Numérique et technologie, meilleures armes contre le réchauffement climatique?

 

AdS DPC thumb up positif S 183628565Et si le numérique et la technologie étaient les meilleures armes pour lutter contre le réchauffement climatique ?

C'est par ce thème essentiel que je termine ma série de quatre billets sur le numérique, ses dangers et ses potentiels.

Dans la première partie de cette analyse, j’ai présenté le danger numérique le plus immédiat, les cyberattaques sur les infrastructures physiques de transport. Début février 2022, des attaques sur des ports européens ont, hélas, confirmé mon pronostic.

Dans la deuxième partie, j’ai analysé quels pourraient être les impacts d’une guerre dans le détroit de Taiwan sur l’industrie des microprocesseurs.

Dans la troisième partie, j’ai abordé le thème des risques liés à la croissance exponentielle des potentiels des technologies numériques.

Cette quatrième partie analyse le grand défi mondial de la maîtrise du réchauffement climatique et des rôles, positifs, que peuvent y jouer le numérique et la technologie.

Il est impossible de parler du réchauffement climatique en se focalisant uniquement sur le numérique et la technologie.

J’ai organisé ce billet en quatre parties :

● Quels défis à l’horizon 2030.

● Quels acteurs pour lutter contre le réchauffement climatique.

● Un acteur clef : les organismes financiers.

● Un acteur clef : numérique et technologies.

J'ai écrit un texte très long, avec beaucoup de références, de graphiques et de liens, pour vous donner la possibilité d'étudier en profondeur ce sujet majeur, qui nous concerne tous. J'espère que ce gros effort vous sera utile et vous aidera dans vos réflexions sur ce thème.

N'hésitez pas à partager largement autour de vous ce billet, si vous pensez qu'il peut aider d'autres personnes à avoir une vision complète et positive des actions a mener pour sauver la planète avant 2030.

 

1 - Horizon 2030+ : réchauffement climatique hors de contrôle

Dans la lutte contre le réchauffement climatique, le numérique n’est pas l’alpha et l'oméga des réponses, loin de là.

Commençons par les mauvaises nouvelles : le World Economic Forum a publié en janvier 2022 son rapport sur les risques globaux pour 2022.

À la question : quelle est votre position sur l’avenir du monde, 16% seulement des répondants ont une vision positive ou optimiste.

XWEF - Outlook for the world

Je fais partie des personnes qui sont convaincues que le réchauffement climatique est un danger mortel pour la planète. Cette conviction s'est construite petit à petit, par l’étude de nombreux documents, une analyse scientifique et rationnelle des chiffres qui montrent les évolutions de ces dernières décennies.

Le club de ceux qui nient les impacts de l’homme sur le climat, des personnes qui croient que la terre est plate, des antivax, des chantres de la décroissance… je n’en fais pas partie.

J’ai écrit en 2021 deux billets sur les différents scénarios possibles pour affronter cette crise :

Quel avenir pour la planète : “More from Less” ou “Less is More”.

L’Europe, leader mondial dans les usages numériques au service de la planète.

Si une rupture forte dans les actions menées pour réduire le réchauffement climatique ne se produit pas rapidement, si les mesurettes actuelles sont maintenues, le monde sera dans une situation catastrophique en 2030.

Ce n’est pas pour cela qu’il faut céder au catastrophisme (Doomism en anglais), au contraire. Dans la suite de ce texte, j’analyse ce que différents “acteurs” peuvent faire pour rendre cette catastrophe évitable.

 

2 - Quels acteurs pour lutter contre le réchauffement climatique

J’ai identifié six familles d’acteurs qui peuvent avoir un rôle dans la lutte contre le réchauffement climatique :

● Les organisations internationales : ONU, COP…

● Les pays.

● Les entreprises.

● Les particuliers.

● Les organismes financiers.

● Les innovations technologiques et numériques.

Chacune de ces familles d’acteurs peut agir sur les deux dimensions :

● Offre : réduire l’offre d’énergies carbonées et d’émissions de gaz à effet de serre.

● Demande : réduire la demande en énergie, carbonée ou non.

XClimat - Potentiels Acteurs - Offre et demande + Numérique + org InternDans ce premier tableau, je vous présente mon évaluation personnelle des impacts positifs potentiels que chacun de ces six acteurs pourrait avoir sur l’offre et la demande d’énergies carbonées. Cinq étoiles correspondent au plus haut impact possible, une étoile au plus faible.

Je vais aller vite sur les quatre premiers acteurs.

Je traiterai plus à fond le cinquième, les organismes financiers ; c’est un domaine où des décisions rapides peuvent avoir des impacts positifs immédiats.

L’essentiel de ce billet sera consacré au sixième, numérique et technologies, qui est celui sur lequel j’ai une raisonnable compétence.

Organismes internationaux et états

La dernière COP, 26e du nom, a pris fin à la mi-novembre 2021, après 15 jours de négociations à Glasgow.

XCop 26 temperature pledgeLe rapport final dit, de manière “diplomatique”, que l’objectif de limiter à 1,5° le réchauffement climatique est toujours atteignable (Reach) mais il faudra pour cela en faire plus (further actions needed).

Traduit en langage “normal” : les décisions annoncées après la COP 26 ne permettent pas d’atteindre cet objectif.

Ces organismes internationaux pourraient avoir un impact majeur s’ils avaient le courage de prendre des décisions fortes et contraignantes. La réalité est, hélas, tout autre.

Peut-on faire confiance aux organismes internationaux et aux responsables politiques des grands pays du monde pour agir en profondeur, et très vite ?

La réponse actuelle est claire : non !

XDon't look up posterSorti sur Netflix en décembre 2021, nominé aux Oscars, le film “Don’t look up” est une remarquable illustration de cette capacité des politiques à regarder “ailleurs”, à chercher en permanence des excuses pour ne pas agir.

Pris individuellement, les états sont encore plus désarmés que les organismes internationaux pour prendre des décisions qui auront des impacts globaux sur le climat. Les états ont heureusement des capacités pour agir localement, qu’il ne faut pas négliger.

J’en prendrai un seul exemple, celui de la Norvège. La Norvège a pris dès 2016 la décision d’interdire la vente de véhicules thermiques à partir de 2025. Les Norvégiens ont vite compris qu’acheter un véhicule thermique était un très mauvais investissement et qu’ils ne pourraient pas le revendre. Comme le démontre ce graphique, les impacts ont été immédiats : les ventes de véhicules thermiques seront proches de zéro… dès 2022 !

C’est un bon exemple de l’impact de décisions sur l’anticipation des acteurs économiques. L’objectif fixé à 2025 sera atteint avec trois ans d’avance, en 2022.

XVentes voitures thermiques Norvège

XPlan Economie Française Shift projectEn France, le Shift Project vient de publier son “plan de transformation de l’économie française”. Je ne peux pas le commenter ; l’ouvrage était indisponible quand j’ai écrit ce texte. Je suis par contre inquiet quand je lis dans la préface, écrite par Jean-Marc Jancovici, les mots suivants : “Nous devons être capables de naviguer dans un monde sans nouveautés techniques décisives”. C’est une démarche inverse que je pousse dans ce texte.

 

Les entreprises

Il faut séparer les entreprises, acteurs de l’offre d’énergie carbonée et toutes les autres qui consomment de l’énergie, carbonée ou pas.

Entreprises, acteurs de l’offre d’énergie carbonée.

Peut-on leur faire confiance pour mettre fin à leurs activités sans pressions extérieures fortes ? La réponse est évidente : non.

XThe new climate war coverUn livre remarquable, “The New Climate War”, écrit par Michael Mann, démonte les démarches machiavéliques utilisées par les entreprises pour se défausser de leurs responsabilités sur… les particuliers.

Ces démarches sont très anciennes et touchent beaucoup d’industries. Les producteurs de tabac, de pesticides, d’amiante, de peinture au plomb ont été des précurseurs dans ce domaine.

Un autre exemple, moins connu, est révélateur de ces démarches de l’offre qui culpabilise l’usage. Il est possible d’ajouter à une cigarette des produits qui font qu’elle s'éteint toute seule si on la pose sur une table. Ceci permettrait d’éviter les morts par incendie qui se produisent trop souvent, mais représenterait un coût additionnel pour les producteurs. La réponse des fabricants de tabac a été simple : il faut empêcher les draps de s’enflammer quand un mégot allumé tombe dessus. Des milliards ont été dépensés pour ajouter des produits toxiques aux tissus domestiques et les rendre ininflammables quand il aurait suffi de prendre le problème à la source.

Dans son livre, Michael Mann estime qu’une centaine de très grandes entreprises mondiales sont responsables de 70% des émissions de gaz à effet de serre.

Je reviendrai sur ce sujet majeur quand j’aborderai le rôle des organismes financiers.

 

Les entreprises, consommatrices d’énergie

XSecteurs clefs émetteurs Greenhouse gas - Bill Gates copieToutes les entreprises consomment de l’énergie pour fonctionner, certaines plus que d’autres. Dans son analyse des secteurs les plus consommateurs d’énergie, Bill Gates place en tête l’industrie et en particulier les secteurs de l’acier et du ciment. L’industrie produit 31% des 51 milliards de tonnes de CO2 émises en un an, 15,81 milliards de tonnes.

Numérique et technologies sont des forces puissantes pour améliorer tous ces processus de fabrication et leur permettre de réduire leur consommation d’énergie à production constante.

 

Les particuliers

Est-ce que nous pouvons, individuellement, réduire notre consommation d’énergie et nos impacts négatifs sur le climat ? La réponse est oui.

Il faut par contre être attentif aux pièges posés par les entreprises productrices d’énergie carbonée, qui essaient par tous les moyens de nous culpabiliser, comme je l’ai expliqué plus haut.

XAdS DPC Waste reduce reuse S 277729989Les exemples sont innombrables :

● Il faut trier les déchets : et si l’industrie ne produisait pas de produits jetables?

● Il faut se déplacer moins : et si l’on produisait plus de voitures électriques?

● Nous sommes tous coupables, individuellement : merveilleuse méthode pour dédouaner les producteurs.

Vous êtes un mauvais citoyen pour la planète si vous n’êtes pas végan, si vous voyagez, si vous regardez Netflix… Faire reposer l’essentiel des efforts sur les actions individuelles est l’une des illusions les plus dangereuses de ce combat pour la planète.

 

3 - Acteur clef : les organismes financiers

Je partage l’opinion de Michael Mann sur ce sujet essentiel : agir sur la finance est probablement la méthode la plus rapide et la plus efficace pour réduire l’usage d’énergies carbonées.

Tarir les flux financiers qui financent les projets liés aux énergies carbonées, c’est les rendre impossibles.

XLargest banks invest in fossil fuelsLa situation actuelle est catastrophique : comme le démontre cet article, les investissements dans les énergies fossiles par les banques restent très élevés. Depuis les accords de Paris en 2016, les 60 plus grandes banques mondiales ont financé 3,8 T$ de nouveaux projets dans les énergies fossiles. (1 Trillion US = mille milliards européens).

3 800 milliards de dollars ! Si ces sommes n’avaient pas été disponibles, il est évident que ces projets financés n’auraient pas été lancés.

Ce document très complet de 80 pages, ”Banking on Climate Chaos”, fait le point sur les financements bancaires, analysés par grandes familles de projets et par banque.

Dans ce classement de la honte, le “champion” français est dixième. Il s'agit de BNP Paribas; sur la période 2016-2020, les sommes investies, de 121 milliards de dollars, sont… en croissance !

Sur ce schéma, j’ai visualisé les principales pistes qui permettraient d’agir pour tarir ces financements des énergies fossiles.

XActeurs sur climat -Finance

XAdS DPC Risks > Reward  SS 170136001

Organisations financières : il faut  les convaincre qu’investir dans les énergies carbonées, c’est un placement à très haut risque et dont la rentabilité ne sera jamais au rendez-vous. Financer un pipeline pétrolier, l’exploitation d’un gisement de gaz fossile ou la construction d’une nouvelle raffinerie, ce sont des projets dont la durée de vie s’étale sur des dizaines d’années. C’est un message que tous les investisseurs comprennent très bien.

Organisations internationales : elles ont réussi dans certains domaines à imposer des règles très fortes, comme dans le cas des gaz CFC qui détruisent la couche d’ozone. Faire peser la menace d’une interdiction des financements d’énergies fossiles à partir de 2025 ou 2030 suffirait à bloquer, immédiatement, tous ces financements. C’est ce qui c’est produit avec les véhicules thermiques en Norvège.

Pays : il suffirait qu’un petit nombre de pays importants, en Europe par exemple, interdisent aux organismes financiers présents sur leur territoire tout nouveau financement de projets liés aux énergies carbonées. Tous les organismes financiers présents dans le pays seraient concernés, quelle que soit leur nationalité d’origine. Je pronostique un effet domino rapide. La peur que ces décisions soient contagieuses et se répandent dans d’autres pays aura un effet majeur sur les dirigeants financiers qui ont horreur des risques politiques.

XOil industry terrified of college kidsParticuliers : l’un des mouvements les plus efficaces est celui des étudiants américains qui ont réussi, difficilement, à obliger de grandes universités à ne plus investir dans les énergies fossiles. Ils obtiennent de plus en plus un engagement de désinvestir. Comme l’explique très bien cet article, l'industrie pétrolière américaine est paniquée par ces actions qui donnent des résultats dans les plus grandes universités comme Harvard ou Yale. Harvard gère un portefeuille d’investissements de 53 milliards de dollars ! Les lobbyistes de l’industrie pétrolière financent des projets de loi qui tentent de rendre illégales ces actions.

XDivestissement fossil fuel 41 T$ in 2021Ce document très complet, de 39 pages, fait le point sur les désinvestissements réalisés ou annoncés à la fin de l’année 2021.

J’en ai extrait ce graphique qui montre que les fonds qui ont pris la décision de désinvestir dans les énergies fossiles gèrent un total de 41 T$ !

Les quelques chiffres que j’ai présentés montrent à quel point la dimension financière est essentielle dans la lutte contre les énergies fossiles.

Bloquer les financements d’énergies fossiles, c’est :

● Possible.

● Rapide.

● Très efficace.

● Obtenir des résultats immédiats.

 

4 - Un acteur clef : numérique et technologies

C’est le thème prioritaire de ce billet : quels peuvent être les impacts positifs du numérique et plus généralement de l’innovation technologique sur les émissions de gaz à effet de serre?

Il est de plus en plus difficile de dissocier numérique et innovation technologique : le numérique est le moteur principal de toute innovation technologique, quel qu’en soit le secteur.

XModerna 42 jours Re-InventJe prendrai un exemple récent dans le domaine de la santé, que j’ai déjà cité dans mon blog. Le vaccin contre la COVID-19 de Moderna a été mis au point en 42 jours en utilisant toute la puissance du Cloud AWS. Le CEO de Moderna estime qu’il lui aurait fallu 20 mois (novembre 2021) si les solutions Cloud Public n’avaient pas existé. Combien de millions de vies ont été sauvées par le Cloud Public ?

