Après COVID-19 : quelles Transformations Numériques universelles ? Deuxième partie : solutions numériques
25/05/2020
La première partie de ce billet a présenté les changements majeurs induits par le COVID-19 dans le fonctionnement de toutes les entreprises.
Cette deuxième partie est centrée sur les solutions numériques universelles que toutes les entreprises doivent mettre en œuvre pour gérer ces changements majeurs et se préparer à des futurs numériques de plus en plus imprévisibles.
Ces recommandations sont valables, quels que soient les secteurs d’activité ou les pays où sont installées les entreprises.
Comme dans la première partie de ce billet, j’ai fait le choix de me concentrer sur un petit nombre de réponses universelles :
● Infrastructures pérennes et solides.
● Usages “bureautique” universels pour tous.
● Données indépendantes des usages et des infrastructures.
● Confiance dans les usages numériques.
● Processus informationnels numériques de bout en bout.
Infrastructures pérennes et solides
Les infrastructures numériques sont les fondations sur lesquelles s’appuient les usages numériques. Elles sont essentielles mais souvent “invisibles”.
Pour l’illustrer, je vous propose l’exemple d’un spectacle d’opéra :
● L’orchestre est dans une fosse, presque invisible depuis la salle, sauf pendant l’ouverture. Ce sont les infrastructures.
● Les chanteurs sont sur la scène, bien visibles, les grandes vedettes du spectacle. Ce sont les usages.
● Le chef d’orchestre est dans la fosse pour l’essentiel du temps. Lors des applaudissements de fin de spectacle, les chanteurs l’invitent sur scène. Il représente le CTO, Chief Technical Officer, le patron des infrastructures.
La crise du COVID-19 a remis sur le devant de la scène les infrastructures, qui étaient auparavant les parents pauvres de l’informatique.
Réseaux sous-dimensionnés, serveurs incapables de répondre aux variations de charge, postes de travail à distance incapables d'accéder aux applications… des millions de salariés et de clients en ont fait l’expérience.
J’ose espérer que le COVID-19 aura enfin dessillé les yeux des dirigeants et DSI qui refusaient de moderniser leurs infrastructures, thèmes que j’ai abordés des dizaines de fois dans ce blog.
Pour aller à l’essentiel, je vous propose trois axes d’action :
- Fermer une fois pour toutes vos centres de calculs privés, hors de prix, passoires de sécurité, gloutons en énergie, rigides… pour basculer dans les grands clouds publics industriels AWS, GCP ou Azure. Ce n’est plus “vers le Cloud”, c’est : “Cloud public, maintenant !”
J’ai imaginé un indicateur très simple pour savoir où vous en êtes : le pourcentage de vos applications qui sont encore prisonnières de vos centres de calcul privés :
● Compris entre 100 % et 50 % : danger absolu. Changez de DSI et de CTO.
● Compris entre 50 % et 20 % : zone de risques plus raisonnable.
● Inférieur à 20 % : Bravo, vous êtes prêts à affronter toutes les prochaines crises.
- Basculer tous vos réseaux sur des solutions 100 % Internet et ne pas lésiner sur la vitesse et sur les redondances pour permettre à tous vos collaborateurs de travailler, où qu’ils soient. Des défaillances de réseaux ne sont plus acceptables en 2020.
- Imposez un navigateur comme seule fenêtre d’accès à 100 % de vos applications HTML5, disponible sur tous les PC, Macintosh, Chromebooks, smartphones et tablettes. Je vous propose un investissement “somptuaire” pour vous aider dans cette démarche : vous achetez un Chromebook et une application qui ne fonctionne pas sur cet objet d'accès est… définitivement interdite d’entrée dans votre entreprise.
Pourquoi donner autant d’importance aux infrastructures numériques dans un monde post COVID-19 ?
● Sans infrastructures fiables, rien ne fonctionne.
● Elles sont plus stables, plus pérennes que les usages.
● Bien anticipées, elles seront capables d’héberger des nouvelles applications dont personne ne peut connaître à l’avance la nature.
● Elles sont par nature universelles, pour l’essentiel indépendantes des pays et des secteurs d’activité des entreprises.
L’exemple des infrastructures routières en est une bonne illustration. Beaucoup de routes actuelles sont construites là où existaient déjà des routes romaines. Les voitures électriques circulent aussi bien que les thermiques sur les routes actuelles. Il faut simplement adapter des équipements annexes pour distribuer de l’énergie électrique en plus des produits pétroliers.
Tout ceci devrait donner encore plus de pouvoir aux CTO, responsables d’infrastructures, ce que j’appelle de mes vœux depuis longtemps.
