise! L’une des leçons les plus claires que j’ai tirée de cette lecture c’est, pour beaucoup de dirigeants, la découverte de comportements dont ils n’avaient pas conscience, étant trop loin du terrain.

Comme on le verra dans le paragraphe suivant, ce sentiment était sincère, et la réaction des dirigeants de Michelin a été exemplaire et remarquable.

 

Dirigeants de Michelin, une réaction exceptionnelle

Logo MichelinBravo, les dirigeants de Michelin! Je suis très admiratif de la manière dont ils ont réagi, et rapidement, à la publication du premier livre de Jean-Michel Frixon.

Ils auraient pu ignorer ce message fort, mettre la poussière sous le tapis, attendre que la vaguelette d’indignation s’arrête. Au contraire, ils sont allés vers l’auteur, avec beaucoup de respect et de bienveillance.

Il y a trois moments forts dans ce livre qui montrent à quel point les dirigeants de Michelin ont pris conscience de l’importance du message porté par Jean-Michel Frixon:

  • Le chapitre “Le tête-à-tête”, qui commence page 91. Il raconte en détail la rencontre de l’auteur avec Florent Ménégaux, le PDG de Michelin. Je l’ai lu avec beaucoup d’émotion. C’est tout sauf un “coup de communication”, comme vont l’interpréter, je le crains, trop de personnes qui refusent de croire qu’un dirigeant et un ouvrier puissent avoir un dialogue ouvert et guidé par un respect mutuel.
  • Les chapitres “Un parterre de hauts cadres”, page 69 et “La parole d’un ouvrier”, page 73 qui racontent l’intervention de Jean-Michel Frixon devant tous les dirigeants industriels mondiaux du groupe Michelin. Ces pages montrent à quel point, dans des entreprises courageuses comme Michelin, un dialogue ouvert et porteur d’avenir peut s’ouvrir entre les dirigeants et un ouvrier.
  • Et bien évidemment, tous les chapitres qui racontent ses visites dans cinq usines du groupe Michelin, pendant lesquelles il rencontre à chaque fois des ouvriers et des dirigeants de ces usines. Ce sont des moments forts, qui ne peuvent pas laisser insensible un lecteur, s’il a un minimum de sensibilité aux relations humaines dans les entreprises industrielles.

Vous qui lisez ce billet de blog et travaillez dans une grande entreprise qui emploie des travailleurs terrain: êtes-vous prêts à suivre la même démarche que Michelin?

Vous n’avez pas un Jean-Michel Frixon dans votre entreprise? Et si vous l’invitiez à parler devant votre COMEX, dans les semaines qui viennent?

 

Similarités avec le numérique au service des équipes terrain

Priorité au terrain DTNDans le livre que j’ai co-écrit en 2018 avec Dominique Mockly, PDG de Teréga, “Dirigeants, acteurs de la Transformation Numérique”, il y a, page 136, un schéma qui préconise de redonner le pouvoir au terrain, de privilégier une démarche “Bottom Up” plutôt que la démarche actuelle qui est très “Top Down”.

J’ai retrouvé dans le livre de Jean-Michel Frixon le même message:

Ce qui font “savent”. 

L’expression “Cols blancs, cols bleus” est peut-être moins utilisée aujourd’hui, mais elle est omniprésente dans le livre de Jean-Michel Frixon. Mettre les cols blancs au service des cols bleus, inverser la pyramide du pouvoir dans les entreprises, c’est une priorité absolue.

On doit la retrouver dans le domaine de l'informatique et du numérique! 

Les grands projets “Top Down”, les ERP intégrés, sont dans plus de 90% des cas rejetés par les acteurs opérationnels du terrain, et avec raison. Demander à un travailleur terrain de remplir un formulaire ou un écran SAP ou Oracle, il faut n’avoir jamais été sur le terrain pour penser que c’est une bonne idée!

J’ai réalisé il y a quelques années une mission pour un grand constructeur automobile français: il s’agissait de proposer une solution informatique pour des usines de taille moyenne à installer dans des pays à faible culture industrielle. 

J’ai demandé à visiter une “petite” usine du groupe pour mieux comprendre quelles pouvaient être les attentes des utilisateurs. Les équipes informatiques à qui j’ai fait la demande m’ont demandé: pourquoi?