Ce schéma servira de base à la suite de ce billet.

XActeurs sur climat - Numérique

Il met en évidence les différents impacts possibles du numérique sur les entreprises, les particuliers, l’offre d’énergie et la demande d’énergie. Je ferai référence aux numéros de ce schéma pour aborder ces sept interactions.

Je n’aborde pas les impacts potentiels du numérique sur les organisations internationales, les pays ou les organismes financiers ; pour moi, ils sont mineurs.

 

Frugalité Numérique : flux 1, 2, 3 et 4

XFrugalité Numérique processeurLa frugalité numérique, que d’autres préfèrent appeler sobriété numérique, a pour objectif de réduire au maximum les impacts des usages numériques sur le réchauffement climatique, et en priorité la consommation d’énergie.

En 2020, j’ai publié sur ce blog quatre textes sur la frugalité numérique :

Présentation générale.

Les centres de calcul

Les objets d’accès

Les réseaux

Chacun de ses textes représente un gros travail de recherche de données fiables. Dans le domaine de la frugalité numérique, un grand nombre de données publiées sont fausses et peuvent amener les particuliers et les entreprises à prendre des décisions contre-productives.

Je fais le choix de présenter ici un tout petit nombre d’exemples concrets de solutions numériques qui peuvent améliorer notre sobriété numérique immédiatement. Il serait aussi possible de parler des usages qui sont nocifs pour la planète.

Ma position générale est très claire : utilisés avec un minimum d’intelligence et de pragmatisme, les outils numériques sont d’excellents moyens de réduire nos consommations d’énergie et nos impacts négatifs sur la planète.

Je suis un farouche opposant du “Numérique Bashing” et j’ai les données pour argumenter ma position.

Les quatre textes référencés contiennent des informations plus détaillées sur tous ces sujets. J’ai fait le choix de ne présenter que les impacts positifs du numérique et de la technologie.

 

Flux 1 et 4 : numérique et entreprises

XOld Desktop Mac● Les ordinateurs portables consomment beaucoup moins d’énergie que les anciens PC fixes à écrans cathodiques.

● Fermer ses centres de calculs privés et basculer sur des clouds publics réduit d’un ordre de grandeur sa consommation d'énergie électrique.

XEmail vs Cloud Collaboration● Travailler en mode collaboratif pour créer à plusieurs un document ou une présentation réduit dans un rapport 20+ les échanges de données par rapport aux démarches archaïques qui consistaient à s’envoyer des documents par mail en pièces jointes, ce que résume remarquablement bien ce schéma. Il montre les échanges entre 4 personnes essayant de créer un document en commun, à gauche avec Word de Microsoft, à droite en mode collaboratif avec Google Workspace.

● Dématérialiser ses échanges numériques avec les clients, les partenaires et les fournisseurs transmet des bits qui consomment beaucoup moins d’énergie que des documents papier.

 

Flux 2 et 3 : numérique et particuliers

● Le smartphone est le meilleur ami de la planète. Un smartphone remplace des dizaines d’objets qui consommaient beaucoup d’énergie et de matières premières : caméscope, appareil photo, réveil, lecteur de CD/DVD, montre…

● Les usages d’un smartphone permettent de réduire fortement sa consommation de documents papier : encyclopédie, cartes, guides touristiques, dictionnaires, albums photos, documents de voyages…

● Visionner un film Netflix est beaucoup moins consommateur d’énergie que d’acheter un DVD que l’on ne regardera qu’un tout petit nombre de fois.

 

Flux 4 : Réduire la consommation d’énergie et les émissions des entreprises

Je m’intéresse ici aux activités “métiers” des entreprises industrielles qui produisent de l’acier, du béton, de l’aluminium ou des machines. Le texte de Bill Gates que j’ai cité plus haut montre que l’industrie est le plus grand émetteur de gaz à effet de serre. Toute action dans ces métiers est prioritaire et aura des impacts majeurs.

XHybrit Fossil Free SteelCet article explique comment les fournisseurs d’acier s’attaquent au problème.

Le premier exemple cité : en août 2021, une aciérie de la société Hybrit en Suède a produit de l’acier sans utiliser du charbon, remplacé par de l’hydrogène. La production industrielle est prévue pour 2026.

Autre exemple récent en Europe : ArcelorMittal lance un grand programme de décarbonisation de ses activités avec un investissement de 1,7 milliard d’euros, soutenu par le gouvernement français. Objectif annoncé : réduire de 40% les émissions de CO2 sur le territoire français d’ici à 2030.

XArcelorMittal 1 7B€ investment

L’industrie du ciment produit 8% des émissions de CO2 dans le monde. C’est aussi l’une des industries les plus difficiles à décarboner.

Ce long article fait le point sur des dizaines de projets et réalisations en Europe pour s’attaquer au problème. Des réductions de 30% à 60% des émissions de CO2 sont envisagées.

Toutes ces industries travaillent aussi sur des démarches de capture des gaz émis, technologies regroupées sous le sigle CCUS : Carbon Capture Utilisation and Storage.

XCCUSCCUS regroupe deux réponses différentes :

● Utilisation : transformer le CO2 capturé en d’autres produits utiles.

● Stockage : injecter le CO2 dans le sol.

Ce site de l’IEA, International Energy, fait le point sur les très nombreuses démarches CCUS proposées.

Le Global CCS Institute est une autre source intéressante sur ce sujet. Ce document présente sur des centaines de réalisations ou projets dans le monde.

Les exemples que j’ai cités pourraient produire de premiers résultats significatifs dans la deuxième moitié de cette décennie, à partir de 2025 ou 2026.

Beaucoup de ces projets, de ces innovations technologiques, des solutions numériques proposées seront des échecs industriels, oui. Mon hypothèse de travail est que d’autres seront des succès, capables de se déployer à grande échelle dans les entreprises industrielles émettrices de grandes quantités de gaz à effet de serre.

Si l’on ferme le robinet d’investissements dans les énergies fossiles pour les organismes financiers, ils seront obligés de trouver d’autres terrains d’investissements.

Ils auront l’embarras du choix avec toutes ces entreprises innovantes qui développent des solutions à impacts positifs sur la planète.

Verdox, spin-off du MIT, qui a mis au point un dispositif de capture du CO2 plus efficace, vient de lever 80 M$, dont une partie vient de Bill Gates, investisseur très actif dans ces combats pour la planète.

 

Flux 6 : Numérique et demande d’énergie

C’est à mon avis le domaine où le numérique aura le moins d’impacts directs.

Comme on l’a vu plus haut, la demande d’énergie est en priorité liée aux demandes des particuliers et des entreprises.

XNormes ISO 50001 & 14000Une démarche pragmatique consiste à développer des indicateurs simples (KPI) pour aider les particuliers et les décideurs dans les entreprises à mesurer et suivre les impacts de leurs usages.

De premières normes, telles qu’ISO 50001 et ISO 14000, peuvent servir de base à ces mesures.

XSweep DashboardsPour les entreprises, de premières offres SaaS performantes, comme celle de la startup française SWEEP, permettent de piloter efficacement ses impacts carbone.

Ce sera plus difficile pour les particuliers : leurs consommations d’énergie sont réparties sur de nombreux lieux tels que domicile ou moyens de transport.

J’espère que des solutions simples permettront bientôt aux particuliers d’avoir un tableau de bord raisonnablement fiable et complet de toutes leurs consommations d’énergie.

 

Flux 5 et 7 : numérique et offre d’énergie

C’est dans ce domaine que je mets le plus d’espoir pour que des solutions de rupture permettent de disposer de suffisamment d’énergies non carbonées performantes avant 2030.

La croissance exponentielle des performances des solutions numériques, que j’ai présentée dans la troisième partie de cette série, s’appliquera aussi aux innovations dans le domaine de la production d’énergie.

J’ai choisi de ne parler que de trois domaines de progrès, parmi tous ceux qui sont possibles. Ce sont ceux qui ont, à mon avis, la meilleure probabilité d’apporter rapidement des réponses concrètes :

● Panneaux solaires.

● Stockage d’énergie électrique.

● Énergie nucléaire.

J’aurais pu aussi parler des éoliennes et de l’informatique quantique : cet article du JdN, “L’informatique quantique va-t-elle sauver la planète” présente les efforts de Microsoft dans ce domaine.

 

Panneaux solaires

L’énergie du soleil est la plus prévisible et la plus répandue sur la terre. Une étude du MIT donne les chiffres suivants :

● Énergie solaire arrivant sur terre en permanence : 173 000 térawatts.

● Ceci correspond à 10 000 fois l’énergie totale consommée sur terre.

● Avec des panneaux solaires ayant une efficacité de 20% et utilisés ⅓ du temps, cette énergie solaire couvre 300 fois les besoins de l’humanité.

Ce premier graphique montre le caractère exponentiel de la baisse du coût de l’énergie produite par des panneaux solaires : réduction dans un rapport 5 en 10 ans.

XSolar costs 2010 vs 2020

Ce deuxième graphique est encourageant : il montre que les experts ont sous-estimé la vitesse de cette réduction du coût. Ceux qui pensent que cette baisse va s’arrêter pourraient, à leur tour, être contredits par les faits.

XSolar costs reduction vs predictions

Ce troisième graphique (source Wikipédia) compare les coûts de l’énergie des différentes sources, en utilisant une mesure le “Levelized cost of energy”, qui calcule le prix de revient complet de production, selon des règles précises.

XLevelized cost of energy by source

En 2020, le solaire est devenu l’énergie la moins chère du monde, et personne ne va s’en plaindre.

 

Stockage d’énergie électrique

L’énergie électrique a beaucoup d’avantages, mais un grand problème, aujourd’hui; à l’inverse d’autres énergies comme le pétrole, le gaz ou le charbon elle est difficile à stocker.

Si l’on couple cette caractéristique avec le fait que les principales énergies renouvelables, solaires et éoliennes sont par nature intermittentes, on se trouve face au grand défi actuel de ces énergies renouvelables : comment stocker l’énergie électrique quand elle est abondante pour la restituer quand la production se réduit ?

Quel est le meilleur moteur de l’innovation ? Un problème difficile à résoudre !

Ceci explique pourquoi l’offre de solutions de stockage d’énergie est en forte croissance, avec des démarches très différentes, comme celles référencées dans cet article.

J’en ai sélectionné quatre, très différentes :

● L’énergie cinétique.

● La gravitation.

● L’hydrogène.

● Les batteries

L’énergie cinétique.

Cette technologie existe depuis très longtemps : les tours des potiers l’utilisaient dans l’antiquité. Elle consiste à transformer l’énergie électrique excédentaire en énergie cinétique stockée dans un volant d’inertie en mouvement.

XAmber Kinetics FlywheelsDes startups ont repris l’idée en améliorant les performances et les rendements qui peuvent atteindre 90%. Principaux avantages : durée de vie très longue et performances constantes dans le temps.

Amberkinetics (image jointe) et Revterra sont deux sociétés qui proposent des solutions opérationnelles à coupler avec des énergies renouvelables intermittentes.

La gravitation ou pesanteur

XEnergyVault gravity storageCette autre solution mécanique utilise l’énergie liée à la gravitation. EnergyVault, une des startup dans ce domaine, utilise des blocs de 35 tonnes qui sont soulevés par des grues automatiques quand l’énergie est disponible, énergie récupérée quand on les laisse redescendre vers le sol.

L’hydrogène

L’Europe et la France mettent beaucoup d’espoir sur cette technologie pour stocker dans de l’hydrogène à haute pression de l’énergie. C’est bien expliqué dans ce document de Teréga qui dispose dans le Sud Ouest de la France des plus grandes capacités de stockage de gaz en France dans des réservoirs naturels souterrains.

XCB Insights Europe lead in HydrogenCB insights est une source d’information d’une exceptionnelle richesse et qualité sur de nombreux domaines. Ils ont publié en février 2022 ce rapport de 150 pages qui fait le point sur les investissements dans le secteur de l’énergie en 2021. J’en ai extrait ce graphique qui montre que l’Europe investit plus sur l’hydrogène que les États-Unis ou l’Asie. C’est le seul domaine dans lequel l’Europe est en tête !

Autre bonne nouvelle : le congrès annuel des ingénieurs de France, en mars 2022, sera consacré à l’hydrogène.

 

Les batteries

C’est la technologie qui vient immédiatement à l’esprit quand on pense stockage d’énergie, et c’est de loin la plus utilisée aujourd’hui. Je ne vais pas analyser le marché des véhicules électriques, mais me concentrer sur les usages industriels des batteries pour stocker l’énergie sur de longues périodes.

La baisse du coût du kilowatt des batteries les plus répandues, Lithium-Ion, est, elle aussi, exponentielle, comme le montre ce graphique.

XPrice batteries Lithium Ion over time

XTesla Battery park AustraliaTesla est un acteur majeur de ce marché. L’une des plus grandes installations a été construite en Australie, avec une capacité de 1 274 MWh. Elle est opérationnelle depuis décembre 2021.

Des dizaines d’entreprises travaillent sur des alternatives à la filière Lithium-Ion, et il est difficile de les citer toutes. Sodium-ion, Zinc-ion et Dual Carbon sont trois des pistes les plus prometteuses.

J’ai construit ce tableau comparatif de ces trois solutions à partir d’un article très complet, publié en février 2022.

XBatteries comparaison

Une quatrième technologie, Metal-ion, attire aussi les investisseurs : Bill Gates et ArcelorMittal ont investi 360 M$ dans Form Energy, qui utilise l’acier, ce qui explique la présence d’ArcelorMittal au capital.

XCB Insights Global Energy FundingCette très longue liste de solutions de stockage d’énergie montre à quel point l’innovation est forte dans ce domaine clef. Ce graphique, extrait du même document CB Insight, montre que les investissements dans les startups de l’énergie ont atteint 36 milliards de dollars en 2021, en croissance de 260% par rapport à 2020 !

Il faudrait vraiment être un irréductible pessimiste pour penser que toutes ces innovations seront des échecs.

 

Énergie nucléaire

Le nucléaire est une énergie qui déclenche des passions, pas toujours rationnelles.

Mon objectif, ici, est d’en parler de la manière la plus rationnelle possible. Les spécialistes du nucléaire me pardonneront les simplifications que je suis amené à faire.

XMortality rate:EnergyLes faits :

● Le nucléaire est une énergie non carbonée.

● Le nucléaire est la source d’énergie la plus sûre au monde : charbon, gaz, pétrole ont tué beaucoup plus de personnes que le nucléaire.

Il y a deux grandes familles de solutions pour produire de l’énergie nucléaire :

● Fission = casser de gros noyaux pour en faire de moins gros.

● Fusion = assembler des petits noyaux pour en faire des plus gros.

Cet article l’explique en quelques lignes. Pour en savoir plus, je vous renvoie aux textes de Wikipedia sur la fission et la fusion.