Usages “bureautique” universels pour tous
Après les infrastructures universelles, votre deuxième priorité est les usages universels “bureautique”, et pour 100% de vos collaborateurs.
Les outils bureautiques universels, écrire, calculer, dessiner, présenter, communiquer… ont toujours été les premiers à être déployés quand de nouvelles infrastructures informatiques arrivent. Le tableur a accéléré la diffusion des PC, la messagerie électronique a été le premier usage d’Internet et du Web.
La première solution SaaS dans un cloud public utilisée par des millions de personnes a été Google Apps, disponible en 2007, renommé G Suite. Par rapport aux outils anciens de l’époque, Office de Microsoft, G Suite apportait deux innovations majeures :
● La possibilité de partager des contenus.
● La collaboration native permettant de produire des contenus à plusieurs, en partageant une seule et même version.
Brutalement plongés dans un monde où le travail à distance devenait la norme, tous les collaborateurs de l’entreprise ont redécouvert le rôle essentiel de ces fonctions de base.
L’autre grand vainqueur est la vidéoconférence. Le marché, en faible croissance, était encore dominé début 2020 par des solutions de l’Ancien Monde, telles que Webex ou GoToMeeting. En quelques semaines, l’expression “organiser une conférence Zoom” c’est banalisée.
Dans les mois qui viennent, toutes les entreprises peuvent et doivent immédiatement moderniser leurs outils bureautiques poussiéreux en prenant deux décisions “simples” :
● Interdire et éliminer tout outil bureautique archaïque qu’il faut encore installer sur les postes de travail. Parmi les candidats évidents :
○ Microsoft Office : Word, Excel, PowerPoint...
○ Les clients lourds de messagerie et agenda : Outlook, Mail d’Apple…
○ Les outils de vidéoconférence à installer: Teams, Webex, Skype, Zoom…
● En cohérence avec ce qui a été écrit sur les infrastructures, n’accepter que les outils accessibles depuis un navigateur :
○ G Suite de Google, Remotely de Zoho ou la version Web de Microsoft 365 pour les fonctions de base, envoyer des courriels, écrire, calculer ou présenter.
○ Des solutions natives WebRTC pour la vidéoconférence : Whereby, Meet de Google ou Bluejeans.
Ce sont des décisions que je préconise depuis… plus de dix ans et que de nombreuses entreprises innovantes avaient mises en œuvre avant que le COVID-19 n’apparaisse. Ces entreprises ont répondu instantanément, sans aucun effort, aux attentes de tous leurs collaborateurs à distance.
Que ces décisions de bon sens soient encore considérées comme révolutionnaires ou impossibles en 2020 dépasse l’entendement et met en évidence l’impossibilité qu'ont une majorité d’entreprises à innover dans ces domaines universels.
Miracle, et grande nouvelle ! Microsoft découvre en mai 2020 que collaborer nativement sur des documents est utile ! Un nouveau service, Microsoft Fluid Framework, permettra, quand il sera disponible dans quelques mois, de faire ce que permet Google Docs depuis 2007. Microsoft annonce fièrement que cette solution sera plus puissante que celle de Google ; 13 ans après, c’est quand même un minimum !
La troisième décision est de loin la plus importante mais demande que les deux premières aient été mises en pratique.
Il s’agit d’équiper 100 % des collaborateurs de ces outils bureautiques universels.
La crise du COVID-19, c’est aussi la revanche des opérationnels, des personnes qui sont sur le terrain et pas dans des bureaux : infirmiers, chauffeurs routiers, éboueurs, policiers, équipes de maintenance, ambulanciers… Ils ont tous droit, ils ont tous besoin, et souvent plus que les cols blancs, d’utiliser ces outils de partage, de communication et de collaboration.
Cet objectif peut se résumer en une phrase simple :
100 % des collaborateurs équipés d'outils natifs Web, pour produire, partager, collaborer et communiquer, quels que soient les contenus.
Données indépendantes des usages et des infrastructures
Il y a un peu moins d’un an, j’ai proposé une évolution du modèle initial B I S que j’avais imaginé en 2015.
J’y ai ajouté une dimension D, données, pour cette nouvelle version, B I S D.
Le monde numérique post COVID-19, imprévisible, rend cette évolution encore plus pertinente.
Des données, indépendantes des applications et des infrastructures, deviennent les nouvelles ressources numériques universelles. Elles peuvent être mises à la disposition de tous les collaborateurs de l’entreprise, quelles que soient les applications qu’ils utilisent.