J’ai insisté et des personnes de la DSI ont accepté de m'accompagner pendant la visite de cette petite usine à l’ouest de la France. 

Les trois principaux résultats de cette visite:

  • Les équipes informatiques qui travaillaient sur ce projet n'avaient jamais mis les pieds dans une usine de leur entreprise. C’est moi qui les ai obligés à faire cette visite!
  • Le directeur de l’usine nous a très bien reçus et nous a dit: merci d’être venu me voir, cela fait 15 ans que personne de la DSI n’est venu visiter mon usine.
  • A la fin de la journée, les informaticiens qui m’avaient accompagné m’ont dit: “On a appris beaucoup de choses”!

Toutes ces expériences m’ont amené à créer il y a 4 ans WizyVision, la première solution numérique universelle au service des équipes terrain.

WizyVision a été construit pour répondre aux véritables attentes et contraintes des collaborateurs terrain.

Tout se fait depuis un smartphone, autour de la photo et de la voix, sans avoir besoin d’utiliser le clavier du smartphone.

A ma grande surprise, et j’en suis ravi, Jean-Michel Frixon a cité une situation dans laquelle WizyVision aurait été une excellente réponse.

Je cite:

 P 106 - Dans un atelier logistique des transports.… se présente un routier de nationalité étrangère qui présente ses documents. Il ne parle pas la langue de Molière. L’ouvrier, lui, ne parle pas la langue de Shakespeare et demande l’aide de sa collègue.

Ce problème de la faible maîtrise de la langue est un sujet essentiel sur le terrain. WizyVision, en s’appuyant sur la photo et la voix, permet à toute personne illettrée ou qui ne maîtrise pas la lecture ou l’écriture d’utiliser des outils numériques.

Dans l’exemple cité, WizyVision qui embarque de l'Intelligence Artificielle aurait permis de lire tout le texte, quelle que soit la langue utilisée. Aussi dopées à l’IA, les fonctions voix vers texte et texte vers la voix auraient facilité des échanges entre ces deux personnes, sans risques d’erreur de compréhension.

Amis informaticiens, DSI et responsables du numérique, vous aussi, sortez de vos bureaux climatisés, allez dans les usines, sur les chantiers, dans les magasins, rencontrez des travailleurs terrain et accompagnez-les dans leurs activités quotidiennes.

Vous découvrirez, en quelques heures, quelques jours, quels sont les “irritants” quotidiens de leurs métiers, auxquels des solutions numériques simples comme WizyVision peuvent répondre en quelques heures sans avoir besoin de faire un schéma directeur à 5 ans ou de réfléchir pendant des mois à une “intégration” aux outils informatiques existants.

La bonne nouvelle pour vous rassurer: 100% des fonctionnalités de WizyVision sont ouvertes par API pour échanger, si et seulement si c’est nécessaire, avec les applications “Cols Blancs” existantes. Cela évitera de créer une “informatique fantôme” dont vous avez si peur.

Le CIGREF, Club Informatique des Grandes Entreprises Françaises, a pris il y a quelques semaines, l’excellente initiative de créer un groupe de travail sur le numérique au service des équipes terrain.

Je leur propose d’inviter Jean-Michel Frixon à plancher devant leur groupe de travail. Même si le numérique n’est pas son domaine de compétences dominant, je suis certain qu’il peut apporter beaucoup à ce groupe de travail.

 

Synthèse

Vous êtes dirigeant, responsable opérationnel dans une entreprise qui emploie des travailleurs terrain? 

Faites un investissement “somptuaire”: achetez autant d’exemplaires du livre de Jean-Michel Frixon, à 15,50 €, que vous avez de membres du COMEX ou de responsables opérationnels, et demandez-leur à tous de le lire.

Vous ne le regretterez pas!

Jean-Michel FrixonJe ne sais pas si Jean-Michel Frixon est prêt à refaire, en dehors de Michelin, le séminaire qu’il a animé pour le COMEX de cette entreprise.

Posez-lui la question. S’il répond oui, ce sera l’un des meilleurs investissements que vous pourrez faire pour améliorer le management de votre entreprise et favoriser des échanges plus fréquents entre le monde du bureau et celui des équipes terrain.

