½ siècle d’informatique et de numérique, et ce n’est pas terminé
12/09/2023
J’ai croisé Christophe Coupez quand il travaillait dans le Groupe Bouygues. En 2023, il a repris contact avec moi pour me demander si j’accepterai de publier un texte pour son projet “Digital Rétro” sur ma “longue” vie professionnelle dans l’informatique et le numérique.
J’ai dit oui, et profité du calme relatif du mois d’août 2023 pour le rédiger.
Avec son accord, j’en ai repris une grande partie dans ce long billet de blog.
J’ai choisi de privilégier un petit nombre de moments forts de ma carrière, sélectionnés car ils permettent, je l’espère, de donner des pistes d’action qui sont toujours valables aujourd’hui pour vous.
Je fais partie des personnes, peu nombreuses, qui ont vécu les principales évolutions du monde de l’informatique et du numérique depuis ses débuts, et… qui restent actives dans ce secteur.
Mon objectif, en publiant ce long texte, n’est pas de parler de moi, ce qui a peu d’intérêt. Mon objectif, c’est de tirer de mes expériences des enseignements qui puissent vous aider, un peu, à vous préparer, à vivre vos propres aventures, passionnantes et complexes, dans le monde du numérique d’aujourd’hui et demain.
Je les ai regroupés dans une douzaine de thèmes.
Merci, le système éducatif français
Le système éducatif public français que j’ai connu était exceptionnel.
L’essentiel de mes études, je les ai faites dans le système public français, même si une grande partie de mes études jusqu’au baccalauréat se sont déroulées hors de France, dans les lycées français à l’étranger.
Mes trois années de préparation des concours des grandes écoles scientifiques, je les ai réalisées dans un lycée public parisien, Saint-Louis, dans un environnement matériel très “rustique”, comme le montre cette photo d’une salle de classe de l’époque!
J’ai été admis à Supélec, devenu depuis CentraleSupélec, l’année de la mort de mon père. Boursier de l'État pendant mes trois années d’études, j’ai donné de nombreux cours particuliers pour ne pas être une charge trop lourde pour ma mère.
J’ai fait mon service militaire de 18 mois, oui cela existait encore, comme scientifique du contingent.
En parallèle, j'ai suivi une formation MBA à l’Université Publique Paris I, à l’IAE, Institut d’Administration des Entreprises. La formation était organisée pour des personnes ayant une activité professionnelle, avec des cours les vendredis soir et presque tous les samedis.
- C’était difficile de faire les deux en même temps? Oui.
- Cela demandait-il de sacrifier la majorité de ses week-ends? Oui.
- Sans effort, sans une volonté forte, est-il facile de progresser? Non.
J’ai obtenu mon diplôme de l’IAE de Paris en même temps que je terminais mon service militaire.
Quelques années plus tard, j’ai participé à un concours très sélectif organisé par un organisme public, la FNEGE, Fondation Nationale pour l’Enseignement de la Gestion des Entreprises. Ayant fait partie de la quarantaine de personnes sélectionnées, j’ai obtenu un financement de 12 mois, voyages, études et résidence, pour étudier dans une université du continent américain. Entre Austin au Texas, Sherbrooke au Canada et Northwestern à Chicago, j’ai choisi Northwestern. C’était la plus prestigieuse, même si le climat de Chicago n’est pas réputé le meilleur!
En contrepartie de ce financement, je m’étais engagé à enseigner en France pendant un minimum de 5 ans, ce que j’ai fait, et j’y reviendrai.
Ne pas hésiter à demander conseil
Je suis rentré à Supélec, école qui comme son nom l’indique est tournée vers l’électricité. Est-ce que c’était un choix raisonné? Non.
La méthode française des concours scientifiques fait que l’on postule à des écoles dans de nombreux domaines, généralistes, aériens, travaux publics… et que l’on rentre dans l’une des écoles pour laquelle on a réussi le concours.
Est-ce que l’électricité m’a passionné? Pas vraiment.