Aujourd’hui, l’électricité est produite dans le monde par des réacteurs de fission nucléaire, et de grande taille.

D’ici à 2030, je vois venir des mutations majeures dans les solutions permettant de produire de l’énergie électrique nucléaire.

Familles de centrales nucléaires 1J’ai construit ce tableau pour présenter les quatre familles principales de solutions qui pourraient être opérationnelles en 2030.

D’ici à 2030, trois nouvelles familles de réacteurs nucléaires pourraient voir le jour:

● Fission : réacteurs de petite taille.

● Fusion : réacteurs de grande taille.

● Fusion : réacteurs de petite taille.

 

Petits réacteurs industriels de fission

À Belfort, dans son discours de février 2022 sur l’avenir du nucléaire en France, le Président Emmanuel Macron a parlé d’EPR, mais aussi annoncé le lancement de la fabrication de “SMR”, Small Modular Reactors.

Dans ce domaine des petits réacteurs, la France est en retard : Russes, Chinois et Américains ont lancé des projets et des réalisations depuis plusieurs années.

XPetite centrale nucléaire Rolls RoyceL’un des projets européens à haut potentiel est celui proposé par Rolls-Royce, qui s’appuie sur son expérience dans les sous-marins à propulsion nucléaire. Rolls-Royce propose de construire une usine qui fabriquera, de manière industrielle, ces petits réacteurs nucléaires. Ils seront ensuite transportés sur les sites où ils seront installés, dans le monde entier.

Cette approche me fait penser à la démarche industrielle d’Elon Musk avec SpaceX qui a révolutionné le monde des lanceurs.

 

Fusion : réacteurs de grande taille

Le projet emblématique de réacteur nucléaire de grande taille pour la fusion est le réacteur Tokamak ITER.

XITER Agreement MeetingLes chiffres relatifs à ITER sont impressionnants, et confirment le gigantisme de ce projet :

● Lancé officiellement en 1985, quand Jacques Chirac était président de la République en France.

● Membres : Communauté Européenne, Russie, Chine, États-Unis, Inde, Japon, Corée…

● 20 ans après : accord sur lieu de construction, près d’Aix-en-Provence en France.

● Surface du site : 180 hectares, dont 42 pour le réacteur.

● Poids du réacteur : 23 000 tonnes.

● Production d’énergie prévue : 500 MW, 10 fois les 50 MW nécessaires pour le faire fonctionner.

● La première production de plasma était prévue fin 2025, 40 ans après le lancement du projet. Les dernières estimations, fin 2021, parlent maintenant de 2035.

● Le budget initial, de 6 milliards d’euros, est aujourd’hui de 18 à 22 milliards d’euros. Les opposants parlent d’un budget de 45 à 65 milliards d’euros.

● ITER, expérimental, ne sera jamais connecté au réseau. Il faudra attendre le successeur, DEMO, pour avoir une version industrielle en 2050.

● L’industrialisation éventuelle n’est pas prévue avant 2070.

XITER construction Octobre 2021

Les critiques d’ITER se font de plus en plus nombreuses :

● En juillet 2021, l’ASN, Autorité de Sureté Nucléaire, a publié un rapport montrant que des composants importants n’avaient pas passé les tests nécessaires.

● La revue Energy Times tire le signal d’alarme en octobre 2021.

Vous l’avez compris : je ne suis pas convaincu qu’ITER sera l’un des sauveurs de la planète.

 

Fusion : réacteurs de petite taille

De toutes les options présentées, je pronostique que ce sont ces réacteurs de fusion de petite taille qui seront la réponse la plus performante aux besoins du monde en énergies non carbonées et non intermittentes.

Les progrès spectaculaires de ces dernières années dans la fusion nucléaire sont attribués au numérique, comme le confirme Chris Hansen, chercheur à l’Université de Washington dans cet article : “Our ability to model and move forward on some of these scientific and technological developments because of increased computing power has really been a difference maker.” (Notre capacité à modéliser et à faire avancer certains de ces développements scientifiques et technologiques grâce à une puissance de calcul accrue a vraiment fait la différence.)

Un rapport très complet, publié par la Fusion Industry Association au Royaume-Uni, fait le point sur l’extraordinaire dynamique de ce secteur. J’en ai extrait quelques graphiques.

23 startups privées ont été créées entre 1992 et 2020. La moitié sont nées entre 2016 et 2020. Ce rapport contient aussi des fiches détaillées sur chacune de ces 23 sociétés.

XNumber of private fusion companies

XWorld Map fusion startupCette carte montre que la majorité de ces startups de la fusion sont aux États-Unis, mais l’Europe avec six sociétés reste dans la course. La société française est Renaissance Fusion, basée à Grenoble.

Les financements sont au rendez-vous, mais à l’échelle des startups :

XFunding for fusion companies● Le total est proche de 2 milliards de dollars, à comparer aux 20 milliards déjà dépensés pour ITER.

● 95% de ces financements sont privés, les États n’apportant que 5%.

● Pour les startups financées, la moyenne des fonds levés est de 100 M$.

● TAE Technologies, en Californie, est la plus financée, avec 880 M$.

XDifferent technical fusion solutions by startupsCe qui m’a le plus frappé dans ce rapport, c’est la grande variété des technologies utilisées par ces startups, comme on le voit dans ce tableau. (Ne me demandez pas de vous expliquer les différences entre ces approches.)

La question à laquelle il est le plus difficile de répondre est : “quand ces petits réacteurs seront-ils opérationnels et connectés au réseau de distribution électrique ?

XWhen Will fusion be connected to the gridCe graphique regroupe les prévisions de ces startups. La majorité des réponses indiquent les années 2030.

Familles de centrales nucléaires 2050Pour terminer ce long chapitre sur l’énergie nucléaire, je vous livre mon pronostic sur la situation telle que je la vois en 2050. (Rappel, je ne suis pas un spécialiste du nucléaire).

 

Les grandes centrales de fission pourraient faire jeu égal avec les petites centrales de fusion, chacune fournissant environ 40% de l’énergie électrique venant du nucléaire.

 

Synthèse

XClimat - Réalité - Acteurs - Offre et demande + Numérique + org InternAu début du premier de ce billet consacré aux défis climatiques, j’avais construit un tableau évaluant quels pourraient être les impacts potentiels des six familles d’acteurs identifiés.

Dans ce nouveau tableau, j’ai ajouté deux colonnes qui présentent la réalité de ces impacts, tels que je les pronostique.

Je fais le pari suivant : numérique et technologies seront les moyens les plus puissants, les plus efficaces pour lutter contre ce réchauffement climatique.
Les cinq autres familles d’acteurs auront aussi des rôles importants à jouer sur l’offre et la demande ; je les mets à égalité, avec trois étoiles chacune.

Pour vous aider à établir de manière plus précise votre propre évaluation des rôles potentiels de ces six acteurs, j’ai aussi construit ce nouveau tableau chiffré :

Climat - Acteurs - Offre et demande + Numérique + Org Intern. - Mon pronostic

● Les deux premières colonnes proposent une fourchette large des rôles possibles, sur l’offre et la demande, des six acteurs.

● Les deux autres colonnes sont utilisées pour que chacun fasse son pronostic. Je l’ai rempli avec les miens pour que vous en ayez un exemple.

● Le total dans chaque colonne doit être égal à 100%.

Nous aurons probablement des visions différentes, et c’est normal.

L’important, c’est que chacun comprenne qu’il y a de nombreux moyens d’action pour attaquer ce défi majeur du réchauffement climatique.

Oui, je souhaite rester optimiste et anticiper un monde qui aura su, en 2030, maîtriser les quatre défis que j’ai identifiés.

Serons-nous capables, au niveau mondial, de nous mobiliser, immédiatement, sans laisser des personnes, des entreprises, des États et des organisations internationales bloquer les décisions urgentes qu’il convient de prendre ?

Je laisse à chaque lecteur le soin de répondre à cette question.


Incendie Global Switch : réflexions sur la résilience des Clouds Publics

 

XData Center Global Switch ClichyL’un des centres de calcul d’un grand hébergeur mondial, Global Switch, situé à Clichy en région parisienne, a été victime d’un incendie dans la semaine du 24 avril 2023. 

Ces incendies sont rares, mais ils se produisent de temps en temps et aucune entreprise n’est à l’abri d’un tel accident dans un centre de calcul, qu’il soit:

  • Géré directement par l’entreprise, “On Premise”.
  • Chez un hébergeur.
  • Sous la responsabilité d’un acteur du Cloud Public.

Cet incendie a immédiatement déclenché une polémique sur la qualité des services proposés par les géants du cloud public américain. Pourquoi? Le Cloud Public GCP de Google a été touché et des services proposés par une “Zone France Paris” ont été indisponibles pendant plusieurs heures.

Mon ami Alain Garnier, PDG de Jamespot, a immédiatement publié sur LinkedIn une vidéo pour commenter cet incident. Il m’a personnellement cité en me reprochant gentiment d'être un “suppôt” des géants du Cloud Public. 

Suppôt, non, mais grand fan, oui. Sur ce point, il a tout à fait raison et je ne m’en suis jamais caché, depuis plus de 15 ans.

Cette mise en cause et cet accident m’ont donné l’envie et l’occasion d’apporter des éclaircissements sur les différentes implantations géographiques des géants du Cloud Public.

C’est un sujet qui est rarement abordé et amène trop d’entreprises à faire des erreurs qu’elles pourraient éviter quand elles travaillent avec les grands acteurs du Cloud Public.

Ce que j'explique dans ce texte est valable pour tous les grands acteurs du Cloud Public, AWS d’Amazon, Azure de Microsoft et GCP de Google. 

 

L’incendie: les faits

XDeux sites touchés par incendieDans la nuit du 25 au 26 avril 2023, un incendie a éclaté dans un des centres de calcul de l’hébergeur Global Switch, situé à Clichy, en région parisienne. Cet incendie a entraîné l’arrêt de ce centre de calcul.

De nombreuses organisations qui hébergeaient leurs services numériques dans ce centre de calcul ont annoncé que ces services étaient indisponibles. Parmi les organisations importantes touchées, on peut citer le service Cybermalvaillance du gouvernement français et la ville de Lille.

C'est à chacune de ces entreprises qu’il incombe la responsabilité d’avoir préparé leur PRA, Plan de Reprise d’Activité. J’espère que c’était le cas pour la majorité d’entre elles.

Mais c’est bien évidemment le “client” Google-GCP de ce centre de calcul qui a retenu l’attention et fait couler le plus d’encre, ce qui est logique.

Un géant du Cloud Public, un “Hyperscaler” qui subit une panne, c’est suffisamment rare pour que la planète numérique française s’en émeuve.

XGoogle Cloud sous l'eau

J’ai un “scoop” pour les personnes qui sont ravies de pouvoir critiquer le supposé manque de résilience des géants du Cloud Public: des pannes, ils en ont en permanence, et j’y reviens longuement dans le prochain paragraphe.

Depuis des années, Google met à la disposition de ses clients un tableau de bord de l’état de fonctionnement de tous ses services, dans chaque région géographique. 

Il est mis à jour en temps réel. Voilà un instantané d’une partie de ce tableau, le 26 avril 2023: il indique clairement que tous les services dans la “Zone Europe-West9, Paris” sont indisponibles.

XPanne GCP France 26:4:2023

Cette zone de GCP est répartie chez quatre hébergeurs différents, comme le rappelle Google dans un communiqué: 

Google Cloud se reposant sur trois autres datacenters de la région parisienne (Interxion, Data4 et Telehouse), la firme a proposé à ses clients de « basculer » temporairement et d’éviter la zone affectée (europe-west9).”

La redondance, le PRA natif font partie des services standards de GCP.
Aucun client n’a perdu de données comme le rappelait Emmanuelle Olivié-Paul, utilisatrice de GCP dans cette zone, dans sa réponse au billet LinkedIn d’Alain Garnier que je cite au début de ce billet.

XPanne GCP France 29:4:2023

Ce deuxième instantané du tableau de disponibilité des services de GCP, pris le 29 avril 2023, montre que la situation est normalisée.

 

Les Clouds Publics, des pannes en permanence

Qui peut croire, ou tenter de faire croire que les infrastructures géantes des fournisseurs de Clouds Publics ne tombent jamais en panne?

Je n’ai jamais, je ne tiendrai jamais un tel discours, ce serait ridicule.

XCloud Downtime 2018 - AWS  GCP  AzureDans un billet de blog publié en 2019, il y a quatre ans, sur le thème “Clouds Publics, la confiance”, j’abordais une fois encore ce sujet. J’avais inséré ce graphique qui mettait en évidence les temps de panne de GCP, AWS et Azure pour l’année 2018.

Toute personne qui essaie de me faire dire le contraire, ou est de mauvaise foi, ou n’a jamais lu mes écrits.

Une étude très récente, publiée en mars 2023 par Parametrix, société spécialisée dans l’assurance des risques numériques, fait le point sur toutes les pannes qui se sont produites en 2022 chez AWS, GCP et Azure.

XParametrix report title Cloud Downtime 2023

J’ai extrait de ce rapport cette phrase qui résume bien la situation:

“In 2022, Parametrix identified a total of 1190 performance disruptions across this cloud landscape. Some 41.4% of these events, 492 in total, were classified by Parametrix as critical.” (C’est moi qui ai mis en gras quelques mots.)

Oui, vous avez bien lu, près de 1200 incidents en une année, plus de 3 par jour! Ils sont nuls, ces géants du Cloud Public!

XParametrix Main Cloud Outages causes 2022Ce graphique, présent dans ce rapport, indique les principales causes de ces incidents.

Les incidents matériels sur les infrastructures physiques, comme les incendies, sont de loin les… moins fréquents, à 8,33%, 3,5 fois moins que ceux causés par des erreurs humaines.

Ce que demandent les clients d’AWS, GCP ou Azure, ce n’est pas qu’ils leur garantissent qu’ils n’auront jamais de pannes, ce qui serait une demande idiote.

Ce que demandent ces clients, c’est qu’AWS, GCP ou Azure mettent en œuvre toutes les procédures et méthodes nécessaires pour les mettre à l’abri de ces pannes inévitables.

XClouds Publics protection des clients des pannes

Et cela, AWS, GCP et Azure le font, et le font très bien!

Ce n’est pas pour cela que les entreprises doivent basculer dans les Clouds Publics sans prendre des précautions importantes, au contraire.

L’une des premières décisions à prendre, et elle est essentielle, c’est de bien choisir la ou les zones géographiques dans lesquelles elles vont déployer leurs applications.

C’est ce que j’analyse dans le paragraphe qui suit.

 

Les différentes familles d’implantation des géants du Cloud Public

Les informations que j’utilise sont publiques; toutes les entreprises peuvent y accéder quand elles doivent choisir leurs fournisseurs d’infrastructures Cloud Public.

Je vais illustrer mon analyse par l’exemple de GCP de Google, qui a été mis en cause à la suite de cet incendie.