Sans collaborateurs terrain, votre entreprise n’existe pas.

Sans solutions numériques adaptées aux attentes de vos collaborateurs terrain, le système d’information de votre entreprise ne peut pas fonctionner efficacement.

Redonner le pouvoir, la priorité au terrain, doit devenir votre priorité en 2023.

Merci, merci, merci, Jean-Michel Frixon, pour cet ouvrage exceptionnel qui porte un message positif, d’espoir, dont on a vraiment besoin en France en ce moment.

 


Le moment iPhone de l’intelligence artificielle - Deuxième partie

 

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Dans la première partie de cette analyse sur l’IAG, l’Intelligence Artificielle Générative, j’ai traité les thèmes suivants:

  • Les infrastructures Clouds Publics, fondations de l'IAG.
  • Les acteurs clés de l’industrie de l’IAG.
  • Une explosion de startups dans l’IAG.

L’un des événements majeurs de ce début d’année est l’arrivée d’un nouvel acteur essentiel dans l'IAG, l’américain NVIDIA.

Dans cette deuxième partie, j’aborde deux sujets essentiels, mais complexes:

  • Les grandes familles d’usages de l’IAG.
  • Les métiers les plus impactés par l’IAG.

 

Les grandes familles d’usages possibles de l’IAG

Dans les bureaux, nous utilisons tous des outils qui embarquent de l’IA depuis des années, dans nos usages professionnels ou personnels, souvent sans nous en rendre compte.

Google a été un pionnier dans cette démarche: Google Lens pour les photos, Gmail qui complète nos phrases sont utilisés quotidiennement par des millions de personnes.

L’arrivée de l’IAG va accélérer cette adoption, de deux manières différentes:

  • En direct, quand nous posons une question à ChatGPT.
  • En mode embarqué, quand nos outils logiciels existants s’appuient sur des solutions d’IAG.

L'image de l’iceberg a très souvent été utilisée, mais elle s’applique très bien à l’IAG.

XAI - Iceberg

Je pronostique que: 

  • 10% de nos usages de l’IAG se feront en mode direct.
  • 90% de nos usages de l’IAG se feront au travers d’applications que nous connaissons déjà, mais qui seront “dopées” à l'IAG.

Comme souvent, c’est par les outils universels, bureautiques, que les innovations numériques s’imposent en premier.

La première application SaaS dans le Cloud Public à avoir des millions d'utilisateurs a été Google Apps, annoncé en février 2007 à Paris. Le nouveau nom de Google Apps est Google Workspace.

Quelles sont les deux entreprises qui dominent en 2023 le marché de la bureautique dans le Cloud? Microsoft et Google.

Quelles sont les deux entreprises qui dominent en 2023 le marché des outils d’IAG? Microsoft et Google, comme je l’ai expliqué dans la première partie de cette analyse.

Surprise! En mars 2023, Google et Microsoft ont annoncé qu’ils allaient doper leurs outils bureautiques cloud existants à l'IAG.

J’ai pris cette photo lors de la journée Workspace organisée le 16 mars 2023 par Google dans ses bureaux parisiens.

XIAG dans Google Workspace Paris 16:3:2023

Google y annonce qu’il ajoute de l’IA Générative dans tous les produits de sa suite Workspace, annonce confirmée dans cet article de Techcrunch.

Microsoft utilisera la marque Copilot pour l’IAG qu’il embarque dans ses produits logiciels existants. J’ai regroupé dans cette image les annonces de Copilot pour les outils bureautiques Microsoft 365 et les outils CRM et ERP Dynamics.

XMicrosoft OPEN AI in office products

Ces deux annonces simultanées sont pour des produits qui devraient être disponibles dans les mois qui viennent. Mon pronostic: ces solutions bureautiques+IAG seront opérationnelles dans le monde entier en 2024.

Dans les semaines qui viennent, nous aurons droit à un déluge d’annonces par tous les fournisseurs de logiciels historiques qui vont y ajouter de l’IAG, et cela a déjà commencé. Deux exemples.

XSalesforce EINSTEIN with IAGSalesforce avait depuis des années une solution d’IA, “modestement” nommée Einstein.

