6 challenges à affronter pour réussir votre SI en 2016 : deuxième partie
29/12/2015
Dans la première partie de cette analyse, j’ai mis en évidence les 3 challenges, technologie, budgets et sécurité, qui ne sont plus sur le chemin critique de la construction d’un SI performant.
Il s’agit maintenant d’affronter des challenges autrement plus difficiles, car ils ne sont pas matériels, mais liés à la vie quotidienne de tous les collaborateurs d’une organisation.
3 challenges à affronter
Les choses se compliquent beaucoup quand on aborde les trois derniers challenges, culturels, organisationnels et humains.
Pourquoi ? Parce qu’ils induisent des changements importants dans le fonctionnement des organisations.
Les seules personnes qui aiment le changement sont... les bébés qui sourient quand on change leurs couches-culottes !
Les entreprises ne sont pas toutes prêtes, en 2016, à mettre en œuvre des SI innovants ; c’est leur capacité à gérer ces trois challenges qui fera la différence.
Culturels
Il est difficile de définir la culture d’une organisation ; il est plus facile d’en analyser les impacts sur son fonctionnement quotidien.
Sans prétendre à l’exhaustivité, je vous propose trois illustrations de l’impact de la culture d’une organisation sur ses choix SI.
Communication et collaboration. Office 365 ou Google for Work : ce sont les deux seuls choix opérationnels pour remplacer les antiquités Exchange ou Lotus Notes. J’ai beaucoup écrit sur ce sujet ; le principal, le seul véritable critère de choix est culturel. Les entreprises qui font le choix Office 365 privilégient la continuité dans les usages et le fournisseur et des changements à minima. Celles qui basculent sur Google for Work préfèrent une solution innovante, porteuse d’améliorations profondes dans les modes de collaboration, et assument une rupture, raisonnable, dans les modes de travail de tous leurs collaborateurs.
Ouverture. Continuer à vivre introverti, se croire protégé par son triple firewall ou choisir de s’ouvrir à l’extérieur ? Ce sujet que j’avais déjà abordé en 2010 reste, hélas d’actualité en 2016. Pour un trop grand nombre d’entreprises, il faut «protéger» ses clients internes des risques du monde internet, un Sherwood rempli de dangers. YouTube ou Facebook en sont deux exemples très représentatifs :
- YouTube : la majorité des entreprises disposent d’un canal YouTube à destination de leurs «clients externes», mais interdisent à leurs «clients internes» l’accès à ce site. Dans une grande banque avec qui je collabore, les informaticiens sont obligés d’aller sur YouTube depuis leurs smartphones personnels pour visualiser des vidéos d’aide au management d’un mainframe IBM !
- Facebook : au même moment, une autre banque, RBS (Royal Bank of Scotland) a choisi Facebook at Work pour 100 000 collaborateurs, quand la majorité des entreprises bloquent l’accès à Facebook.
Deux banques, deux cultures opposées...
Urgence. Je suis fasciné par le calme et la tranquillité de très nombreux informaticiens et dirigeants, face à un monde où tout évolue de plus en plus vite. Nous avons le temps, nous continuons à travailler comme avant, avec nos schémas directeurs à 5 ans, notre démarche maîtrise d’ouvrage, maîtrise d’œuvre, nos nouvelles applications qui verront le jour dans 3 ans...
En face, je rencontre des entreprises, encore trop peu nombreuses, qui ont créé une culture de l’urgence, de la vitesse, de la réactivité, du DevOps, de l’écoute permanente des clients internes et externes...
Andrew Grove, ancien CEO d’Intel, le disait déjà dans les années 90 : «Il n’y a que deux types d’entreprises, les rapides et les mortes»
Ce sera encore plus vrai en 2016 !
Organisationnels
L’organisation des échanges, la répartition des pouvoirs, sont profondément modifiées par les SI de nouvelle génération. J’ai choisi trois exemples de ces impacts organisationnels potentiels, parmi beaucoup d’autres.
Rôles respectifs des DG, directions métiers et DSI. La généralisation des solutions Clouds Publics et SaaS permet de clarifier leurs rôles respectifs. Les règles de base s’appuient sur le modèle B I S, Business, Infrastructures et Support que j’ai proposé au début de cette année 2015 :
- La DG fixe les objectifs et les ressources allouées au SI.
- La DSI est la seule responsable des infrastructures et des choix techniques applicatifs, comme la priorité absolue aux SaaS.
- Les directions métiers s’engagent dans le choix des solutions SaaS Support et définissent avec la DSI quels seront les usages métiers à développer en PaaS.
Pouvoir de la DSI. Les responsables de la DSI sont devant un choix cornélien : ils continuent à faire «comme avant» ou ils poussent les solutions innovantes, bénéfiques pour l’entreprise, mais dangereuses pour leur pouvoir.
Pourquoi ? Dans la majorité des entreprises, le poids, le pouvoir d’une direction se mesurent encore sur des paramètres historiques qui ont pour noms budget, montant des investissements et taille des équipes.