Comme je l’ai écrit plus haut, j’aurais pu faire la même démonstration pour AWS ou Azure.

Les fournisseurs de Cloud Public proposent trois grandes familles d’implantations:

  • Les centres de calcul dont ils sont propriétaires et qu’ils gèrent eux-mêmes.
  • Des centres de calcul qui appartiennent à des hébergeurs et où ils localisent une partie de leurs services IaaS.
  • Des points de présence: ce sont des petits sites qui ont pour fonction principale de proposer des accès par fibres optiques à des centres de calcul GCP. Ils sont utilisés pour réduire la latence.

Cette liste, disponible sur le site de GCP, identifie en toute transparence ces différentes familles d’implantations.

XFamilles de centres de calcul Google

Centres de calculs appartenant à GCP

Un grand centre de calcul, construit et géré par GCP, représente un investissement supérieur à 500 millions de dollars et peut atteindre 1 ou 2 milliards de dollars.

Cette carte du monde montre l’implantation des centres de calculs qui appartiennent à GCP.

XCarte Mondiale Centre de Calcul Google

Google dispose de centres de calcul en propre dans 36 régions, réparties sur 109 zones. Ils sont en priorité installés aux Etats-Unis et en Europe.

Centres de calculs “Edge”, hébergés

Pour assurer une présence dans le plus grand nombre possible de pays, Google GCP installe une partie de ses services chez des hébergeurs locaux, comme Global Switch en France.

Dans cette configuration, GCP n’est pas maître de la gestion des centres de calcul, qui est déléguée aux hébergeurs.

C’est ce qui permet à GCP d’annoncer une présence dans plus de 200 pays.

Ce sont souvent des installations “politiques”, réalisées pour répondre aux exigences de certains pays ou entreprises qui exigent que leurs données soient stockées sur leur territoire.

“Edge” ne veut pas dire une installation unique: pour des raisons évidentes de résilience, GCP répartit ses installations “Edge” chez des hébergeurs différents. Dans le cas de Paris, ils sont quatre.

On le voit sur cette carte, où sont aussi indiqués les centres de calcul en périphérie, nommés “Edge".

XGoogle Data Center with Edge ones

Il existe un moyen simple de vérifier si une zone géographique GCP est gérée par Google en direct ou hébergée: il suffit de compter le nombre de services disponibles. Ils sont beaucoup plus nombreux dans les zones gérées en direct par Google.

Cette carte met aussi en évidence un autre investissement majeur de Google, dans les fibres optiques sous-marines.

Points de présence

Sur cette autre carte Google, les principaux points de présence sont visualisés.

XGoogle network with 7500 access point

Google annonce qu’il dispose de 7 500 points de présence dans le monde. C’est une bonne nouvelle. Ceci permet à toute entreprise, où qu’elle soit située, de trouver un point de présence proche qui garantit un accès rapide, par fibre optique, à GCP.

Le cas de l’Europe

En analysant les données fournies par Google, j’ai pu construire ce tableau qui fait le point sur la situation actuelle des implantations de GCP en Europe. Ce n’est qu’une photographie à un instant donné, de nouveaux investissements étant réalisés en permanence.

XData Center Google Europe

Au moment où je publie ce texte, GCP est présent dans la majorité des grands pays européens, dans 35 villes:

  • 6 implantations de centres de calcul appartenant à Google. Ils sont tous situés dans des pays de l’Europe du Nord.
  • 29 implantations “Edge”, hébergés. 
  • C’est le cas de la France, où il n’y a pas de centres de calcul appartenant à Google, mais deux “Edge” à Paris et Marseille. 

Dans le paragraphe qui suit, je présente mes recommandations concernant les différentes options qui s’offrent à une entreprise, publique ou privée, quand elle doit choisir les zones géographiques où elle souhaite déployer ses usages numériques dans un Cloud Public.

 

Recommandations

L’immense majorité des entreprises publiques et privées ont le libre choix du pays où elles peuvent utiliser des services de Clouds Publics, et c’est une très bonne chose.

Il y a quelques exceptions, variables selon les pays.

Listes hébergeurs certifiés HDSEn France, la plus connue est celle liée aux données de Santé. Il est obligatoire d’obtenir une certification HDS, Hébergement de Données de Santé, pour proposer des services dans ce domaine. Comme le montre cette liste officielle, publiée par le ministère de la Santé et de la Prévention, plusieurs centaines d’organisations sont certifiées HDS.

AWS, GCP et Azure font partie de cette liste, et cela ne surprendra personne.

Conséquence: Google est obligé d’utiliser les zones hébergées en France pour les données de santé et ne peut pas les porter sur des centres de calcul qu’il gère en direct.

Pour toutes les autres entreprises, le choix est libre, même s’il y a souvent des pressions politiques pour que l’hébergement ait lieu en France.

Si votre entreprise décide ou préfère héberger ses applications et ses données en France, elle a le choix entre des grands acteurs du Cloud Public, tous présents en France, ou des acteurs français eux aussi présents en France.

Si je fais le choix de travailler avec GCP pour tout ou partie de mes usages numériques, j’ai plusieurs options:

  • Je choisis un “Edge” en France: si tous les services dont j’ai besoin sont disponibles dans cette zone, c’est une piste raisonnable.
  • Je choisis une zone gérée directement par Google, par exemple en Belgique ou aux Pays-Bas. Je suis certain d’accéder à tous les services disponibles et à des infrastructures uniquement dédiées à GCP.
  • Je choisis d’utiliser plusieurs zones pour mes usages. C’est une évidence pour les entreprises qui sont présentes à l’international.

Depuis peu, GCP propose aux entreprises un nouveau service: Cloud Region Picker.

Il permet de choisir la zone où elles peuvent exécuter leurs programmes en tenant compte du poids respectif que l’on donne à trois paramètres:

  • L’impact carbone.
  • Le coût.
  • La latence.

Les réponses varient toutes les 5 minutes, en fonction des conditions météos des différentes zones et des taux d’utilisation des ressources.

GCP Region Picker 2 optionsDans cet exemple, réalisé à Paris le 1er mai 2023 à 13h, j’ai regardé deux options. Dans les deux cas j’ai gardé une latence identique, à 50% d’importance:

  • Option du haut: prix,critère essentiel. Impact carbone, critère pas important.
  • Option du bas: prix, critère pas important. Impact carbone, critère essentiel.

Les résultats sont spectaculaires: GCP propose 4 zones pour chaque option, et ce sont au total 8 zones différentes qui sont proposées.

Je trouve cette initiative excellente et elle n’est disponible que chez les géants du Cloud Public, qui ont des installations dans le monde entier et peuvent faire profiter leurs clients de toutes les possibilités d’ensoleillement ou de vent.

C’est une excellente opportunité pour les entreprises de montrer concrètement qu’elles ont envie d’œuvrer pour une véritable frugalité numérique.

Reste une option que je n’ai pas encore abordée, le multi-cloud. Elle est recommandée par Alain Garnier dans la vidéo dont je parle au début.

Que faut-il en penser?

 

Multi Cloud et résilience

AWS Azure GCP logosUne démarche Multi Cloud consiste à utiliser plusieurs fournisseurs différents de services Cloud pour son entreprise.

C’est une idée vieille comme le monde, celle qui consiste à ne pas mettre “tous ses œufs dans un même panier”.

Est-ce une bonne idée d’utiliser une démarche Multi Cloud pour améliorer la résilience de son Système d’Information en cas d’accidents comme l’incendie de Global Switch?

La réponse est claire: non, non et non!

Pourquoi? Imaginez que vous utilisez GCP pour votre application de gestion commerciale et que le site qui l’héberge prend feu. Combien de temps vous faudrait-il pour trouver une version de cette application compatible avec un autre Cloud comme AWS et l’y déployer? Poser la question, c’est y répondre.

Si la réponse Multi Cloud n’est pas la bonne, quelle démarche faut-il privilégier? 

Elle est beaucoup plus simple, et je l’ai présentée dans ce billet: une démarche multi sites chez le même fournisseur de Cloud. Rien de plus simple! La réplication dans une autre zone géographique prendra instantanément le relais, sans aucun délai.

Ceci ne veut absolument pas dire que la démarche Multi Cloud n’a aucun intérêt, au contraire. La majorité des entreprises avec lesquelles je travaille ont choisi deux ou au maximum trois fournisseurs parmi AWS, GCP ou Azure.

Ce n’est jamais pour répondre à des problèmes de résilience.

Quelles sont les raisons qui militent pour le Multi Cloud?

  • Résilience? Non.
  • Services Clouds de base? Non. Tous les fournisseurs proposent des services de base en calcul, stockage, bases de données qui sont très proches les uns des autres.
  • Services avancés différents? Oui. C’est de loin la raison principale. Chaque grand acteur a des domaines spécialisés pour lesquels il propose des services meilleurs que ses concurrents. C’est le cas avec AWS pour l’informatique industrielle et IoT. C’est le cas pour GCP dans le domaine du Big Data et du décisionnel.
  • Faire jouer la concurrence entre les fournisseurs? C’est parfois le cas, mais moins souvent qu’on ne le croit.

 

Résumé

J’ai eu l’opportunité d’acquérir en France une formation d’ingénieur, qui m’a aidé à avoir des raisonnements scientifiques, rationnels et pragmatiques.

AdS DPC Résilience S 101375048Ce texte ne parle que de la meilleure manière de garantir la fiabilité et la résilience de ses infrastructures dans des Clouds Publics, de garantir une continuité de services quand des catastrophes comme un incendie ou une erreur humaine se produisent, incidents qui sont inévitables.

Traiter les sujets importants, un par un, c’est la seule manière rationnelle de progresser que je connaisse.

Rappel: Il y a de nombreux autres sujets “chauds” quand on aborde le thème des Clouds Publics. Ils ne sont pas traités dans ce texte.

J’ai écrit des dizaines de billets sur mon blog qui parlent de toutes les autres facettes du Cloud Public, et ce depuis 15 ans.

 


Le moment iPhone de l’intelligence artificielle - Première partie

XIPhone moment of IA NvidiaJ’ai emprunté le titre de ce billet à Jensen Huang, fondateur et CEO de NVIDIA. Il a utilisé plusieurs fois cette expression lors de sa conférence introductive pendant les journées GTC, GPU Technology Conference, organisées en mars 2023 par NVIDIA.

Cette intervention résume bien le tournant majeur que prend l’Intelligence Artificielle (IA) en ce moment, et j’aurai l’occasion de revenir sur les annonces faites pendant cette conférence.

L’irruption de ChatGPT à la fin de l’année 2022 a été un coup de tonnerre dans le monde de l’IA. Elle a propulsé ce domaine sur le devant de la scène comme jamais auparavant. C’est une excellente nouvelle.

 

L’essentiel sur l’Intelligence Artificielle

En 2017, il y a plus de cinq ans, j’avais écrit deux billets, ici et , pour présenter les potentiels de l’IA. Pour l’essentiel, ils restent d’actualité.

XLogo ChatGPTChatGPT a fait découvrir au monde entier une famille de l’IA que l’on nomme l’IA Générative (IAG).

L’IA Générative est une IA capable de générer, de créer des contenus nouveaux à partir de contenus existants, qui ont été utilisés pour son apprentissage. 

L’IAG permet aujourd’hui de créer des contenus dans de nombreux domaines, tels que les textes, les photos, les vidéos, les modèles 3D, les sons ou les programmes informatiques. Cette liste n’est pas limitative.

Devant la croissance exponentielle de l’offre de solutions IAG et de leur puissance, il est de plus en plus difficile d’anticiper les évolutions de cette industrie. C’est pourtant ce que je vais essayer de faire dans ce billet. 

C’est un exercice à haut risque, mais nous avons tous besoin d’une boussole qui nous permette d’anticiper ce qu’il sera possible de faire avec l’IAG dans les 12 à 24 mois qui viennent.

Je vais le faire en traitant successivement les thèmes suivants:

  • Les infrastructures Clouds Publics, fondations de l'IAG.
  • Les acteurs clés de l’industrie de l’IAG.
  • Une explosion de startups dans l’IAG.
  • Les grandes familles d’usages de l’IAG.
  • Les métiers les plus impactés par l’IAG.

Je m’adresse en priorité à des responsables qui souhaitent comprendre où nous en sommes en matière d’IAG et quels peuvent en être les impacts majeurs dans les prochaines années. Les professionnels de l’IA m’excuseront si je simplifie parfois un peu trop mes propos pour les rendre compréhensibles par le plus grand nombre.

 

Les infrastructures Clouds Publics, fondations de l'IAG

En 2021, dans une série de trois billets sur les dangers numériques qui menacent notre planète, j’ai parlé du Cloud, de l’IA et de l’informatique quantique.

XInnovations Cloud - IA Le Cloud Computing est né en 2006 avec l’arrivée d’AWS, bientôt suivi par GCP de Google et Azure de Microsoft. Cette technologie est maintenant mature et a cessé de faire partie des innovations numériques depuis 2020.

Basculer dans les clouds publics en 2023, ce n’est plus innover, c’est rattraper un retard catastrophique.

L’intelligence Artificielle et en particulier l’IAG ne peut pas se développer sans s’appuyer sur la puissance de calcul et les capacités de stockage des Clouds Publics.

Les premiers déploiements de l’IA dans les entreprises se sont multipliés à partir de 2020. En 2028, l’IA et l’IAG auront à leur tour abandonné leur statut de technologies innovantes et seront utilisés dans la majorité des entreprises performantes.

               L’IA sans le Cloud Public, cela n’existe pas!

XAI - Moteur cloud - énergie dataSi vous ratez le virage du Cloud Public, vous êtes condamné à rester en rade dans l’aventure de l’IA et de l’IAG.

Je reprends ici un graphique que j’avais déjà utilisé dans le billet de blog cité plus haut, en prenant l’analogie avec une voiture électrique:

  • Le Cloud Public, c’est le moteur de l’IA: il fournit puissance de calcul et capacité de stockage
  • Les données, c’est l’énergie dont a besoin l’IA pour fonctionner.

 

Les acteurs clés de l’industrie de l’IAG: un oligopole

XDon't build an AI companyCe tweet de Anshu Sharma, une personne que je ne connais pas, résume très bien la situation: “Ne construisez pas une entreprise d’IA.”

Comme pour les Clouds Publics, l’IA sera dominée par un oligopole d’acteurs qui sont aussi leaders dans les Clouds Publics, qui, comme on vient de le voir, sont les fondations numériques de l’IA.

Deux de ces leaders sont déjà clairement identifiés, Google et Microsoft.

XAchats AI par Google et MicrosoftDès 2014, Google-Alphabet avait compris les potentiels de l’IA en achetant pour seulement 500 M$ la société britannique DeepMind, créée en 2010 par l’un des cerveaux les plus brillants de cette industrie, Demis Hassabis.

Cinq ans plus tard, en 2019, Microsoft investit 1 B$ dans OpenAI, organisation à but non lucratif créée en 2015 par Elon Musk et Sam Altman. Elon Musk a depuis quitté l’association, transformée en entreprise. Sam Altman a abandonné son siège au Conseil d’Administration en mars 2023.