Et hop, voici maintenant Einstein avec IAG.

XAdobe Firefly with AIGS’il y a un éditeur de logiciels qui devait être parmi les premiers à annoncer une version avec IAG, c’est bien Adobe. Ses clients sont des créatifs qui travaillent sur des textes, des photos et des vidéos, contenus pour lesquels existent de très nombreux outils d’AIG, présentés dans la première partie de cette analyse.

C’est fait, avec l’annonce de Firefly.

Je vais arrêter ici cette liste de solutions dopées à l’IAG, qui deviendrait vite lassante.

Fin 2024, l’immense majorité des logiciels que vous connaissez, et en priorité les solutions SaaS, aura été enrichie par des composants de type IAG.

Ce schéma reprend l’idée initiale de l’iceberg, mais en ajoutant une dimension nouvelle, les deux principales familles d’utilisateurs de solutions numériques:

  • Les collaborateurs bureau, à qui 80% des budgets informatiques et des solutions numériques sont dédiés aujourd’hui.
  • Les collaborateurs terrain, parents pauvres de la Transformation Numérique.

XIA 10% direct 90% Embarquée

Les solutions d’IAG sont destinées en priorité aux collaborateurs bureau, avec des impacts majeurs que j’analyse dans la suite de ce texte.

Les collaborateurs terrain ont des attentes numériques très différentes, que j’ai longuement expliquées dans plusieurs textes dont ce billet récent.

Pour leurs activités professionnelles, les équipes terrain ne sont pas des clients naturels des solutions IAG directes, comme ChatGPT. Ces équipes terrain n’ont pas vocation à créer des contenus informationnels complexes tels que présentations ou tableurs.

A l'inverse, ces travailleurs terrain sont preneurs de solutions innovantes qui embarquent beaucoup d’IA, mais masquée. C’est ce que nous avons construit avec la plateforme WizyVision qui permet aux équipes terrain de travailler avec un smartphone, des photos et la voix, sans avoir à utiliser le clavier.

WizyVision embarque beaucoup d’IA, reconnaissance de caractères, lecture de code barre ou QR code, transcription voix vers texte…pour que le collaborateur terrain ait entre les mains un outil à l’ergonomie hyper simple, dont la puissance logicielle embarquée est masquée.

Ma prévision des usages de l’IAG dans les entreprises, à partir de 2024:

  • 10% d’usages de l’IAG en direct par les collaborateurs bureau.
  • 90% d’usages embarqués de l’IAG par les collaborateurs bureau.
  • 100% d’usages embarqués de l’IAG par les collaborateurs terrain.

 

Les métiers les plus impactés par l’IAG

J’ai hésité à présenter mon analyse des impacts de l’IAG par secteurs d’activité des entreprises ou par les métiers des collaborateurs. 

C’est cette seconde démarche qui c’est rapidement imposée.

Je vais reprendre la segmentation en deux grandes familles des collaborateurs dans les entreprises:

  • Les collaborateurs bureau.
  • Les collaborateurs terrain.

Les impacts de l’IAG sur ces deux populations sont fondamentalement différents.

 

Collaborateurs bureau

XTête Input OutputLes personnes qui travaillent dans des bureaux sont des informationnels: la matière première de leurs activités est l’information.

Qu’ils soient employés, cadres ou dirigeants, leurs cœurs de métier sont proches: rechercher des données, des informations existantes, les analyser, les synthétiser, et produire… des informations.

La liste qui suit des activités des collaborateurs bureau n’est pas limitative:

  • Etudes de marché.
  • Tableaux de bord, reporting.
  • Analyse de candidatures, de CV.
  • Étude de jurisprudences, de textes de loi.
  • Étude des risques financiers, profils des clients.
  • Prévisions de la demande de produits.
  • Écriture de documents.
  • Présentation pour des réunions.
  • Traduire un “cahier des charges” en programme informatique.
  • Moderniser un logo.
  • Préparer un cours de mathématiques, d’histoire, de géographie, d'art, d’informatique.

Ces activités informationnelles sont aujourd’hui réalisées avec l’aide d’outils informatiques et numériques performants, mais qui n’embarquent pas ou très peu d’IAG.

