AVOP : Apportez Vos Outils Personnels !
17/01/2011
BYOT : Bring Your Own Technology (Tools). Cette expression est utilisée en anglais pour définir une démarche innovante, qui commence, tout doucement, à se diffuser : les salariés d’une entreprise arrivent au bureau avec leurs propres outils, PC portables, smartphones ou tablettes.
Je propose de la traduire en français par :
AVOP : Apportez Vos Outils Personnels.
Au cours de ces dernières semaines, j’ai testé cette idée lors de nombreux séminaires et j’ai été très agréablement surpris par les réactions des participants ; en majorité, ils trouvent l’idée intéressante et sont prêts à réfléchir à son éventuelle mise en œuvre dans leur entreprise.
AVOP : principes
Dans une démarche AVOP, un salarié peut venir au bureau avec un outil qui lui appartient et l’utiliser pour tout ou partie de ses activités professionnelles.
Cette démarche accompagne quatre mouvements forts, dont j’ai souvent parlé ici :
- L’arrivée dans le monde du travail de la génération Y, des «digital natives».
- «Consumerisation of IT» : les outils informatiques et de communication innovants se déploient en priorité dans le grand public et pénètrent ensuite dans les entreprises : téléphones Android et iPad en sont des exemples emblématiques.
- Les usages migrent rapidement vers des logiques SaaS, Software as a Services, accessibles depuis un navigateur moderne, présents sur tous les smartphones, tablettes, PC ou Macintosh.
- Une demande forte pour des solutions «anytime», «anywhere», «anydevice», qui permettent d’accéder à tous ses usages, professionnels et personnels, en tous lieux, à toute heure, depuis n’importe quel outil.
Les principes AVOP sont simples :
- On fait confiance aux utilisateurs pour choisir les outils qui correspondent le mieux à leurs attentes.
- Ils utilisent les mêmes outils dans leurs activités professionnelles et personnelles.
- Les outils sont achetés, assurés et maintenus par les collaborateurs.
- L’entreprise participe au financement de ces outils.
Avant d’en analyser les avantages et difficultés potentiels, je vous propose d’analyse un cas pratique AVOP, chez Revevol.
AVOP : une réalité chez Revevol
Depuis sa création en 2007, Revevol pratique une démarche AVOP, avec succès, mise en œuvre avant même que les acronymes BYOT ou AVOP n’existent !
Concrètement, comme fonctionne AVOP chez Revevol :
- Revevol ne fournit aucun outil à ses collaborateurs, dirigeants compris.
- Chacun choisit librement son PC, son Macintosh, sa tablette, et finance lui-même ses outils.
- Un collaborateur signe un document confirmant qu’il utilise ses outils personnels pour des activités professionnelles.
- Tous les mois, Revevol verse à chaque collaborateur 50 € pour «usage professionnel» d’un outil personnel. C’est le montant maximum autorisé par le Ministère des Finances en France.
- Pour les abonnements aux réseaux sans fil, la formule est très simple ; Revevol rembourse chaque mois 50 % de la facture des opérateurs. Nous avons bien sur quelques règles de bon sens, telles que l’interdiction d’utiliser le «roaming données» à l’étranger tant que les opérateurs pratiqueront des «tarifs mafieux». Ceci est valable pour tout le monde, y compris les dirigeants.
Oui, j’ai souvent la remarque suivante : ce qui fonctionne pour Revevol, une «start-up» avec une soixantaine de salariés, en France et sur les cinq continents, ne peut pas être dupliqué dans une grande entreprise.
La suite de ce texte démontrera que toutes les entreprises, grandes ou petites, peuvent mettre en œuvre aujourd’hui, au moins partiellement, une démarche AVOP.
AVOP : avantages ... potentiels
L’inventaire des avantages potentiels d’une démarche AVOP est impressionnant ; en voici une première liste :
- Satisfaction maximale des utilisateurs : personne ne viendra vous dire « Cet outil ne me convient pas» car ... ce sont eux qui l’ont choisi !
- Le salarié prend plus soin de ses outils personnels que de ceux de l’entreprise. Toutes les entreprises savent bien que les voitures de fonction ont plus de bosses que celles des salariés !
- Quand le salarié quitte l’entreprise, la dépense s’arrête immédiatement.
- L’assistance et la formation sont réduites à leur plus simple expression ; l’entreprise et les salariés assument que chacun maîtrise bien ses outils personnels.