OpenAI utilise le Cloud Azure de Microsoft qui a investi 10 B$ supplémentaires dans OpenAI en 2023.

OpenAI est le créateur de deux des logiciels d’IAG dont on parle le plus en ce moment, ChatGPT, générateur de textes et Dall-E, générateur d’images.

Leader du Cloud Public, AWS propose déjà plusieurs outils d’IA, mais n’a pas encore d’offres fortes dans l’IAG. Ceci explique pourquoi AWS lance, en mars 2023, un appel à projets pour l’IAG.

Parmi les nouveaux poids lourds de l’IAG, il faut ajouter NVIDIA, le constructeur américain de cartes graphiques, dont la percée depuis quelques années dans le monde de l’IA est spectaculaire.

Toute personne qui s’intéresse sérieusement à l’IAG doit regarder cette vidéo de 80 minutes que je cite au début de ce billet et dont je redonne ici le lien:

 

NVIDIA y annonce de nouvelles offres, matérielles et logicielles, qui seront disponibles dans les Clouds Publics GCP et Azure, tels que le supercalculateur DGX Cloud dédié à l’IA.

XNVIDIA - Partnering with GCP  Azure  Oracle

Connaissez-vous d’autres entreprises dans le monde capables de proposer en 2023 des services d’IAG aussi performants que NVIDIA? Moi, non.

Pour terminer sur NVIDIA, je souhaite citer NVIDIA AI Foundation, une plateforme logicielle qui permet aux grandes entreprises de travailler sur leurs propres modèles, avec leurs données spécifiques. 

Les trois premiers outils disponibles sont:

  • NEMO, pour des LLM, Large Language Models comme ChatGPT.
  • PICASSO, pour les images, comme DALL-E.
  • BIONEMO, pour des modèles dans le domaine de la santé.

XNVIDIA AI Foundation for Text  Images and biology

Il n’est pas difficile de prévoir l’arrivée de nouveaux composants, pour de nouveaux domaines d’IAG, dans les mois qui viennent.

AWS, Azure, GCP, NVIDIA, ces quatre acteurs sont bien placés pour dominer les technologies d’IAG dans le monde occidental.

 

Quelle place pour la Chine, dans l’IAG

La grande inconnue, pour le moment, concerne la Chine.

XCompanies avec le + de brevets AIComme le montre ce graphique, parmi les entreprises qui ont déposé le plus grand nombre de brevets dans le monde de l’IA, il y a:

  • Trois américaines.
  • Trois chinoises.
  • Une Coréenne du Sud.

Est-ce que les entreprises chinoises seront capables de transformer ces brevets en produits?

Je pense que c’est difficile, aujourd’hui. La Chine n’a pas accès aux technologies lithographiques de pointe dont ASML, société européenne, est le seul acteur mondial.

L'embargo mis par les Etats-Unis et l’Europe sur l’exportation des machines ASML vers la Chine est un frein majeur à la création d’une industrie numérique de l’IAG en Chine.

Il est “peu probable” que le gouvernement américain laisse NVIDIA, société américaine, exporter ses nouveaux supercalculateurs DGX d’IAG vers la Chine.

XNVIDIA  ASML  TSMCCe n’est pas un hasard si NVIDIA collabore activement avec ASML et TSMC, le plus grand fondeur de composants au monde basé à Taiwan. NVIDIA a annoncé cuLitho, une plateforme qui accélère la création de masques lithographiques dans un rapport 40x, pour aller au-delà du nanomètre, dont l’industrie de l’IAG aura besoin.

Cette collaboration internationale autour de cuLitho est spectaculaire; elle s’appuie sur des compétences venant de trois continents différents:

  • NVIDIA, aux Etats-Unis.
  • ASML, en Europe.
  • TSMC, en Asie.

Voir l’Europe en position de force, dans un domaine clé du numérique, l’IAG, cela fait chaud au cœur. 

C’est quand même plus porteur d’espoir que ces minables combats d’arrière-garde dans des domaines où l’Europe est définitivement larguée comme celui des Clouds Publics ou des outils bureautiques universels. (J’aborderai l’impact de l’IAG sur les solutions bureautiques dans la deuxième partie de ce texte).

 

Une explosion de startups dans l’IAG

Vous souhaitez lancer une startup du numérique en 2023? Si l’IAG ne fait pas partie de votre argumentaire, vous aurez du mal à lever des fonds. C’est le message que j’entends de plus en plus souvent quand je parle aux investisseurs.

XGlobal investments in AI 2010 - 2021Ce graphique montre l’accroissement spectaculaire des investissements dans l’IA entre 2010 et 2021. Trois messages forts s’imposent:

  • Doublement des investissements entre 2020 et 2021.
  • Domination des Etats-Unis.
  • Faible part de la Chine, ce qui renforce ce que j’explique plus haut.

OpenAI, ChatGPT, DALL-E, Stable Diffusion… Si vous suivez l’industrie de l’IAG, ces noms vous sont probablement familiers. Dans le grand public, ChatGPT est la seule solution qui c’est imposée, et en quelques mois.

Inconnues de plus de 99% des personnes, des dizaines de startups se sont lancées dans le monde de l’IAG.

Sequoia est l’un des VC les plus importants. Dans cet article, il fait le point sur l’évolution du marché de l’IAG.

J’en ai extrait le graphique qui a l’avantage de mettre en lumière les nombreux domaines dans lesquels l’IAG se développe: texte, code, image, voix, vidéo, 3D, autres.

Sequoia Main families of generative AI tools

Dans sa partie basse, ce graphique donne le nom d’une vingtaine de solutions disponibles. Vous en connaissez combien?

Et ce n’est qu’un début! En mars 2023, CB Insights, une société qui fait un travail d’une extraordinaire qualité pour suivre le marché des startups dans tous les domaines, a publié sa “Market Map” de l’IAG avec… 250 sociétés!

XCB Insights 250 startups IAG

Oui, vous avez bien lu: 250, et CB Insights précise dans son document d’analyse qu’il ne prétend pas à l’exhaustivité.

Combien peuvent survivre? Combien seront encore là en 2025? Il faudra avoir les reins solides pour s’imposer dans ce marché à très haut potentiel et où la concurrence sera sans pitié.

XTypeface IAG startup Google + MicrosoftUne de ces entreprises qui me semble bien partie est Typeface qui a levé 65 M$ fin février 2023. L’une des raisons pour laquelle j’en parle, c’est qu’elle a réussi l’exploit d'avoir comme investisseurs Microsoft et… Google, les deux géants qui se livrent un combat féroce pour s’imposer sur le marché de l'IAG.

Nous avons connu le même phénomène dans les applications SaaS, construites sur les Clouds Publics. J’estime qu’il y a aujourd’hui plus de 60 000 éditeurs SaaS sur le marché mondial, dont 5 000 pour le seul secteur commercial et marketing.

Dans la deuxième partie de cette analyse, je reviendrai sur les solutions SaaS existantes. Elles sont déjà nombreuses à ajouter des fonctionnalités d’IAG à leurs produits.

Vous souhaitez utiliser un logiciel d’IAG en 2023? Vous devrez choisir entre des startups qui se proclament IAG natives et des solutions SaaS plus anciennes qui vous annoncent qu’elles ont ajouté les fonctionnalités IAG dont vous avez besoin. 

Bon courage pour vous y retrouver!

 

Synthèse sur les potentiels des technologies d’IAG

Dans cette première partie, j’ai mis l’accent sur l’offre technologique dans le domaine de l’IAG, depuis les grandes plateformes d’infrastructures jusqu’aux centaines de startups qui sont nées au cours de ces dernières années.

XNVIDIA - IA Models  1Mx more powerful in 10 yearsPour conclure cette première partie, je redonne la parole à Jensen Huang, le fondateur et CEO  de NVIDIA:

“ Je prévois que dans 10 ans les outils d’IAG seront un million de fois plus puissants que ceux d’aujourd’hui.”

Pour mettre cette prédiction en perspective, je cite les prédictions d’Andrew Moore, fondateur d’Intel, qui vient de nous quitter.

“Le nombre de transistors, donc la puissance des processeurs, doublera tous les 18 mois”.

Cette célébrissime loi de Moore correspond à une multiplication de la puissance par 100 sur 10 ans, ce qui nous paraissait déjà exceptionnel.

          La “Loi de Huang”, c’est la loi de Moore, mais 10 000 fois plus rapide!

Sommes-nous prêts à absorber cette nouvelle accélération?

Dans la deuxième partie de cette analyse, je réponds à deux questions encore plus importantes que celles relatives aux technologies:

  • L’IAG, pour quels usages dans les entreprises.
  • Quels impacts sur les entreprises et les emplois.

 


Chip War : la guerre des composants électroniques - Deuxième partie. Dimensions géopolitiques

 

XAdS DPC Geopolitics flags US China ...S 35720911Dans la première partie de cette analyse, j’ai présenté les dimensions techniques et industrielles de cette guerre des composants électroniques.

Cette deuxième partie se concentre sur les dimensions géopolitiques de cette guerre des composants.

 

Les forces en présence

Dans le domaine des composants électroniques, il y a cinq grandes zones géographiques importantes:

XChine Russie RTW Map

  • La Russie.
  • La Chine.
  • L’Europe.
  • Les Etats-Unis.
  • L’Asie du Sud-Est, hors Chine:
    • La Corée du Sud
    • Taiwan
    • Le Japon

Sur cette carte, j’ai clairement séparé la Chine et la Russie du reste du monde. Les raisons sont claires: 

  • La Russie, avec l’invasion de l’Ukraine, c’est mise en conflit ouvert avec l’Europe, les Etats-Unis et une grande partie des autres pays du monde.
  • Les spécialistes du domaine des composants électroniques, et bien sûr Chris Miller dont le livre CHIP WAR a servi de base à mon analyse, sont d’accord sur le fait que la Chine fera tout son possible pour essayer de retrouver une “souveraineté nationale” dans ce domaine.

 

Quelle place pour la Russie 

La réponse à cette question est claire: 

XRussia Failure ChipLa Russie n’a jamais été, n’est pas, ne sera jamais un acteur significatif de l’industrie des composants électroniques.

Comme l’explique Chris Miller, les difficultés ont commencé à l’époque de l’URSS, quand les Russes ont pensé qu’il suffisait d’envoyer des espions aux Etats-Unis et de copier les composants existants, à l’identique, pour rester dans la course.

Ils n’avaient pas compris que dans une industrie qui avançait aussi vite, c’était tout l'écosystème industriel qu’il fallait recréer.

Cette grande faiblesse de la Russie dans le domaine des composants est mise en lumière par la guerre avec l’Ukraine. L’embargo des livraisons à la Russie de composants électroniques par la majorité des fournisseurs mondiaux impacte fortement sa capacité militaire à fabriquer des armes modernes qui ont toutes besoin de nombreux composants électroniques pour être efficaces.

XList of 25 Chips Russian most neededCet article donne la liste des 25 composants les plus demandés par l’armée russe.

Cette pénurie est partiellement réduite par des canaux clandestins d’achat, à des prix très élevés, mais c’est insuffisant pour répondre à la demande.

De nombreuses analyses, comme celle de Bloomberg, montrent que les exportations vers la Russie d’équipements civils comme frigidaires ou machines à laver ont explosé ces derniers mois. La raison? Récupérer les composants électroniques qu’ils contiennent et… jeter ensuite les équipements!

Toutes les armées du monde dépendent aujourd’hui totalement de la disponibilité des composants électroniques les plus avancés pour construire les armements modernes.
C’est l’un des domaines clés de la “Souveraineté Numérique” d’un pays, comme le démontrent les grandes difficultés actuelles de l’armée russe.

 

Chine: un enjeu en interne, et pour le reste du monde

En Chine, il est important de bien séparer deux activités différentes:

  • L’assemblage de composants électroniques pour fabriquer des produits finis.
  • La production des composants électroniques

Chine, usine numérique du monde

XIPhone factory FoxconnLa Chine est un leader mondial de la fabrication, de l'assemblage des outils numériques tels que les ordinateurs ou les smartphones. Ces usines d’assemblage emploient des centaines de milliers de personnes. Ce sont des activités à faible valeur ajoutée, dont l’élément concurrentiel principal est la disponibilité et le faible coût de la main-d’œuvre.

Déplacer ces usines est possible à tout moment. C’est ce qui se passe en ce moment.

L’augmentation des coûts salariaux en Chine et les tensions internationales font que de nombreux donneurs d’ordre commencent à déplacer une partie de leurs fabrications dans d’autres pays comme l’Inde ou le Vietnam.

Un exemple: Apple prévoit de migrer 25% de sa production en Inde, pour moins dépendre de la Chine.

Remplacer la Chine comme “usine numérique” du monde prendra beaucoup de temps, mais c’est une hypothèse qui devient plausible.

Chine, producteur de composants électroniques

Dans ce domaine, il faut revenir à la segmentation du marché que j’ai présentée dans la première partie de cette analyse:

  • Les composants simples.
  • Les composants haut de gamme.

Dans les composants simples, ceux qui ne demandent pas des outils de lithographie avancés, la Chine est un fournisseur important. Le pays est capable de répondre à ses besoins internes et en même temps d’exporter.

En revanche, dans les composants haut de gamme, ceux pour lesquels des outils de lithographie fabriqués par ASML sont indispensables, la Chine est pour le moment absente du marché.

XLImits to ASML sales in ChinaLes tensions internationales entre la Chine, les Etats-Unis et l’Europe font que des embargos très stricts ont été mis en place sur les exportations de ces outils de lithographie vers la Chine. De nouvelles restrictions viennent d’être décidées, en particulier pour l’exportation des machines ASML d’occasion, les générations précédentes. 96% des machines ASML produites depuis la création de la société sont encore en exploitation.

En clair, même les machines capables de graver en 13 nm ou 10 nm, quand les dernières générations sont capables de le faire en 3 nm et 2 nm, sont interdites à la vente en Chine.

La Chine peut encore importer, sous réserves, certains composants électroniques haut de gamme fabriqués à Taiwan et en Corée du Sud par TSMC ou Samsung.

Cette incapacité à fabriquer sur son territoire, avec ses usines, des composants haut de gamme est perçue par les dirigeants chinois comme une menace majeure pour leur pays

Fin janvier 2023, le Japon a rejoint les Pays-Bas et les Etats-Unis pour participer à l’embargo des exportations de ces machines vers la Chine.

La Chine est dans l’impossibilité de produire localement les composants dont son armée a besoin pour fabriquer les armes les plus modernes, compétitives avec celles des Etats-Unis et de l’Europe.

Pour le moment, rien ne permet de penser que la Chine sera capable, dans les 10 ans qui viennent, de rattraper ce retard technologique essentiel.

Est-ce que l’annexion de Taiwan permettrait de résoudre ce problème? 