Pour choisir une voie professionnelle après Supélec, l’IAE et mon service militaire, j’ai demandé leur avis à plusieurs personnes, dont le dirigeant d’une entreprise de conseil en France. Il m’a conseillé deux secteurs d’activités, l’informatique ou le nucléaire.
L’informatique, à la fin des années 1960, c’était un domaine très jeune, en émergence, dont on parlait peu. J’ai suivi son conseil et cela a orienté toute ma carrière.
J’ai repris le flambeau et j'aide souvent des jeunes qui me demandent conseil, qu’ils participent aux enseignements que j’anime ou qui me contactent en m’expliquant pourquoi ils souhaitent me parler.
Quand j’en croise quelques-uns après plusieurs années et qu’ils me disent que mes conseils ont été utiles pour eux, c’est l’une des plus grandes satisfactions que l’on peut avoir dans sa vie professionnelle.
Saisir les opportunités
J’ai commencé ma carrière informatique chez Control Data, le leader des supercalculateurs de l’époque qui a disparu depuis. J’ai travaillé, en FORTRAN, sur des calculs scientifiques pour ELF Aquitaine (devenu TotalEnergies) et ensuite le CEA.
Dans une deuxième étape, je suis rentré comme chef de projet informatique aux Chargeurs Réunis, entreprise de transport maritime. J'étais chargé de l’informatisation des conteneurs, forte innovation à cette époque, avec un focus fort sur les transports vers l’Afrique.
Je travaillais sur l’un des tous premiers ordinateurs IBM 360, en utilisant le langage COBOL.
Bref, un début de carrière classique pour l’époque.
Un jour, je suis tombé par hasard sur une annonce dans le journal “Le Monde” de la FNEGE, dont j’ai parlé plus haut:
- J’avais prévu de partir aux Etats-Unis? Non.
- J’avais prévu de faire un MBA? Non.
- J’avais prévu de m’engager à enseigner pendant 5 ans? Non.
C’est pourtant ce que j’ai fait en acceptant de répondre à cette annonce qui a eu un impact majeur et très positif sur la suite de mes activités professionnelles.
Tout au long de ma carrière, des rencontres, des lectures m’ont amené à démarrer de nouvelles aventures professionnelles. Elles n’étaient pas dans un “schéma directeur de carrière” à 20 ans!
La croissance exponentielle des potentiels des outils numériques s'accélère. Nous devons tous, vraiment tous, être en permanence à l’écoute de ces évolutions.
Elles sont porteuses de destruction d’activités dans de nombreux secteurs du numérique, et en même temps, créatrices d’opportunités fortes.
Saisir des opportunités, cela ne veut pas dire attendre passivement qu’elles vous soient proposées.
Saisir des opportunités, c’est être curieux, proactif, à l’écoute et savoir les provoquer.
Anticiper
Anticiper, ce n’est pas faire des prévisions: c’est se préparer pour l’arrivée d’un événement certain ou quasi certain.
J’ai choisi un exemple personnel simple, mais qui montre que de petites anticipations peuvent avoir des bénéfices majeurs.
Quand j’ai su que j’étais accepté par la FNEGE, on m’a annoncé que mon départ à Northwestern aurait lieu dans quelques mois.
En me renseignant auprès de l’université, j’ai appris que tous les documents remis aux professeurs devaient être dactylographiés.
En France, à cette époque, aucun cadre, aucun ingénieur ne maîtrisait l’usage du clavier, activité considérée comme “non noble” et réservée à des métiers spécialisés de dactylographes.
J’ai pris la décision d’acheter… une machine à écrire mécanique portative avec un clavier français, seul outil disponible à l’époque. J’ai aussi acheté une méthode d’apprentissage de la dactylographie.
Pendant une bonne centaine d’heures, j’ai fait des exercices, très “rasoirs”, pour acquérir la capacité d’écrire au clavier avec 10 doigts, aussi vite qu’à la main, sans regarder le clavier.