Il faut aussi prendre en compte les différentes natures d’information dont a besoin l’entreprise. Pour trop de professionnels de l’informatique, les données structurées, financières, ressources humaines ou commerciales sont les seules dignes d’intérêt.
J’ai identifié 6 grandes familles d’information ; les trois premières sont universelles, les trois autres sont liées aux métiers des entreprises :
● Contenus bureautiques : textes, tableaux, présentations, PDF…
● Données structurées : financières, commerciales…
● Données multimédias : images, photos, vidéos…
● Données géographiques : cartographie, géolocalisation…
● Données 3D : ingénierie, industrie…
● Séries temporelles : analyses financières, maintenance industrielle...
Organiser cette indépendance entre les données, les infrastructures et les applications est urgent ; ce sera tout sauf facile, mais la résilience du Système d’Information qui en découle deviendra un atout majeur pour les entreprises qui réussissent cette indépendance.
Confiance dans les usages numériques
Nouvelles infrastructures, usages universels intensifs, travail à distance généralisé, les responsables de la sécurité doivent prendre en compte ces changements profonds et proposer des solutions différentes, qui répondent à de nouvelles attentes.
On n’a plus le droit de bloquer ces évolutions irréversibles sous des prétextes de sécurité et de confidentialité. Il faut les accompagner, les encourager, en proposant de nouvelles solutions de sécurité.
La bonne nouvelle ? Ces solutions innovantes existent. J’y ai consacré un billet publié il y a environ 1 an : “Cloud, la confiance”. J’en résume le contenu en une phrase :
la sécurité des solutions numériques dans les Clouds Publics est, dans 99,9999% des cas, meilleure que celles que fournissent les antiquités telles que VPN ou pare feux périmétriques.
Démarche Zéro Trust
Les démarches “zéro trust” sont aujourd’hui les meilleures réponses aux attentes des entreprises. Elles font l’hypothèse par défaut que rien n’est sécurisé et qu’il faut tout contrôler.
Ce schéma présente les 5 fonctions essentielles d’une démarche zéro trust :
● Vérifier l’identité de la personne qui se connecte. On complète les mots de passe par d’autres techniques regroupées dans la famille MFA, Multi Factor Authentication.
● S’assurer que l’on peut faire confiance à l’objet d’accès, quel qu’il soit.
● Chiffrer les données, en transit et dans les objets d’accès.
● Autoriser les accès aux applications, une par une, selon les personnes, selon les lieux d’accès.
● Fournir des outils d’audit pour des contrôles a posteriori quand c’est nécessaire.
L’offre de solutions de haute qualité permettant de mettre en œuvre une démarche zéro Trust est très riche ; le plus difficile, c’est probablement de faire des choix !
Résumons : il est interdit de soulever les alibis de la sécurité et de la confidentialité des données pour bloquer les évolutions urgentes et indispensables rendues nécessaires par la crise du COVID-19.
99% des personnes qui refusent ces évolutions, qui continuent à penser que les armes obsolètes du siècle dernier sont encore les meilleures, sont des trouillards ; ils ont peur d’affronter des attaquants innovants, très puissants, et se réfugient dans leurs châteaux forts moyenâgeux, “protégés” par des pare feux démodés.
Ils n’ont même pas l’excuse de la bravoure, de l’inconscience des Anglais lors de la “charge de la brigade légère”, envoyée au massacre contre les forces russes très équipées en artillerie.
Je n’ai aucun respect pour eux.
À l’inverse, j’ai beaucoup d’admiration pour les dirigeants, DSI et RSSI qui acceptent les défis de ce Nouveau Monde numérique et ont le courage de tout mettre en œuvre pour créer une confiance raisonnable, au service de leur entreprise et de ses collaborateurs.
En résumé de ce qui vient d’être écrit, le schéma ci-dessous regroupe les quatre fondations universelles nécessaires pour aborder avec succès un monde post COVID-19.
Les entreprises qui sont en cohérence avec ce schéma disposent de fondations infrastructures et applicatives universelles solides et pérennes, qui leur permettent d’affronter un futur imprévisible avec la certitude de pouvoir répondre aux défis nouveaux qu’elles devront affronter.
Tout n’est pas réglé pour autant ! Il faut maintenant s’attaquer à un très gros morceau, la numérisation de tous les processus informationnels.
Processus informationnels, numériques de bout en bout
Nous sommes en 2021 : la majorité des salariés travaillent à distance et l’entreprise doit gérer des dizaines de processus pour :
● Organiser l’embauche d’un nouveau collaborateur qui va travailler chez lui, en Nouvelle-Zélande.