Ma réponse est non. Je suis certain que Taiwan et TSMC ont envisagé cette hypothèse et pris toutes les mesures nécessaires pour éviter que les machines ASML tombent entre les mains de la Chine continentale. De plus, ces machines sont inutilisables sans la présence sur place, à temps plein, de dizaines ou centaines de salariés d’ASML, les seuls à en maîtriser le fonctionnement.

Il y a très peu de domaines où la “souveraineté numérique” de la Chine n’est pas garantie. L’impossibilité de disposer d’usines capables de fabriquer localement les générations les plus avancées de composants électroniques est aujourd’hui la plus pénalisante pour des dirigeants du pays.

 

Quelle place pour l’Europe

Les trois zones géographiques restantes ont toutes une présence dans l’industrie des composants électroniques.

XMap USA Europe Asie

Cette carte illustre le poids respectif des trois zones:

  • L’Europe, la plus petite.
  • Les Etats-Unis, qui ont perdu leur position dominante.
  • Les trois leaders en Asie: Taiwan, Corée du Sud et Japon.

Faut-il le rappeler? La France, seule, ne peut pas espérer devenir un acteur majeur de cette industrie, même si elle dispose déjà d’entreprises de qualité comme SOITEC.

Comme je l’ai expliqué dans la première partie, l’Europe occupe une place essentielle dans cette industrie, avec le monopole d’ASML dans les outils de lithographie permettant de graver en moins de 10 nm.

L’Europe dispose sur son sol de quelques capacités de production dans les composants d’entrée de gamme. En 2023, il n’y a pas en Europe d’usines capables de fabriquer les composants électroniques haut de gamme.

La fabrication de composants haut de gamme, c’est une industrie lourde, gourmande en capitaux et qui demande des compétences impossibles à acquérir rapidement.

XEuropean & USA chip actsLa bonne nouvelle, c’est que les dirigeants européens, comme leurs équivalents américains, ont pris conscience de l’importance de ce sujet. Des “Chip Acts” ont été annoncés avec la volonté d’investir chacun 50 milliards pour favoriser l’implantation sur leurs sols d’usines de composants haut de gamme.

Pour le faire, l’Europe négocie avec les deux grandes entreprises ayant des compétences dans ce domaine, Samsung et TSMC. C’est une démarche pragmatique que j’applaudis. En 2023, l'Europe n’a ni le temps, ni les moyens, ni les compétences pour développer des entreprises qui maîtrisent la fabrication de ces composants haut de gamme.

Les négociations sont très avancées avec TSMC qui devrait annoncer sa décision de construire une usine en Allemagne dans les semaines qui viennent. 

Mais… cette première installation se ferait sur des solutions “moyenne gamme”, avec des processeurs construits dans la gamme des 20 nm, et pas dans les plus avancées qui sont aujourd’hui entre 2 et 5 nm.

Est-ce que l’Europe disposera sur son sol, avant la fin de l’année 2030, d’usines capables de produire les composants électroniques de dernière génération? 

J’aimerais pouvoir répondre oui à cette question…

 

L’industrie des composants aux Etats-Unis

C’est aux Etats-Unis que tout a commencé, dans les années 1950, avec des entreprises comme Intel ou Texas Instruments.

La position dominante des Etats-Unis c’est progressivement réduite, avec l’arrivée du Japon puis des autres pays asiatiques.

Où en est-on, en 2023?

Ces deux graphiques donnent une image très différente de la situation, selon que l’on analyse la conception des composants ou leur fabrication.

XSIA Chip Design market share

Sur ce premier graphique, tiré d’une étude publiée fin 2022 par SIA, Semiconductor Industry Association, on constate que les Etats-Unis:

  • Avaient encore la majorité du marché, 51%, en 2015.
  • Que cette part de marché baisse depuis;  elle pourrait descendre à 36% en 2030.

Malgré cette baisse, les Etats-Unis resteront leaders pendant toute la décennie 2020.

La situation est très différente quand on parle de fabrication.

Ce deuxième graphique est tiré d’études faites par Deloitte.

XSemiconductor production capacity US

De 12% en 2023, la part de marché des Etats-Unis passera à environ 10% en 2025.

C’est pour lutter contre cette marginalisation que le Président Biden a signé le Chip & Science Act en août 2022.

Avec les subventions proposées par les Etats-Unis, TSMC a annoncé un investissement en Arizona de 40 B$ pour deux unités de fabrication.

La grande différence avec l’accord annoncé en Europe? Ce seront des usines qui produiront les générations les plus avancées de composants, gravés en 3 nm et 2 nm.

TSMC avait expliqué que fabriquer aux Etats-Unis augmentait le coût de 50% par rapport à Taïwan, ce qui peut expliquer les subventions américaines…

 

Les pays asiatiques, hors Chine

Ce graphique, tiré du livre de Chris Miller, résume bien la situation.

XChip War Map East asia produces

Ces pays fabriquent:

  • 90% des composants mémoires.
  • 75% des processeurs.
  • 80% des plaquettes de silicium.

L’usine mondiale des composants électroniques est en Asie.

Trois pays ont dominé ou dominent cette industrie, le Japon, Taiwan et la République de Corée.

Le Japon

Sur le graphique de l’étude Deloitte, présentée dans le paragraphe Etats-Unis, le Japon faisait partie des trois seuls pays producteurs de composants en 1990.

Même si sa part de marché a baissé depuis, il reste celui des trois qui a le mieux résisté et le Japon fabrique en 2020 plus que les Etats-Unis ou l’Europe.

Le Japon est resté important dans le marché des composants d’entrée de gamme, mais a totalement raté celui des composants haut de gamme, gravés en moins de 10 nm.

Sa réaction? Comme l’Europe et les Etats-Unis, le Japon a lancé son… Chip Act!

Et, oh surprise, qui va construire une usine au Japon? Vous l’avez deviné, c’est TSMC, comme aux Etats-Unis et en Europe.

La République de Corée

Dans la République de Corée, l’entreprise qui domine le marché pour la fabrication des composants électroniques est Samsung, le numéro deux mondial du secteur.

La Corée est présente dans les deux marchés:

  • Composants d’entrée de gamme: 44% des mémoires électroniques sont fabriquées en Corée.
  • Composants haut de gamme: Samsung dispose aussi des matériels ASML capables de graver en moins de 10 nm.

Et un… Chip Act de plus! Malgré la forte position du pays, le gouvernement de la République de Corée a aussi annoncé un plan d’aide au secteur des composants électroniques.

XSamsung 17 B$ Factory TexasComme TSMC, Samsung a choisi d’investir massivement à l’étranger, et en priorité aux Etats-Unis.

La nouvelle usine au Texas représente un investissement de 17 B$; elle sera opérationnelle en 2024

Et ce n’est qu’un début! Samsung envisage d’investir… 200 B$ dans onze autres usines aux Etats-Unis. Rien de définitif pour le moment, mais 5 B$ d’incitations fiscales sont prévues par l’Etat du Texas pour accélérer la décision.

Les projets d’investissements de Samsung en Europe existent, mais ils ne sont pas encore concrétisés.

Taiwan

Le T de TSMC, leader mondial de la fabrication de composants électroniques haut de gamme, c’est pour Taiwan!

Dans le graphique tiré du livre de Chris Miller présenté plus haut, on voit que Taiwan a un quasi-monopole sur la fabrication de ces composants haut de gamme, avec 90% du marché mondial

Taiwan et TSMC sont omniprésents dans ces deux billets sur les composants électroniques. En avril 2021, j’avais déjà consacré tout un billet à cette entreprise exceptionnelle.

S’il fallait une preuve de plus que cette industrie consomme beaucoup de capitaux, les investissements de TSMC pour la seule année 2022 ont atteint 36 B$.

En 2030, TSMC aura des usines de production dans tous les grands pays industrialisés qui comptent dans l’industrie des composants électroniques. Quelle belle réussite industrielle pour cette entreprise fondée en 1987 par Morris Chang. Chinois de naissance, il a fait l’essentiel de sa carrière aux Etats-Unis chez Texas Instruments (TI) avant de partir à Taiwan quand TI décida de le mettre sur la touche.

 

Composants électroniques: une géopolitique complexe

Il y a très peu d’industries qui aient un rôle aussi stratégique dans la géopolitique mondiale que celle des composants électroniques, et en particulier des composants haut de gamme.

Dans ces composants haut de gamme, les forces en présence sont visualisées par cette course de chevaux, que je vais analyser en commençant par ceux qui sont à la traîne.

XHorse races chip industry

  • La Russie n’est pas dans cette course, qu’elle a définitivement abandonnée.
  • La Chine essaie de recoller au peloton, mais les fortes sanctions prises à son égard par les Etats-Unis et l’Europe lui compliquent beaucoup la tâche. Est-ce que la Chine réussira à devenir un acteur majeur de cette industrie? C’est peu probable, au moins pendant les 10 ans qui viennent.
  • L’Europe, avec le monopole ASML, est un acteur clé. Les décisions prises d’accepter l’implantation sur son sol d’usines de fabrication construites par les leaders mondiaux TSMC et Samsung sont, de mon point de vue, intelligentes et pragmatiques.
  • Les Etats-Unis, qui étaient à l’origine de cette industrie, se sont fait distancer. Ils gardent encore un rôle essentiel dans la conception de ces composants haut de gamme, avec des entreprises telles qu’Apple. Comme l’Europe, ils ont pris la décision d’installer sur leur sol des usines TSMC et Samsung, pour rester aussi un acteur de la fabrication de ces composants.
  • La République de Corée et Taiwan font la course en tête et aucun autre pays ne semble, pour l’instant, capable de les rattraper. Ces deux pays et surtout Taiwan sont dans une zone géographique où de graves tensions peuvent naître, à l’initiative de la Chine. On comprend mieux pourquoi ils ont accepté de s’installer aux Etats-Unis et en Europe.

 

Synthèse: l’extrême fragilité de cet écosystème


Un monopôle, ASML et un duopole, TSMC et Samsung, contrôlent l’industrie des composants électroniques haut de gamme.

  • XGuerres se gagnent avec les pucesLa capacité des états à développer des armements de nouvelle génération en dépend. C’est un message que l’on retrouve dans cet article publié par le journal l’Opinion fin janvier 2023.
  • De nombreuses industries essentielles en dépendent: numérique et informatique, santé, automobile, aviation…

XAdS DPC résilience S 115798692Entre 2020 et 2022, le monde entier a vécu les prémices d’une crise économique importante, liée à la pénurie de composants électroniques.

Comment créer une résilience raisonnable dans le monde pour éviter qu’une crise majeure du secteur de la production de composants électroniques se traduise par une catastrophe économique qui toucherait tous les pays, et en priorité les pays industrialisés?

J’ose espérer que c’est une question que se posent les dirigeants politiques et économiques du monde entier.

Rappel: si ce sujet majeur vous passionne, n'oubliez pas de lire l’ouvrage de Chris Miller, CHIP WAR!

 


Plateforme de Gouvernement Numérique de la République de Corée: un modèle pour la France? 

 

XDavos 2023Dans quelques jours, le Président de la République de Corée, Yoon Suk Yeol, présentera à la conférence Davos 2023 la Plateforme de Gouvernement Numérique de son pays, DPG en anglais: Digital Platform Government.

La coïncidence des dates est intéressante:

  • Le 19 janvier 2023, le Président de la République de Corée présente une vision à long terme de changements très ambitieux pour l’ensemble du gouvernement de son pays.
  • Le 19 janvier 2023, beaucoup de Français vont manifester, un petit nombre va mettre le pays à l’arrêt, pour protester contre une réformette qui est tout sauf ambitieuse.

Cette situation aura au moins un avantage: vous serez nombreux, bloqués chez vous, à pouvoir suivre la conférence du Président Yoon Suk Yeol, entre 11h30 et 12h.

De nombreuses sessions sont consacrées au numérique pendant ce forum de Davos, qui se déroule du lundi 16 au vendredi 20 janvier 2023. Beaucoup de sessions sont accessibles gratuitement en visioconférence.

 

DPG, Digital Platform Government de Corée du Sud

Je vous encourage à lire ce document dans son intégralité.

J’en ai extrait les points qui m’ont paru les plus importants.

L’objectif de la DPG est clair: 

“Les citoyens, les entreprises et le gouvernement travaillent de manière collaborative en s’appuyant sur une plateforme où toutes les données sont connectées”.

L’ordre dans lequel ces trois parties prenantes sont citées est tout sauf anodin:

  • Les citoyens, en premier lieu.
  • Les entreprises.
  • Le gouvernement, en dernier.

Venant du chef de l’État, c’est un message fort: le gouvernement est au service de ses citoyens et entreprises, et pas l’inverse.

 

Élaboration de la DPG

On est très loin des études complexes, qui n’en finissent jamais.

XBadge CommandoLa DPG a été élaborée par une petite équipe de 23 personnes, dont 19 experts n'appartenant pas au gouvernement. Accepter que les compétences et la connaissance des potentiels du numérique ne soient pas à l’intérieur du gouvernement, c’est une preuve de modestie que l’on aimerait bien retrouver dans d’autres pays, en particulier en Europe…

Tout est réalisé en 6 mois, entre septembre 2022 et mars 2023.

C’est la démarche commando que je recommande depuis longtemps.

 

Quatre mots clés: Cloud Public, Données, intelligence Artificielle, API

Ce schéma présente la cible à long terme de la DPG.

XDPG Corée phase 3

Il est très proche du modèle BISD que je pousse depuis 2019, et je ne vais pas m’en plaindre!

I : Infrastructures. Le gouvernement de Corée du Sud fait le choix de solutions Cloud Public, choix que je pousse depuis plus de dix ans! Nous sommes encore en France englués dans des combats d’arrière-garde sur le soi-disant manque de sécurité des Clouds Publics. Qui oserait dire que la Corée du Sud n’a pas de préoccupations de sécurité numérique au moins aussi importantes que la France, avec un voisin puissant et expansionniste, la Chine continentale? Je n’ai jamais entendu parler d’un “Cloud Souverain” en Corée du Sud!

D : Données. Les données sont au cœur de la démarche DPG. Je cite: 

“To this end, the government will abolish regulations or systems that hinder and impede the opening and use of data, and facilitate high-quality data through data standardization…”

“Pour cet objectif, le gouvernement abolira les règlements et les systèmes qui entravent ou empêchent l’ouverture et l’usage des données et facilitera la création de données de grande qualité par la standardisation…”

IA: Intelligence Artificielle. La DPG emploie l’expression “Hyper-scale AI” pour insister sur le rôle essentiel que doit jouer l’IA dans cette plateforme. 

Petit rappel: il est impossible de déployer des solutions d’IA performantes sans s’appuyer sur des infrastructures Cloud Public. Tant que ce blocage absurde, anti Cloud Public, ne sera pas levé en France et en Europe, le gouvernement ne pourra pas s’appuyer sur l’IA pour améliorer les services proposés aux citoyens et aux entreprises.