Nous étions une quinzaine de Français envoyés par la FNEGE à arriver à Northwestern en septembre. J’étais… le seul à avoir anticipé ce besoin et apporté dans ma valise la machine à écrire que je savais utiliser. Tous les autres ont dû, en urgence, acheter une machine à écrire américaine, inutilisable en France à leur retour, car avec un clavier américain. Je les voyais tous les soirs, quand nous travaillions ensemble, taper à deux doigts, avec une vitesse dérisoire, quand j’étais capable de créer mes documents entre cinq et dix fois plus vite qu’eux, et avec moins d’erreurs.
Petite cause, grands effets! Cette maîtrise du clavier m’a beaucoup aidé à suivre en 12 mois, sur quatre trimestres, tous les cours nécessaires pour obtenir un MBA complet, ce que les étudiants classiques font en 2 années scolaires. Oui, aux Etats-Unis, les universités ne ferment pas pendant l’été et j’ai pu continuer à suivre pendant l’été les cours qui me manquaient. Au lieu de suivre quatre cours par trimestre pendant six trimestres, je me suis inscrit à… six cours par trimestre pendant quatre trimestres.
Ceci voulait dire suivre des cours dans la journée et d’autres le soir, prévus pour les étudiants américains inscrits au MBA tout en travaillant pendant la journée.
Facile, Non! Satisfaisant, oui!
Cet apprentissage du clavier me rend encore service aujourd’hui quand j’utilise un ordinateur portable. C’est l’un des meilleurs investissements que j’ai pu faire pour augmenter ma productivité quotidienne, et ce depuis des dizaines d’années.
S'indigner
Oui, il m’arrive de m'indigner, dans le monde du numérique. S'indigner, c’est pousser un coup de gueule quand vous voyez des choses qui vous choquent, quand vous pensez que des décisions qui sont prises peuvent avoir des conséquences négatives fortes.
Il est plus facile de jouer le rôle du mouton docile, de suivre les consensus, les conseils du genre: tout le monde agit ainsi, on a toujours fait comme cela.
Le monde du numérique n’échappe pas à ce mouvement de fond, parfaitement identifié par Machiavel quand il écrivait dans “Le Prince”:
“Les innovateurs se créent des ennemis de tous ceux qui bénéficiaient du système ancien et ne disposent que d’un soutien mou de ceux qui pourraient bénéficier du nouveau système.”
Selon les époques, IBM, SAP, Microsoft, Oracle et quelques autres ont largement bénéficié de ce mouvement moutonnier.
En 2023, je mène un combat majeur pour que l’Europe du numérique existe encore en 2030.
J’ai une position forte, qui me vaut l’hostilité d’une grande partie de l'establishment politique, économique et professionnel. Je défends l’idée que l’Europe et la France doivent choisir leurs combats numériques et ne pas disperser leurs ressources, limitées, en livrant des combats que je considère comme définitivement perdus, telles que les solutions IaaS de Clouds Publics ou les outils bureautiques dans le Cloud.
Il serait plus facile, plus confortable pour moi de ne rien écrire sur ces sujets sensibles et de faire semblant de croire que tout le numérique peut et doit devenir “souverain”.
Je préfère mettre en lumière, de manière positive, quelques domaines dans lesquels l’Europe a des atouts forts et peut avoir une démarche de conquête, offensive, au lieu de rester sur des positions défensives.
Partager ses compétences
Je suis rentré dans le monde de l’enseignement à la suite des engagements que j’avais pris avec la FNEGE.
Mon premier poste: professeur de Recherche Opérationnelle et d’Informatique à l’INSEAD, l’une des plus prestigieuses écoles de Management en Europe. J’étais plus jeune que la majorité de mes élèves et n’avais jamais suivi de formation me permettant de me préparer à l’enseignement. Ce fut une année extrêmement difficile!
Je n’ai pas arrêté d'enseigner depuis. CentraleSupélec, l’IAE de Paris, Science Po Paris, ESCP, EPFL à Lausanne, ISEP, GEM… elle est longue la liste des lieux où j’ai eu l’honneur d’enseigner.
J’ai aussi animé des centaines de séminaires sur l’informatique et le numérique, dans plus de 20 pays, en français, anglais et espagnol.
Ce sont des activités passionnantes, que je continue à mener, de manière moins intensive, étant pris par mes activités d’éditeur de logiciels SaaS.