- L’entreprise paye en pratique l’essentiel du coût des outils personnels : 50 € / mois sur 3 ans représente 1 800 €, ce qui permet d’acheter un outil informatique de très bonne qualité.
- L’entreprise réduit fortement ses investissements en informatique ; on passe d’un budget CAPEX (investissements) à un budget OPEX (Opérations).
- Le mythique TCO, Total Cost of Ownership, d’un poste de travail est immédiatement réduit. La majorité des cabinets d’étude, tels que le Gartner, estime que le TCO annuel d’un poste de travail est compris entre 3 000 et 4000 €.
Chez Revevol le TCO d’un PC est de 600 € (50 €x12) ; en passant de 3600 à 600 €, Revevol économise 3000 € par personne et par an !
- Amélioration forte de l’image de la DSI : au lieu d’être vue comme des «empêcheurs de travailler efficacement», les équipes de la DSI deviennent les alliés des utilisateurs.
Alors, AVOP, une solution miracle à tous les maux de l’informatique ? Bien sûr que non !
AVOP : difficultés.... potentielles
Comme toute innovation de rupture organisationnelle, la démarche AVOP pose de nombreux problèmes... potentiels :
- La sacro-sainte sécurité apparait toujours en tête de liste. Sur ce thème important, le pragmatisme s’impose : sécurité du poste de travail, sécurité des applications, sécurité des réseaux ... pour chacun de ces challenges, il est possible de trouver des réponses raisonnables qui permettent de «ne pas interdire» une démarche AVOP. Il est par exemple possible de mettre en place des mécanismes de sécurité tels qu’effacement à distance ou repérage par GPS en cas de vol ou de perte d’un objet mobile.
- Accès aux applications historiques : pas toujours évident d’accéder à une application Cobol/CICS/DB2 depuis un smartphone ! Webisation de ces applications et virtualisation du poste de travail font partie des réponses possibles, mais il restera des cas délicats pour lesquels un poste de travail fourni par l’entreprise sera indispensable.
- Perte de contrôle par la DSI : c’est plus un fantasme qu’une réalité.
- Assistance et Hot-line : la demande d’assistance va exploser, la DSI n’est pas capable d’offrir une assistance sur tous les modèles de smartphones ou de tablettes... Une réponse possible à ces craintes légitimes est de fixer des règles du jeu claires : la DSI ne fournit pas d’assistance directe sur les postes AVOP.
- Refus de certains collaborateurs : dans la majorité des entreprises, une démarche AVOP ne sera jamais imposée à tout le monde. Le volontariat restera encore la norme pendant longtemps.
AVOP, mode d’emploi 2011
AVOP reste encore marginal dans la majorité des entreprises, comme le rappelle cet article de la revue Forbes.
A l’inverse, un blog publié par TechRepublic en 2010 pronostique que «BYOT» sera l’un des plus grands challenges auquel devra faire face une DSI.
En 2011, les entreprises peuvent commencer à se préparer pour accompagner un mouvement irréversible et faire face à la réalité ; de manière plus ou moins insidieuse, AVOP existe déjà dans toutes les entreprises, en commençant souvent par les smartphones.
Une grande entreprise informatique, Unisys, a déjà publié une liste des 12 étapes nécessaires à la réussite d’une démarche BYOT/AVOP.
Après avoir défini les règles de base d’une démarche AVOP, une entreprise peut commencer par un projet pilote, en respectant des principes simples :
- Ne pas l’imposer : ce serait la meilleure manière de faire capoter le projet.
- Privilégier, dans une première étape, le volontariat.
- Créer une «pénurie» artificielle : rien de tel que d’annoncer : «dans le cadre de ce projet pilote AVOP, nous avons décidé de limiter à 5 % des effectifs le nombre de collaborateurs qui pourront y participer la première année». Il est probable que le quota sera atteint en quelques semaines !
- Assurer un suivi du projet avec tous les participants, pour mieux comprendre les difficultés potentielles.
- Mesurer et publier les premiers résultats de ce projet pilote après quelques mois de pratique et avant son éventuelle généralisation.
AVOP, banalisé, demain ? Probablement, comme cela c’est déjà passé pour les voitures de fonction, remplacées par l’usage de son véhicule personnel dont on rembourse une partie des usages sous forme de frais kilométriques.
Intéressé par le déploiement d’une démarche AVOP dans votre entreprise ? Partageons nos expériences !