Il faut beaucoup de courage organisationnel à une DSI pour promouvoir les solutions innovantes Clouds Publics qui ont pour conséquences :
- Une forte réduction des coûts = budgets IT en réduction.
- Un basculement vers des solutions OPEX = Investissements CAPEX qui tendent vers zéro.
- Moins de collaborateurs, mais de plus haut niveau = effectifs en baisse.
Cela s’apparente à un «suicide organisationnel» ! Faut-il s’étonner qu’il y ait si peu de volontaires ?
Disparition de la frontière entre mondes professionnel et grand public. Les clients internes de l’entreprise utilisent des outils informatiques similaires dans leurs deux vies, professionnelles et personnelles.
Les entreprises doivent accepter, encourager cette convergence pour éviter que les outils mis à la disposition des collaborateurs ne se «ringardisent». Ceci pose des dizaines de questions, telles que :
- Promouvoir une démarche BYOD, Bring Your Own Device ; j’avais déjà évoqué ce sujet en 2011.
- Ouvrir à tous les accès aux outils les plus utilisés dans le grand public : Facebook, Twitter, Gmail, LinkedIn, YouTube, Whatsapp, Skype...
- Permettre aux clients internes d’accéder à leurs Webmail personnels depuis leurs lieux de travail.
- Choisir en priorité des solutions professionnelles issues du grand public quand elles sont disponibles : Facebook at Work, Google+, GoogleApps...
Humains
Toute entreprise doit, en priorité, être attentive aux impacts d’un SI nouveau sur ses collaborateurs. Je vous propose de vous concentrer sur deux challenges majeurs :
- Tous les collaborateurs sont ou seront clients internes des SI de nouvelle génération déployés en 2016.
- 100 % des informaticiens professionnels verront leurs métiers se transformer en profondeur.
Tous clients. Le nombre de clients internes de l’informatique a explosé au cours de ces dernières années mais il reste environ 50 % des salariés qui ne sont pas encore équipés, dans beaucoup d’activités non tertiaires.
Réseaux sans fil omniprésents, objets d’accès mobile à faible coût et usages SaaS universels vont permettre à ces 50 % de collaborateurs de devenir clients du SI avant la fin de la décennie.
En 2020, il sera impensable, inacceptable qu’un salarié ne dispose pas une adresse email au nom de son entreprise, qu’il ne puisse pas, comme tout le monde, accéder à des contenus numériques, collaborer, partager...
Repenser l’ergonomie de toutes les applications. La qualité, l’ergonomie de l’immense majorité des applications informatiques actuelles sont scandaleusement nulles et expliquent pourquoi les budgets d’assistance, de «hot line» sont si élevés.
Fin 2015, 1 500 M de personnes utilisent quotidiennement Facebook, 1 000 M Gmail, 900 M Whatsapp et... ces milliards de personnes n’ont aucun numéro de téléphone à leur disposition pour demander de l’assistance, et tout se passe très bien !
Faire aussi simple, aussi facile d’usage pour les usages professionnels que grand public devient urgent et indispensable. La bonne nouvelle, c’est que les nouveaux usages Clouds Publics le permettent déjà.
Préparer tous les informaticiens d’entreprise à changer de métier. Combien d’informaticiens professionnels demain ? Pour quels métiers ? Ce sont des questions prioritaires que tous les responsables informatiques doivent se poser, aujourd’hui, pour préparer le futur.
Exploitation, réseaux, développement, sécurité, études... Il n’existe pas un seul métier informatique qui ne sera pas bouleversé par la modernisation des SI. Ne pas anticiper ces mutations, c’est aller dans le mur, et très vite. L’anticiper, c’est permettre à la majorité des informaticiens de votre entreprise de trouver une place, une activité plus intéressante dans le futur.
Ce sera beaucoup plus difficile pour les millions de salariés des ESN (ex SSII) détachés dans les grandes entreprises. Leur nombre va fortement se réduire, et très vite, car ils serviront de «variables d’ajustement» pour absorber la réduction du nombre d’informaticiens dans les équipes internes des entreprises.
Synthèse
2016 peut devenir une année exceptionnelle pour le SI de votre entreprise, si tous les acteurs concernés, DSI, DG, métiers et clients internes sont prêts à accepter les changements induits par des décisions d’innovation.
Les challenges «externes», technologies, coûts et sécurité ne sont plus sur le chemin critique du succès. Les seuls obstacles à franchir sont «internes», culturels, organisationnels et humains.
Des entreprises l’ont compris et vont progresser ; d’autres ne sont pas prêtes. À quel groupe souhaitez-vous appartenir ?
Je suis persuadé que vous saurez affronter ces 6 challenges, même si le chemin à suivre ressemble un peu à ce pont de cordes !
J’en profite pour vous souhaiter une excellente année, pour vous, votre famille, votre entreprise et... votre Système d’Information.