J’encourage tout le monde, je dis bien tout le monde, à faire les efforts nécessaires pour se mettre devant un public et partager ses compétences. Nous avons tous des choses intéressantes à dire, à partager.
On peut le faire en commençant par des présentations à l’intérieur de son entreprise.
Ensuite, il faut chercher des opportunités pour intervenir pendant des conférences professionnelles ou pour donner des cours comme enseignant invité dans des écoles ou universités.
Le faire bien, cela demande beaucoup de temps et d’efforts, et rien n’est jamais acquis.
Un exemple personnel et récent: j’ai accepté en 2022 de réaliser une conférence TEDx pour CentraleSupelec, d’une durée de 17 minutes sur le thème qui me tient à cœur, l’Europe du Numérique.
Fort de mes expériences passées, des centaines de conférences que j’avais déjà animées, je n'avais pas imaginé le gigantesque travail que cela représenterait.
J’avais le soutien d’une coach professionnelle de grande qualité. Malgré cela, j’ai passé des dizaines d’heures pour préparer ces 17 minutes.
Oui, je vous encourage tous à animer des cours et des conférences.
Oui, mais faites-le seulement si vous êtes prêts à investir beaucoup de temps et d’efforts pour préparer sérieusement chacune de vos interventions.
C’est une question de respect pour les personnes qui vous font l’honneur de vous écouter.
Le droit à l’erreur
Dans mes activités de conseil, j’ai eu souvent pour mission d’aider des entreprises à anticiper les tendances majeures dans le numérique pour les aider à ne pas garder trop longtemps des solutions en fin de vie.
J’ai eu une majorité de succès dans ces actions, mais il m’est aussi arrivé de me tromper, et lourdement!
Quelques exemples:
- La mort des mainframes IBM, que j’avais annoncée vers la fin des années 1990. En 2023, plus de 5 000 grandes entreprises les utilisent encore.
- Le remplacement des ERP intégrés par des solutions “best of breed”. L’arrivée des solutions SaaS dans le Cloud a accéléré ce mouvement, mais les géants comme SAP continuent à vendre leurs ERP intégrés avec des taux de croissance raisonnables.
- J’ai essayé, au début des années 2000, de promouvoir les usages professionnels des mondes virtuels de Second Life, sans succès. Échaudé par cet échec, je suis devenu prudent sur l’avenir pour les entreprises de ses successeurs du type Metaverse.
- J’avais prévu la marginalisation rapide des clients lourds, remplacés par les navigateurs Web. En 2023, dans le monde professionnel, une majorité de personnes continuent à utiliser les outils de Microsoft Office, Outlook, Excel, Word et autres PowerPoint sur leurs clients lourds Windows ou Macintosh. Je n’en fais pas partie…
Connaître ses limites
J’ai fait beaucoup d’erreurs dans ma vie professionnelle, mais l’une des plus importantes a été de croire que je pouvais tout faire, et tout faire bien.
Il m’a fallu plusieurs années pour découvrir que je n’étais pas fait pour le métier de Directeur Général, de CEO. J’ai peu d'appétence, donc peu de réussites, dans la gestion opérationnelle d’une entreprise, de ses budgets, de sa trésorerie ou de ses ressources humaines.
Quand on crée sa première entreprise, en l'occurrence Bureautique SA, il est naturel de vouloir en être le DG. Cela n’a pas fonctionné et il a fallu trouver un DG pour m’aider.
Les deux entreprises les plus récentes que j’ai créées, Revevol et Wizy, je l’ai fait avec Laurent Gasser comme DG, et c’est un excellent DG.
La complémentarité de nos compétences donne d’excellents résultats, et il n’y a pas de risques de conflits, chacun ayant conscience de ses limites et travaillant dans les domaines où il est le meilleur.
La recherche permanente de l’innovation
L’innovation dans le monde du numérique, c’est certainement l’idée qui a le plus orienté mes activités et ma carrière.
Cela fait des années que je passe en moyenne 2 heures par jour à faire de la veille technologique. Il ne se passe pas une journée sans que je découvre une idée, un produit innovant dont j’imagine rapidement les potentiels.
