SaaS : SAP a tout compris !
02/10/2007
BBD ? Business by Design ? Ça commence bien ! Il a fallu à SAP beaucoup d’imagination, de $$ et d’efforts pour concocter un nom aussi hermétique !
Je ne désespère pas, un jour, avant de partir à la retraite, de comprendre ce qui se cache derrière le nom de la dernière annonce faite par SAP, une offre ... SaaS, Software as a Service.
Il faut reconnaître que A1S, le nom de code du produit avant son annonce officielle, n’était pas beaucoup plus sexy !
L’annonce !
Le big boss de SAP, Henning Kagermann, en annonçant BBD fin septembre, a dit : “c’est l’annonce la plus importante de ma vie”
J’ai extrait quelques idées-forces de cette annonce :
- Réservé aux entreprises de 100 à 500 personnes : quelle précision ! il y a quand même un petit détail qui cloche, le nombre minimum de licences est de 25.
- BBD couvre tous les processus de l’entreprise, de tous les secteurs industriels et de services ! Quelle ambition, pour un produit dont la première version ne sortira que mi 2008.
- BBD est destiné aux entreprises sans compétences informatiques.
Alors, là, chapeau ! Avoir imaginé, construit, testé un PGI qui couvre tous les processus d’une entreprise moyenne et peut être installé, géré, paramétré sans informaticiens, je ne pensais vraiment pas que c’était possible !
Je préfère arrêter là le jeu de massacre !
(J’allais oublier l’essentiel, BBD a représenté un investissement de $400 M)
Tout faux !
Je pronostique que l’annonce de BDD par SAP rentrera dans le livre Guinness des records comme la plus belle illustration d’un échec total dans la compréhension d’un marché !
SaaS représente une évolution majeure du marché de l’informatique Web 2.0, comme je l’ai souvent écrit.
SAP est loin d’être le premier sur ce marché, où le leader actuel, Salesforce.com, a démontré depuis plus de 7 ans son efficacité et son savoir-faire, en particulier sur le créneau des entreprises de taille moyenne visé par BBD.
J’avoue être très admiratif : commettre autant de fautes stratégiques majeures en lançant un produit nouveau sur un marché déjà bien balisé, c’est vraiment un exploit exceptionnel que vient de réaliser SAP.
L’échec retentissant de la Ford Edsel était jusqu’à présent la référence historique de l’échec d’un nouveau produit ; BBD est bien placé pour lui ravir son trône.
Quelles sont les erreurs stratégiques les plus criantes commises par SAP en dévoilant BBD ?
- BBD est un produit intégré et non pas dans la logique des composants qui s’impose aujourd’hui. La seule option proposée aux éventuels clients “martyrs” est la “totale”, avec tous les processus.
- BBD va même jusqu’à proposer une ... messagerie intégrée ! Et pourquoi pas y rajouter un traitement de texte, un tableur, un Wiki, un blog,...
Je ne pensais pas qu’un tel sommet de l’intégration pouvait être atteint. !
- SAP "ose" même envisager que des partenaires externes pourraient, éventuellement, rajouter des éléments à BBD ; quelle mansuétude !
- SAP annonce en même temps qu’il sera possible, bientôt, d’installer BBD sur des serveurs internes, non SaaS, si l’entreprise le souhaite ou dépasse la barre fatidique des 500 collaborateurs. Que faire dans ce cas des composants tiers qui auraient été rajoutés à BBD dans sa version SaaS ?
- BBD sera commercialisé par une force de ventes directes, ce qui n’a jamais fonctionné sur le marché des entreprises moyennes, que tous les acteurs du marché couvrent avec l’aide de partenaires.
Je propose de résumer ce fiasco annoncé en une seule phrase :
“ Saleforce.com peut dormir tranquille !”
Place de BBD dans la gamme SAP
SAP a bâti sa fortune en vidant les poches des très grandes entreprises, bien aidé en cela par ses complices, les grands intégrateurs.
Le marché des grands de ce monde n’étant pas infini, SAP a commencé à s’intéresser aux marchés de masse, à ces entreprises petites et moyennes qui n’ont pas les moyens d’offrir une BMW série 7 à tous leurs collaborateurs.
Si j’ai bien compris la nouvelle segmentation de l’offre existante de SAP, elle comprend les familles de solutions suivantes :
- Business One, si j’ai moins de 100 collaborateurs.
- BBD, si j’ai entre 100 et 500 collaborateurs. Il faudra que l’on m’explique, un jour, pourquoi ce sont les seules entreprises pour qui une solution SaaS est bien adaptée !
- Business All in One, pour les entreprises moyennes de plus de 500 personnes.
- SAP “genuine” (ce nom est de moi), pour les grands comptes.
Une segmentation de l’offre de PGI, basée sur le seul nombre de collaborateurs, quelle caricature, quelle absurdité !
SAP est pris au piège de toutes les entreprises qui ont construit leur succès sur des technologies ou des modèles économiques qui deviennent obsolètes. Ce sont évidemment des considérations économiques qui ont poussé SAP à limiter son offre SaaS pour ne pas phagocyter ses produits vedettes actuels.
SAP, merci !
Je voudrais quand même terminer par un grand merci à SAP.
L’annonce de BBD va légitimer l’approche SaaS auprès de toutes les entreprises pour qui le nom de SAP est (était ?) une garantie de sérieux.
Après avoir regardé ce qui se cache derrière BBD, ces mêmes entreprises vont se précipiter pour acheter de véritables solutions SaaS, chez tous les concurrents de SAP.
Je vous propose une autre explication du sigle BBD, pour parler du marché des ERP/PGI traditionnels :
BBD : Bravo, Bon Débarras !