API. S’appuyer sur des API, Application Programming Interfaces, permet de créer les indépendances indispensables entre les différentes applications, les données et les infrastructures.

Tout ceci se fera sans oublier les dimensions sécurité et confiance numérique.

Je cite, une nouvelle fois:

“...the government plans to build a reliable information security environment so that all citizens can trust the Digital Platform Government..”

“Le gouvernement prévoit de créer un environnement numérique fiable et sécurisé permettant à tous les citoyens d’avoir confiance dans la DPG.”.

Oui, il est possible de construire des solutions numériques innovantes sur des infrastructures Cloud Public, avec des données accessibles au plus grand nombre, sans sacrifier la sécurité et la confidentialité des données. Encore faut-il avoir le courage d’entreprendre cette démarche…

 

Liens entre la DPG et l’économie numérique de la Corée du Sud

C’est un autre enseignement passionnant de ce document DPG.
Le gouvernement souhaite mettre la DPG au service de l’économie numérique du pays.

La DPG devient un moyen pour les startups du pays de croître en ayant comme client majeur le gouvernement.

The Digital Platform Government will serve as a test-bed for many startups to plan and demonstrate new services. Creative ideas from the private sector will become a reality, and competent startups will flock together to create an ecosystem on the Digital Platform Government.”

XSouth Korea President Yoon Suk Yeol portraitBravo, Monsieur le Président! 

Vous avez une vision moderne, pragmatique et ambitieuse de ce que peut devenir le numérique au service d’un pays, de ses citoyens, de ses entreprises et de son écosystème de startups.

Vous avez clairement séparé:

  • La vision forte, à 20 ans, de cette DPG.
  • La mise en œuvre opérationnelle de cette DPG, à court et moyen terme. Les premiers éléments en seront dévoilés en mars 2023.

J’ai hâte de vous entendre à Davos le 19 janvier 2023!

 

La DPG, un modèle pour la France?

X DPC I Have a dream MLK S 478986745J’ai fait un rêve: et si la France suivait l’exemple de la Corée du Sud?

Objectivement, rationnellement, rien n’interdit à la France de suivre la voie tracée par la République de Corée et de créer sa Plateforme de Gouvernement Numérique (PGN), selon les mêmes principes que la DPG.

Dans un billet récent, j’ai publié les “Vœux du Président de la République Française” pour que la France et l’Europe restent des acteurs raisonnables de l’industrie numérique mondiale en 2030.

Ces vœux peuvent devenir la vision 2030 du numérique en France.

Ce que je propose aujourd’hui, c’est que, avec la PGN, le Gouvernement Français:

  • Prenne une position offensive dans le numérique.
  • Devienne un acteur majeur de l’innovation, une force de proposition.
  • Mette en œuvre des démarches innovantes dans tous les domaines, des infrastructures, des données et des usages.
  • Se transforme en catalyseur de la Transformation Numérique dans tout le pays, pour ses entreprises et ses citoyens.

PGN - Plateforme Gouvernement Numérique

Les complémentarités entre la Vision 2030 et la PGN sont très fortes:

  • La PGN suit les recommandations de la Vision 2030, et en démontre la pertinence et l’applicabilité.
  • Le gouvernement montre la voie aux citoyens et aux entreprises en créant des solutions numériques innovantes à leur service.
  • Les investissements induits par la PGN profitent aux startups françaises du numérique, en particulier en SaaS, en créant des cas d’usages dans le secteur public qu’elles pourront ensuite commercialiser dans d’autres gouvernements.

Est-ce que la France peut, elle aussi, lancer une PGN, Plateforme de Gouvernement Numérique, ambitieuse? La réponse est oui, si la volonté et surtout le courage politique sont au rendez-vous.

En suivant la méthode commando utilisée par la République de Corée, la PGN peut être construite avant la fin de l’année 2023.

Je suis volontaire pour participer comme expert à ce groupe de travail commando!

Je ne suis pas le seul: le Gouvernement Français n’aura aucun mal à recruter la petite vingtaine de professionnels du numérique qui seront prêts à mettre toutes leurs compétences au service d’un aussi beau projet.

 

Résumé

Le gouvernement de la République de Corée montre, avec sa DPG, que l’État peut devenir un acteur majeur et essentiel de l’innovation numérique dans un pays.

C’est un signal fort envoyé à tous les autres pays du monde.

Début 2023, la situation du numérique dans les organisations publiques françaises est loin d’être satisfaisante, et dans toutes les dimensions, techniques, humaines, financières et organisationnelles.

Définir avec la PGN un point d’arrivée enthousiasmant dans les 20 ans qui viennent, c’est probablement la meilleure, la seule manière de créer un choc positif dans tout l’écosystème numérique du secteur public français.

En 2023, la maturité numérique de la République de Corée est supérieure à celle de la France: cela fait plus de 20 ans qu’ils travaillent pour l’améliorer.

Plateforme Numériques Corée France

En 2030:

  • La maturité numérique du gouvernement de la République de Corée fera un bond spectaculaire, grâce à sa DGP, Digital Platform Government.
  • La maturité numérique du gouvernement de la France peut elle aussi faire des progrès importants, si la PGN est mise en œuvre.
  • La maturité numérique du gouvernement de la France restera très faible, en retard sur ses principaux concurrents économiques mondiaux, s’il n’y a pas un courage politique suffisant pour lancer une PGN ambitieuse.

Cette décision politique ne m’appartient pas.

Je suis prêt à mettre toute mon énergie et mes compétences numériques au service de mon pays si la décision de lancer une PGN ambitieuse est prise.

Je resterai impuissant, et catastrophé, si aucune décision forte n'est prise rapidement pour que la maturité numérique du gouvernement français ne stagne pas.


Chip War : la guerre des composants électroniques - Première partie

 

XChipWar book cover J’ai profité d’une activité professionnelle plus calme pendant les derniers jours de l’année 2022 pour terminer la lecture du livre de Chris Miller, CHIP WAR.

Je lis beaucoup, et ce livre est l’un de ceux qui m'a le plus impressionné en 2022.

Dans ce billet, je vous présente quelques-unes des idées les plus importantes que j’ai retenues de cette lecture.

J’espère surtout qu’il vous donnera envie de le lire dans son intégralité.

Il se lit comme un roman policier, alors qu’il parle de technologies et de stratégie mondiale. C’est un beau compliment…

 

Un thème clé: l’importance de l’industrie des composants électroniques

Cela fait plusieurs années que je m’intéresse à ce sujet.

Cette industrie des composants électroniques a démarré dans les années 1960. Aujourd’hui, il n’y a plus un seul secteur économique qui ne dépende pas, plus ou moins fortement, de ces composants.

Au CES (Consumer Electronics Show) 2023 qui vient de se terminer à Las Vegas, Honda a présenté un prototype du véhicule électrique autonome Afeela sur lequel ils travaillent, avec… Sony et Qualcomm. 

Sur ce schéma, on voit les 45 capteurs qui seront utilisés pour permettre le niveau 3 d’autonomie. Le nombre de processeurs et la puissance numérique embarquée sur un véhicule de ce type sont impressionnants.

XSony Honda Afeela 45 sensors

Ce billet que j’ai écrit en 2021 présente un panorama raisonnablement complet de cette industrie.

A la fin de l’année 2021, dans une analyse des principaux risques qui menacent notre planète, j’ai parlé de la volonté de la Chine d’envahir Taiwan, ce qui aurait des conséquences dramatiques sur l’industrie des composants électroniques.

Dans les “Vœux du Président de la République Française pour le numérique”, l’industrie des composants électroniques occupe une place de choix.

Maintenant que tous les pays ont pris conscience de l’importance de cette industrie, il est essentiel d’en comprendre la variété et la complexité.

 

Composants électroniques : deux industries très différentes

Pour bien comprendre les enjeux mondiaux de cette industrie, il est indispensable de séparer le marché en deux familles:

  • Les composants simples, qui s’appuient sur des technologies bien maîtrisées et matures.
  • Les composants haut de gamme, construits avec les technologies les plus avancées du moment.

Ce schéma permet de mieux visualiser les progrès exponentiels réalisés dans la construction de ces composants électroniques.

XARM Chip 1985  Vs M1 Apple 2020

A gauche, un processeur ARM de première génération:

  • Construit en 1985.
  • Lithographie en 3 µm.
  • 25 000 transistors.

A droite, un processeur ARM M1 développé par Apple:

  • Construit en 2020.
  • Lithographie en 5 nm.( Rappel : 1 µm = 1000 nm.).
  • 16 milliards de transistors = multiplication par 640 000 du nombre de transistors par rapport au processeur de 1985.

La segmentation en deux familles permet de suivre les évolutions de cette industrie des composants électroniques.

XChips deux industries séparées

 

Famille des composants simples, sur technologies anciennes

A la fin des années 1950 et au début des années 1960, les premiers composants électroniques à base de transistors remplacent les processeurs à tubes.

Texas Instruments, Intel sont nés pendant cette période.

Les principaux composants que l’on retrouve dans cette famille sont:

  • Les microprocesseurs simples, présents dans des milliers d’objets courants tels que les téléviseurs, les machines à laver…
  • Les mémoires DRAM (Dynamic Random Access Memory). Ce sont des mémoires qui ont besoin d’être alimentées en énergie pour fonctionner et que l’on trouve dans tous les ordinateurs. L’industrie des DRAM a connu trois zones géographiques leaders successifs:
    • Les Etats-Unis avec la Silicon Valley.
    • Le Japon pendant les années 1980.
    • La Corée du Sud et d'autres pays d’Asie aujourd’hui.
  • Les mémoires Flash ou NAND. Ce sont des mémoires qui sont capables de stocker des informations sans être alimentées en énergie.

Les outils de lithographie utilisés pour les fabriquer sont bien maîtrisés: ce sont des solutions DUV (Deep UltraViolet) qui gravent le plus souvent entre 200 et 300 nm.

 

Famille des composants haut de gamme

La principale différence avec les composants simples est liée aux solutions de lithographie utilisées: les solutions EUV (Extreme UltraViolet), avec des gravures comprises aujourd’hui entre 13 et 3 nm.

Je reviendrai plus longuement sur ce sujet clé de la lithographie dans la suite de ce texte.

Les principaux composants qui ont besoin de l’EUV sont:

  • Les microprocesseurs universels haut de gamme tels que l’Apple ARM M2.
  • Les cartes graphiques de Nvidia, de plus en plus utilisées en Intelligence Artificielle.
  • Les processeurs spécialisés dans l’Intelligence Artificielle. C’est dans ce domaine que les progrès sont les plus spectaculaires depuis 2020. On assiste aussi à la multiplication de solutions spécifiques proposées par les géants du Cloud Public tels que:
    • Les processeurs TPU (Tensor Flow) par Google.
    • Les processeurs Inferencia par AWS.

 

Lithographie : LA clé de l’explosion des performances des composants électroniques

Comme on l’a vu dans le début de ce texte, les techniques de lithographie sont au cœur de l’accroissement des performances des composants électroniques.

Le terme exact à utiliser serait la photolithographie, pour se différencier des techniques anciennes d’impression sur papier. Dans la pratique, toute la profession utilise le mot lithographie, ce que je fais dans ce texte.

XPremier circuit en lithographieJay Lathrop qui travaillait chez Texas Instruments a inventé la lithographie en utilisant un microscope… à l’envers pour réduire la taille d’une image. Le brevet a été déposé en 1957.

Cette image montre l’un des premiers composants “dessiné” avant d’être photolithographié.

Comme pour les mémoires DRAM, l’industrie a migré géographiquement:

  • Le leadership initial était aux Etats-Unis avec l'entreprise GCA au début des années 1980.
  • Nikon et Canon au Japon deviennent dominants à la fin des années 1980.

Les machines de cette génération travaillaient avec les solutions DUV : Deep Ultraviolet Light,  entre 200 et 300 nm.

Le basculement vers la génération d’après, EUV: Extreme Ultraviolet Light pour graver en 15 nm ou moins était considérée par les fournisseurs existants comme extrêmement difficile, voire impossible

Et c’est à ce moment qu’a commencé l’aventure ASML…

 

ASML, le seul fournisseur mondial d’outils de lithographie EUV

En 1984, le groupe hollandais Philips avait transféré ses compétences en lithographie dans une société indépendante, ASML. Philips avait aussi investi dans la “startup” TSMC à Taiwan, ce qui a facilité les collaborations entre ASML et TSMC.

GCA, qui était le leader américain des solutions DUV, a mis la clé sous la porte en 1990.

En 2001, ASML achète le seul acteur en lithographie restant aux Etats-Unis, SVG.

Après des dizaines de milliards d’investissements, dont 12 milliards par Intel, et des années de travail, ASML est en 2023, le SEUL fabricant au monde capable de construire des machines qui gravent en EUV.

Il faut bien comprendre les impacts de ce monopole ASML: 100% de l’industrie mondiale des composants électroniques haut de gamme est dépendante des machines de lithographie construites par ASML.

Cette situation est résumée sur ce schéma.

XChip Monopole ASML Duopole TSMC Samsung

Cette fragilité de l’industrie est accentuée par le fait que ASML est un intégrateur de dizaines de milliers de composants très haut de gamme, dont beaucoup sont aussi fournis par une seule entreprise. Dans cet écosystème, il y a quelques acteurs essentiels:

  • Zeiss, fabricant allemand d’optiques de précision, est le SEUL à pouvoir fabriquer les miroirs dont a besoin ASML
  • Trumpf, autre acteur allemand, est le SEUL fabricant de lasers au dioxyde de carbone capable de fournir les lasers nécessaires pour ASML. ASML a financé pour 1 milliard de dollars la recherche de Trumpf.
  • Cymer est un acteur américain fournisseur de sources de lumière nécessaires pour les lasers. C’est le SEUL fournisseur pour ASML, qui a pris la décision d’acheter l’entreprise.

ASML, Zeiss, Trumpf, Cymer, ce sont tous des MONOPOLES mondiaux dans l’industrie des composants électroniques. Cette industrie est d’une extraordinaire fragilité

Un accident industriel sur une seule de ces quatre entreprises peut bloquer toute l’industrie du numérique au niveau mondial.

La croissance exponentielle des performances de ces outils de lithographie EUV continue. Les premières machines ASML fonctionnant en 3 nm ont été livrées en 2022 à Samsung et TSMC.

XASML 150 M$ machine Une “petite” machine ASML coûte entre 100 et 200 M$. Celle représentée ici:

  • A un prix de vente de 150 M$. 
  • Est de la taille d’un autobus. 
  • Demande 40 conteneurs et 3 avions-cargos pour être expédiée.

Ce ne sont pas des machines qui se vendent en grand nombre! Fin 2022, ASML n’avait livré que 140 machines EUV dans le monde.

Sur le schéma du monopole ASML, j’ai rajouté un “duopole +”, celui des fondeurs, des entreprises industrielles capables de mettre en œuvre les outils ASML pour fabriquer les composants haut de gamme.

Pourquoi parler de “duopole +”?