Je vais illustrer cette recherche permanente de l’innovation par trois exemples. J’ai à dessein choisi des cas anciens pour montrer que c’est une démarche qui me guide depuis le début de ma carrière.
L’un des chocs technologiques les plus impressionnants que j’ai vécu a été, à la fin des années 1970, la visite du PARC, Palo Alto Research Center en Californie. J’y avais été invité par Paul Strassmann, CIO de Xerox, une personne exceptionnelle.
Le PARC, c’était un centre de recherches financé par Xerox, avec 300 personnes du plus haut niveau. J’y ai découvert le réseau Ethernet, les écrans graphiques, les imprimantes laser, la transmission à haute vitesse de graphiques…
Cette vidéo est exceptionnelle: en 10 minutes, elle présente les principales innovations nées au PARC.
Le décalage entre le monde extérieur et ce que l’on pouvait observer à l'intérieur du PARC, ce fut un choc comme je n’en ai jamais eu depuis. On y parlait de “Bureau sans papier” Paperless office, ou Office Automation.
L’échec du PARC chez Xerox est un bon exemple du décalage entre la culture de la maison mère, Xerox, qui gagnait des fortunes avec les copieurs et le papier et celle du centre de recherche PARC qui parlait de… paperless.
C’est à la suite de cette visite que j’ai eu l’idée de créer le mot Bureautique, car je trouvais l’expression Office Automation très “moche”.
Le deuxième exemple, ce sont mes réflexions sur le télétravail. J’ai publié il y a quelques mois sur LinkedIn une copie de l’entretien que j’avais eu avec la revue SVM, Science et Vie Micro, sur ce thème, en … 1984. Les idées que j’y exprimais n’ont pas pris trop de rides.
A ma grande surprise, ce texte a eu un succès viral avec 600 000 vues!
Le troisième exemple me permet de mettre en avant une entreprise française, le Groupe Bouygues, un pionnier dans les usages innovants de technologies informatiques, et ce depuis longtemps.
En septembre 1985, Alain Pouyat, DSI du Groupe Bouygues, m’a invité à donner une conférence devant 50 cadres dirigeants du groupe, dont le fondateur Francis Bouygues.
Le thème: la bureautique.
De tous les DSI que j’ai croisé dans ma carrière, et il y en a beaucoup, Alain Pouyat et celui qui m’a le plus impressionné. Yves Caseau, actuel DSI de Michelin et l’un des plus brillants DSI aujourd’hui en activité a fait une partie de sa carrière dans le Groupe Bouygues. Une coïncidence? A mon avis, non.
Nous sommes en 1985: c’est la première fois que j’anime une conférence diffusée en vidéotransmission vers trois autres sites. L’utilisation du satellite Telecom 1, non géostationnaire, obligeait Bouygues à choisir une heure pour la conférence compatible avec le passage du satellite au-dessus de Paris. Des camions portant des antennes de 2 mètres de diamètre avaient été installés sur chacun des trois sites distants.
Les questions étaient posées en utilisant le réseau téléphonique classique, Telecom 1 n’étant pas bidirectionnel.
Sur ce schéma, j’ai regroupé quatre images tirées de la vidéo de cette conférence. La qualité des images est moyenne, mais n’oubliez pas que l’on est en 1985.
- Le titre de l’intervention.
- Le schéma de l’installation de télétransmission.
- Mon utilisation d’une technologie “révolutionnaire”, les transparents avec un rétroprojecteur. Les transparents étaient imprimés sur une laser Apple, en noir et blanc, dont j’avais acheté l’un des premiers exemplaires en 1984, directement auprès de Jean-Louis Gassée, PDG d’Apple France.
- Enfin et surtout, l’intervention de Mr Francis Bouygues à la fin du séminaire pour confirmer l’importance qu’il donnait à ce sujet et à sa volonté de faire de l'informatique un outil clé de compétitivité pour le Groupe Bouygues.
En parallèle à la conférence, Alain Pouyat avait organisé une exposition qui mettait en évidence quelques usages innovants de l’informatique dans le Groupe Bouygues.