● Lancer un appel d’offres pour un nouveau logiciel.
● Préparer le budget 2022 de la filiale espagnole.
● Faire approuver par le conseil d’administration les comptes de 2020.
● …
Dans le monde pré COVID-19, l'entreprise avait la possibilité, pour ces processus, de faire approuver ou signer des documents papiers.
L'entreprise a impérativement besoin, dans un monde post COVID-19 :
● Que ces processus soient numériques de bout en bout, sans jamais passer par la case papier.
● Que toutes les personnes concernées puissent modifier les documents numériques, sans les imprimer.
● Que les documents puissent être signés par des personnes à distance, tout en restant numériques.
● Que tous les contenus créés pendant ces processus soient accessibles à distance par les personnes qui y ont droit.
Ce “cahier des charges” est simple à définir, mais monstrueusement difficile à mettre en œuvre dans l’immense majorité des organisations.
Quel est le plus beau symbole de l’Ancien Monde ? Le parapheur !
Signe majeur du pouvoir, les parapheurs trônent sur les bureaux des dirigeants et attendent que ces maîtres du monde mettent leur “sceau” sur les documents qu’ils contiennent.
En arrivant dans ses nouveaux bureaux au ministère des Finances, Gérard Darmamin s'est plaint du nombre de parapheurs qui attendaient sur son bureau.
Combien en restera-t-il quand il quittera son poste ?
Il ne faut pas oublier que la majorité de ces processus mettent en jeu, non seulement des collaborateurs de l’entreprise, mais aussi des partenaires externes, clients, fournisseurs ou prestataires, souvent dans plusieurs pays.
Les solutions qui permettent cette numérisation de bout en bout, signature comprise, existent depuis longtemps. Cela fait des années que je signe tous les documents des entreprises dont je suis actionnaire et membre du conseil d’administration avec l’application Docusign, l’un des leaders de ce marché.
Pour rester fidèle à ma démarche qui privilégie des indicateurs simples, je vous propose l’exercice suivant :
● Comptez le nombre total de parapheurs qui circulent aujourd’hui dans votre entreprise.
● Planifiez une réduction progressive de ce nombre, qui pourrait suivre le calendrier suivant, ambitieux mais réaliste :
○ Réduction de 20 % à la fin de l’année 2020.
○ Réduction de 50 % à la fin de l’année 2021.
○ Réduction de 80 % à la fin de l’année 2022.
○ (Il est interdit de remplacer 3 parapheurs sur le même bureau par un parapheur plus grand !)
Objectif zéro parapheur !
Si vous réussissez cet exploit, vous aurez fait un pas de géant vers un transformation numérique majeure.
Dans les entreprises qui auront réussi cette numérisation de bout en bout de la grande majorité de leurs processus numériques, tout le reste suivra, de manière évidente. Elles seront en position de force pour innover dans tous les usages que je n’ai pas abordés dans ce billet, leurs usages numériques spécifiques, cœurs de métiers.
Synthèse
La Transformation Numérique accompagne et facilite les mutations profondes et pérennes, rendues indispensables dans un monde post COVID-19. Elle permet aux entreprises de s’adapter en permanence, et rapidement, à des environnements de plus en plus imprévisibles.
“Il vaut mieux être préparé à des catastrophes qui ne se produisent pas que de ne pas être prêts pour des catastrophes qui elles arrivent”. C’est un bon résumé des responsabilités des dirigeants.
Pour conclure, je vous propose une synthèse des caractéristiques d’une entreprise qui a compris quelles sont les transformations numériques universelles et indispensables pour réussir dans un monde Post COVID-19 :
● Des infrastructures numériques industrielles, robustes et évolutives :
○ Basculement de tous les serveurs dans des clouds publics.
○ Des réseaux rapides mis à la disposition de 100 % des collaborateurs, où qu’ils soient.
○ La possibilité d’accéder à 100 % des applications numériques depuis un navigateur, sur tout objet d’accès, smartphone, tablette, Chromebook ou PC.
● La possibilité de travailler depuis tout lieu, bureau, domicile, hôtel… en faisant confiance aux collaborateurs et sans outils intrusifs de surveillance.
● Des usages bureautiques universels, pour tous, permettant de travailler en mode collaboratif natif sur tout type de contenu, textes, tableurs, présentations, données structurées, multimédia…
● Des outils pour créer la “confiance” dans le cloud, dans une logique “Zéro trust”.
● Des processus informationnels 100% numérisés, rendant l’usage du papier et de la signature manuscrite inutiles.
Cela devrait vous occuper pour au moins deux ou trois années !