Les révolutions industrielles des XIXe et XXe siècles avaient eu des impacts très forts sur la productivité des travailleurs terrain, dans l’agriculture et l’industrie. Elles n’avaient eu que peu d’impacts sur la productivité des collaborateurs dans les bureaux. Ceci avait été mis en évidence par le paradoxe de Solow que l’on peut résumer ainsi:

L'informatique se voit partout, sauf dans les statistiques de la croissance ou de la productivité.”

Je reprends la définition que j’ai donnée de l’IAG dans la première partie de cette analyse: L’IA Générative est une IA capable de générer, de créer des contenus nouveaux à partir de contenus existants, qui ont été utilisés pour son apprentissage.

Créer des contenus nouveaux à partir de contenus existants, c’est l’activité principale des équipes bureaux! C’est aussi ce que fait, très bien, très vite, très efficacement l’IAG.

Dès 2024, la majorité des outils utilisés quotidiennement par les collaborateurs bureau seront dopés à l’IAG. Il faudra 5, 10, 20 fois moins de temps pour transformer une information entrante en un résultat utilisable, que ce soit un texte, un tableau de chiffres, une présentation ou un tableau de bord.

Dans ce schéma, je propose de prendre comme chiffre moyen une augmentation de l’efficacité de ces activités informationnelles réalisées avec l’aide de l’IAG de 80% à 90%.

XTravailleur bureau Productivité IAG

Selon les pays, le pourcentage de travailleurs de bureau dans la population peut varier de 20% à 50%. Si la majorité de leurs activités informationnelles peut être accélérée de 80% à 90%, est-ce que l’on aura besoin d’autant de personnes pour ces activités? 

La réponse est… non.

XGoldman Sachs 300 M jobs at riskJe ne suis pas le seul à aborder ce sujet. Une étude de Goldman Sachs, publiée fin mars 2023, estime que 300 millions d’emplois tertiaires pourraient être détruits par des outils d’IAG tels que ChatGPT. Le rapport complet, de 20 pages, est disponible ici.

XAdobe Firefly for creatorsQuels seraient les emplois épargnés par cette vague IAG? En priorité, ceux des véritables créatifs, innovateurs, capables de sortir des sentiers battus et de créer des contenus qui ne sont pas seulement des regroupements de contenus existants.

Quel pourcentage des personnes qui travaillent aujourd’hui dans des bureaux cela représente-t-il?

C’est à eux que s’adresse Adobe avec sa nouvelle solution IAG Firefly.

 

Collaborateurs terrain

AdS DPC Industry worker with smartphone S 547813663La situation est totalement différente pour les collaborateurs terrain: leur cœur de métier, ce n’est pas l’information! Ils sont mécaniciens, infirmiers, chauffeurs, réparateurs… Pour eux, les activités informationnelles sont perçues comme des pertes de temps, des interruptions de leurs activités métiers.

Tout ce qui peut réduire le temps passé dans des activités informationnelles est une excellente nouvelle pour eux. C’est ce que nous disent tous les utilisateurs de WizyVision: merci! Cet outil réduit le temps que l’on passe à traiter de l’information dans des rapports 2 à 5.

A l’inverse des collaborateurs bureau, ils sont ravis quand leur productivité informationnelle augmente! Cela leur donne plus de temps pour leurs activités métiers, celles qu’ils aiment réaliser.

 

Synthèse

L’IAG est une révolution majeure, immédiate qui va profondément impacter les activités de 90% des collaborateurs bureau, dans tous les secteurs d’activités, que les entreprises soient publiques ou privées, petites, moyennes ou grandes.

Pour la première fois, on va obtenir des gains de productivité majeurs dans des métiers qui avaient traversé les révolutions technologiques sans en subir les impacts.

On pourrait assister à une inversion brutale des tendances:

XAIG Kiss of Death

  • Révolution industrielle:
    • Impacts forts sur le nombre d’emplois dans les métiers terrain.
    • Peu d’impacts dans les métiers de bureau.
  • Révolution de l’Intelligence Artificielle Générative, AIG:
    • Impacts majeurs sur le nombre d’emplois dans les bureaux.
    • Une excellente nouvelle pour les équipes terrain.

Un beau sujet de réflexion et d’action pour les mois qui viennent.