Cette conférence est restée gravée dans ma mémoire. C’est un bel exemple d’une triple innovation:
- Le thème: la bureautique au service des cadres et dirigeants.
- La technologie utilisée: vidéotransmission satellitaire.
- Management: la volonté du fondateur du Groupe Bouygues de mettre l’informatique au service de la compétitivité de son entreprise.
Et tout cela, ne l’oubliez pas, c’était en… 1985, il y a presque 40 ans!
(Je suis en attente de l'autorisation du Groupe Bouygues pour ajouter un lien vers cette vidéo exceptionnele.)
Entrepreneur, quel beau métier!
La première entreprise que j’ai créée, à la fin des années 1970, se nommait Bureautique SA. Logique, j’étais propriétaire de la marque Bureautique, que j’avais déposée.
Toutes les entreprises que j’ai créées, je l’ai fait avec un associé. C’est à mon avis une démarche efficace si l’on veut réussir. Être au moins deux personnes pour prendre des décisions, cela permet d’analyser plus efficacement les options qui sont sur la table.
Quelques exemples:
- Pierre Benhamou et le Groupe Dataid pour Bureautique SA.
- Sylvain Jouanny pour Finaki Espagne.(sur cette photo avec moi).
- Laurent Gasser pour Revevol et Wizy.io.
Bureautique SA, c’était la première société de services dédiée aux usages universels de l’informatique. Il y avait à l’époque des dizaines de fournisseurs spécialisés: Wang, Wydec, DEC, Olivetti, IBM… La majorité d’entre eux ont disparu depuis.
L’un des grands succès de Bureautique SA a été la création des Arènes de la bureautique, une conférence annuelle qui réunissait fournisseurs et clients dans des lieux sympathiques, qui changeaient tous les ans.
Pendant les arènes, devenues ensuite les Arènes de l’Informatique, nous avons organisé le premier concours en France, et probablement dans le monde, de développement No-code. Le jour de leur arrivée, on donnait aux fournisseurs présents un problème à résoudre en 36 heures. Les résultats étaient présentés à la fin des journées et les participants élisaient les vainqueurs.
En 2006, j’ai été l’un des fondateurs de Revevol, la première ESN Cloud en France, avec un focus fort sur… la bureautique collaborative dans le Cloud.
Février 2007: Google présente à Paris, en première mondiale, Google Apps, devenu depuis Google Workspace. C’est, à ma connaissance, la seule et unique fois qu’un nouveau produit de Google n’a pas été annoncé en premier à Mountain View, au siège de la compagnie.
Pourquoi? Quand Google m’a demandé, fin 2006, de trouver des “early adopters” de leur futur produit Google Apps, j’ai contacté quelques dizaines de DSI que je connaissais, ouverts à l’innovation.
Résultat: 60% des early adopters dans le monde étaient… français.
C’est aussi une entreprise française innovante, Valeo, qui a été la première grande entreprise au monde à déployer massivement Google Apps pour plus de 35 000 collaborateurs, dès 2007.
C’est une belle démonstration que les entreprises françaises peuvent être pionnières dans les usages de l’informatique et du numérique. Et oui, je suis fier d’avoir participé au lancement dans le monde de la bureautique collaborative native dans le Cloud.
Aujourd’hui: Cofondateur de WIzy.io
Toujours avec Laurent Gasser, et après avoir cédé notre participation dans Revevol qui continue ses activités avec succès, nous avons créé Wizy.io.
Cette photo a été prise à Phoenix (Arizona) en 2008. Laurent et moi étions les seuls non américains invités à parler au “KickOff Meeting” de Google Entreprise. Le logo de Google sur les chapeaux a beaucoup changé depuis!
C’est pour moi, une fois de plus, la découverte d’un nouveau métier. J’ai quitté le monde du conseil et des services pour devenir éditeur de logiciels, SaaS, Software as a Service dans le cloud public, évidemment.
Wizy commercialise deux produits:
- WizyEMM: un outil pour gérer et sécuriser les terminaux Android. Face à la forte concurrence de “PME” comme Microsoft, VMWare ou IBM, WizyEMM propose une solution moderne, économique, native SaaS, construite sur les architectures les plus récentes d’Android.
- WizyVision: c’est une première mondiale, au service des collaborateurs en première ligne, qui s’appuie sur la photo, la voix et beaucoup d’IA embarquée pour permettre aux équipes terrain de rentrer dans le numérique sans avoir à utiliser le clavier, ce dont ils ont horreur.
Avec WizyVision, j’ai l’ambition de redonner aux équipes en première ligne la place, essentielle, qu’ils devraient avoir dans le monde du numérique. C’est loin d’être le cas, aujourd’hui, et dans le monde entier.
Après avoir créé le mot Bureautique pour parler des outils universels des collaborateurs dans les bureaux, je vous propose aujourd’hui d’utiliser le mot Frontique pour parler des outils universels des travailleurs terrain, les FLW, Front Line Workers en anglais, ce qui sont en première ligne, au front.
Et demain ?
DLC, Date Limite de Consommation: il n’y a pas de DLC pour Louis Naugès!
Tant que mon corps et mon cerveau me le permettront, je continuerai à travailler dans ce monde fascinant du numérique.
Pourquoi ?
- Avec WizyVision, j'agis pour réduire la plus grande fracture numérique au monde, entre les équipes en première ligne et les collaborateurs bureau. WizyVision permet aux entreprises d’obtenir des ROI rapides tout en améliorant la qualité de vie au travail de leurs collaborateurs terrain. C’est aussi le moyen de lutter contre un fléau mondial, l’illettrisme. 48% de la population mondiale est illettrée, incapable de comprendre un texte qu’elle lit. Difficile de trouver une mission plus motivante en ce moment.
- Chaque matin, je me lève en sachant que je vais découvrir une innovation numérique importante, et en parler pour donner aux entreprises l’envie de s’en emparer.
- Le décalage entre les potentiels actuels des solutions numériques et leurs usages dans les entreprises, publiques ou privées, s'accroît tous les jours de manière dangereuse. Par mes écrits et mes actions de sensibilisation, j’essaie de toutes mes forces de réduire, un peu, ce décalage.
- Des ruptures fortes se produisent en permanence. En 2023, l’IA Générative a fait une percée spectaculaire et ses impacts sur un grand nombre de métiers seront forts et immédiats, comme je l’ai expliqué dans ce billet de mon blog.
- Européen convaincu, je mène un combat permanent pour que l’Europe du Numérique existe encore en 2030. Face aux géants américains, chinois et de l’Asie non chinoise (Corée du Sud, Taiwan, Japon) l’Europe doit choisir les combats qu’elle peut et doit mener pour garder une place raisonnable dans cette industrie mondiale du numérique.
- Je suis persuadé que le numérique peut avoir des impacts forts et positifs sur l’avenir de notre planète, et de deux manières:
- En faisant des choix intelligents, les entreprises peuvent réduire rapidement et fortement les impacts de leurs usages numériques. Un exemple: en fermant les centres de calcul “on premise” pour basculer dans les clouds publics, on réduit dans un rapport 4 à 8 ses consommations d’énergie.
- En développant des solutions métiers qui aident les entreprises de tous les secteurs d’activités à innover pour proposer des réponses efficaces aux défis posés par les dérèglements climatiques actuels.
Et maintenant… à chacun d’entre vous de reprendre le flambeau
Sur tous ces sujets, et beaucoup d’autres, il y a tellement à faire dans le numérique que je ne comprendrais jamais les professionnels de ce secteur qui sont blasés, pessimistes ou négatifs.
Dans le numérique, la ressource la plus importante en France et en Europe, et de loin, ce sont ses talents disponibles.
J’espère que ces quelques idées simples et fortes que j’ai mises en évidence pour parler de mon ½ siècle de vie professionnelle dans l’informatique et le numérique vous donneront quelques pistes utiles pour que chacun d’entre vous, à sa manière, devienne un héros du numérique.
L’Europe et la France en ont un besoin urgent.