  • TSMC, basé à Taiwan, est le premier fondeur mondial de composants haut de gamme.
  • Samsung, basé en Corée du Sud, est le deuxième fondeur.
  • Intel est loin derrière en matière de volumes, le + de la bande. L’avenir d’Intel dans les composants très haut de gamme n’est pas garanti.

Les liens entre ASML et TSMC sont très étroits.

Le premier fondeur à utiliser les nouvelles générations de matériels ASML est le plus souvent TSMC, comme le montrent ces deux annonces récentes:

XTSMC 2 nm TSMC prévoit de livrer les premiers composants en 2nm début 2026.

- TSMC annonce qu’il va construire à Taiwan une nouvelle usine pour des puces en 1 nm.

Le fournisseur des matériels permettant la fabrication de ces nouvelles générations de composants sera… ASML.

N’oublions pas que passer du 2 nm au 1 nm, cela… double le nombre de transistors que l’on peut graver sur la même surface!

Cette remarquable vidéo


qui présente l’histoire d’ASML dure presque 20 minutes, mais je vous conseille vraiment de prendre le temps de la visionner. Elle a été préparée avec l’aide de Chris Miller, l’auteur du livre qui m’a servi de référence pour écrire ce billet.

 

L’après EUV : High NA EUV

Dans votre prochain dîner en ville, vous pourrez parler de “High NA EUV” et votre prestige comme spécialiste du numérique va grimper en flèche!

NA signifie Numerical Aperture, l'équivalent de la focale d'un appareil photographique. EUV travaille avec un NA de 0,33 et High NA EUV avec un NA de 0,55.

Cette nouvelle génération de lithographie devrait arriver à partir de 2025. Cet article explique, dans un langage raisonnablement simple, les différences entre EUV et High NA EUV.

ASML travaille sur cette nouvelle génération High NA EUV et son premier client sera… Intel!

Intel espère ainsi retrouver une position de leader vis-à-vis de ces deux concurrents asiatiques, TSMC et Samsung.

Ces nouvelles machines seront encore plus complexes, plus grandes et plus chères que les EUV actuelles, comme le montre cette photo. Le prix d'une machine High NA EUV sera de 300 M$.

EUV vs High NA EUV

 

Dans cette première partie de ce billet, j’ai présenté les dimensions techniques et industrielles de cette guerre des composants électroniques.

Dans la deuxième partie, j'aborderai les enjeux géopolitiques majeurs posés par la dimension stratégique de cette industrie des composants électroniques.

 


Réconciliations numériques

 

XAdS DPC statue reconciliation S 89151789Réconciliation et numérique, ce sont deux mots qui sont rarement utilisés ensemble.
C’est pourtant ce que je vous propose de faire dans ce billet.

En droit, une réconciliation met fin à une procédure de divorce. Je rencontre trop souvent des entreprises dans lesquelles il existe des divorces importants entre les quatre composants que je vais présenter.
Le numérique à vocation à devenir un acteur de ces réconciliations. C’est une excellente nouvelle.

 

Les quatre composants à réconcilier

J’ai identifié quatre composants entre lesquels le numérique peut devenir un outil de réconciliation:

  • Le monde physique.
  • Le monde numérique.
  • Les équipes bureau.
  • Les équipes terrain.

XRéconciliations numériques - quatre composants

Le monde physique est celui du réel, des usines, des champs, des entrepôts, des salles d’opération dans les hôpitaux, des magasins…

Le monde numérique a pour objectif de créer une image, aussi ressemblante que possible, de ces différents mondes physiques.

Les équipes bureaux, les cols blancs, travaillent en priorité dans le monde numérique.

Les équipes terrain, les personnes en première ligne, sont directement au contact des mondes physiques.

 

Réconcilier monde physique et monde numérique

La représentation numérique d’un monde physique est par définition imparfaite.

Le monde du numérique est celui du discontinu, du codé, alors que le monde du physique est celui de l’analogique, de la continuité.

XNuancier PantonePrenons l'exemple simple des couleurs. La référence des couleurs dans le monde numérique est le guide Pantone, qui comprend plus de 2000 couleurs. 2000, c’est beaucoup, mais c’est microscopique par rapport à l’infinité des couleurs différentes que l’on peut rencontrer dans la nature.

Réconcilier le monde physique et le monde numérique, ce n’est pas chercher une identité parfaite entre les deux, par définition impossible. C’est faire en sorte que la représentation numérique soit suffisamment proche du monde physique pour répondre aux usages que l’on souhaite en faire. La définition d’une photo utilisée pour une page Web n’aura pas besoin d’autant de pixels que celle utilisée pour une affiche urbaine de 4m x 3m.

XRéconciliations numériques - Mondes

J'ai choisi deux exemples, les inventaires et les jumeaux numériques.

Les entreprises suivent l’état des stocks dans leurs entrepôts et leurs magasins dans le monde numérique. Au fil du temps, il se produit des divergences de plus en plus fortes entre le monde physique et son image numérique, divergences liées à des vols, des pertes ou de la casse. Ceci oblige les entreprises à fermer ces lieux pour réaliser un inventaire physique, un comptage des objets dans les magasins et à… réconcilier le physique et le numérique en mettant à jour les données dans l’image numérique du monde réel.

Dans un billet récent, j’ai présenté les solutions et outils permettant de construire un jumeau numérique d’une installation physique. 

L’installation physique est gérée au plus près par des solutions adaptées, de type SCADA. On envoie dans le jumeau numérique une copie des données utilisées par le SCADA pour créer des modèles numériques de gestion et simulation de ces mondes physiques.

Pour un jumeau numérique, le défi est double: réduire les décalages entre le monde physique et le SCADA, puis entre le SCADA et le jumeau numérique.

 

Réconcilier équipes bureaux et équipes terrain

XDivorce Terrain - BureauDans trop d’entreprises, les divorces entre les équipes bureaux et les équipes terrain sont plus nombreux qu’on ne le pense. Les équipes bureaux, bien installées dans leurs locaux confortables et climatisés, sont loin de la réalité des mondes physiques des chantiers, des usines avec leurs nuisances sonores ou de météo inclémente. 

La France est hélas un des pays où le décalage entre ces deux mondes est le plus fort. Cela commence dès l’école, avec les formations “nobles” vers les métiers du tertiaire et les formations “voies de garage” vers les métiers manuels. Je salue les efforts actuels du gouvernement pour valoriser les apprentissages, mais le chemin est encore long avant que le prestige des beaux métiers terrain rejoigne celui des métiers du bureau.

“Ceux qui font, savent”. Cette évidence est souvent méconnue par ceux qui, dans leurs bureaux, “imaginent”, comment le travail devrait être fait sur le terrain. La vision théorique depuis les bureaux n’est jamais conforme à la réalité des activités terrain.

XRéconciliations numériques - personnes

Cette méfiance entre ces deux populations est une source d’inefficacité et de dysfonctionnement dans les entreprises. Trop d’usages numériques sont imposés par les entreprises aux équipes terrain, pour contrôler leurs activités. Dans nombre de mes missions de Transformation Numérique, j’ai croisé des informaticiens qui n’avaient jamais mis les pieds sur le terrain, dans un point de vente, une usine ou un entrepôt.

 

Rôles potentiels des outils numériques dans ces réconciliations

Depuis les débuts de l’informatique dans les entreprises, vers les années 1960, la priorité a été donnée aux équipes bureau:

  • Les premiers usages ont été des applications très structurées, autour des processus comptables, financiers et de paye.
  • À partir des années 1980-1990, les outils universels, bureautiques, se sont diffusés massivement auprès de toutes les personnes dans les bureaux. Ils sont complétés par des outils Low-Code ou No-Code, dont l’ancêtre était Excel.

Plus récemment, des outils structurés ont été mis entre les mains des équipes terrain. Pour l’essentiel, ce sont des applications qui permettent de contrôler leurs activités, comme on l’a vu plus haut.

Situation actuelle

Ce tableau à quatre cases résume la position actuelle du numérique dans les entreprises.

Xréconciliations - structuré:non struct & cols blancs FLW

  • 80 % des investissements sont réalisés dans la colonne Equipes Bureau.
  • Les investissements pour les équipes terrain restent faibles; ils sont concentrés sur des usages structurés de contrôle.

Êtes-vous capable de citer le nom d’une solution numérique au service des équipes terrain qui soit aussi connue que Salesforce, SAP ou Office 365? La réponse est non, ce qui montre bien à quel point ce domaine du numérique pour les équipes terrain est en retard dans toutes les entreprises.

Il y a dans ce tableau un gigantesque “trou dans la raquette”: les outils universels, No-Code et Low-Code pour les équipes terrain brillent par leur absence.

Une case vide, à remplir

Les outils universels pour les équipes bureaux, traitement de texte, tableur, agenda partagé ou messagerie électronique ne sont absolument pas adaptés aux attentes des équipes terrain.

Google, avec Workspace, Microsoft avec Office 365 ont essayé de convaincre dirigeants et DSI qu’il fallait à tout prix déployer ces outils bureautiques pour les équipes terrain. Ces deux éditeurs ont construit des offres “lite”, plus économiques pour eux. Peine perdue, les taux d’usages de ces outils bureautiques par les équipes terrain restent très bas, dans toutes les entreprises.

Il restait donc à inventer les outils universels dont les équipes terrain ont vraiment besoin. 

Avec WizyVision nous avons relevé ce défi et fait le pari que les ingrédients du succès sont:

  • L’accès par un smartphone.
  • Mettre les photos au cœur des logiciels.
  • Permettre de rajouter des commentaires vocaux.
  • En pratique: tuer les formulaires textes dont toutes les équipes terrain ont horreur.

Xréconciliations - structuré:non struct & cols blancs avec WizyVision

Sur ce nouveau graphique, WizyVision devient une réponse universelle aux attentes des équipes terrain.

Je propose de nommer Frontique ces outils universels terrain, le pendant de la bureautique des équipes bureau.

 

Les solutions frontiques, au service de la réconciliation numérique

Aujourd’hui, les entreprises disposent pour la première fois de tous les outils numériques nécessaires pour réconcilier équipes terrain et équipes bureau. 

Les solutions frontiques, comme WizyVision, facilitent de nombreuses réconciliations:

  • XAdS DPC Woman in bakery with smartphone S 492208967Réconciliation des équipes terrain avec les outils numériques. Comme l’explique très bien Gilles Roux, DSI de l’entreprise de distribution Schiever dans cet entretien, les équipes terrain acceptent vite des outils pensés pour eux. Je cite: “L’approche proposée par Wizy.io a tout de suite séduit les utilisateurs pilotes en magasins car les solutions développées reposent sur la prise de photos et des extractions d’information directement à partir de ces photos.”
  • Réconciliations entre équipes terrain et bureaux. La possibilité pour les équipes terrain d’échanger directement à partir de leur smartphone avec les personnes au siège valorise leur travail et crée des liens positifs entre ces deux populations.
  • Réconciliations entre équipes terrain et solutions numériques existantes. Toutes les fonctionnalités de WizyVision sont ouvertes par API. Ceci permet aux équipes terrain d’échanger dans les deux sens avec les outils numériques en place. Un exemple simple: à partir d’une photo de l’équipement sur lequel il doit intervenir, une personne de maintenance peut recevoir immédiatement sur son smartphone les informations pertinentes, relatives à ce seul équipement spécifique, comme les dernières interventions réalisées.

J’ai la faiblesse de croire que ce tableau des options disponibles peut rendre beaucoup de services dans toutes les entreprises et faciliter ces réconciliations.

Il n’y a pas de copyright! Vous pouvez le diffuser, massivement.

 

Just one more thing…

Illettrisme? L'incapacité pour une personne à comprendre un texte qu’elle lit.

L'illettrisme est un fléau mondial. Comme le montre cette étude, il touche 48% de la population mondiale.

XChildren unable to read 48%

En France, on estime que 3 millions d’adultes sont illettrés.

Il ne faut pas confondre analphabétisme et illettrisme:

  • Une personne analphabète ne connaît pas l’alphabet.
  • Une personne illettrée sait reconnaître les lettres, mais ne comprend pas un texte.

XAdS DPC Partition musicale S 39766734Pour illustrer cette différence, prenons l’exemple de la musique. Comme une majorité de personnes ayant suivi des cours de solfège je suis capable de placer sur une partition musicale un do, un sol ou un fa.  Je suis par contre un illettré musical et incapable de “lire” cette partition. J’ai beaucoup d’admiration pour mes amis musiciens qui se mettent au piano et "déchiffrent" une partition.

48% d'illettrés dans le monde, c’est environ 3 milliards de personnes adultes, dont 2 milliards travaillent, toutes dans des équipes terrain.

Cette situation correspond à l’une des plus dramatiques fractures numériques d’aujourd’hui.

Les solutions numériques existantes, toutes à base de texte, sont inutilisables par ces deux milliards de travailleurs illettrés.

Il y a quelques mois, j’avais publié un billet sur les quatre principales fractures numériques.

À l'époque, je n'avais pas connaissance de cette étude sur l'illettrisme. 

Ceci m’oblige maintenant à en ajouter une cinquième:

Les personnes illettrées qui ne peuvent pas utiliser les solutions informatiques existantes qui sont toutes basées sur le texte et l’écriture.

Quand nous avons créé WizyVision, cette dimension illettrisme n’était pas sur notre radar. Cette prise de conscience nous a amenés à devenir “entreprise à mission”:

Réconcilier le monde des illettrés avec le numérique: permettre à toute personne illettrée de rentrer dans le monde numérique professionnel.

XAdS DPC Lascaux S 248897431Avant l’écriture, l’humanité communiquait en utilisant l’image et la voix. Nous en avons un exemple magnifique en France avec la grotte de Lascaux.

WizyVision, qui s’appuie sur l’image et la voix, permet de revenir aux fondamentaux de la communication humaine!

On m’a souvent fait la critique suivante: “vous profitez des défaillances du système éducatif mondial”.

Oui, il est scandaleux que la moitié de l’humanité soit illettrée.

Oui on peut se poser des questions sur l’efficacité de l’UNESCO, qui existe depuis 50 ans.
Oui, mais on ne peut pas attendre que ces milliards de personnes deviennent capables de lire pour les faire rentrer dans l’ère du numérique.

Chez WizyVision, nous sommes fiers d’avoir construit la première plateforme numérique moderne qui permet d'ouvrir la porte du numérique à la moitié de la population des equipes terrain dans le monde.

 

Résumé: réconciliations numériques et espoirs

Jusqu'à présent, les progrès exponentiels des performances des outils numériques ont été utilisés en priorité pour les équipes bureaux, dans leurs activités structurées et bureautiques. Pour ces équipes bureaux, les solutions sont aujourd’hui en avance sur les usages et ce décalage s’accroît tous les jours.

À l’inverse, dans une majorité d’entreprises, les travailleurs terrain restent les parents pauvres de la transformation numérique.

XAdS DPC Espoir 3 travailleurs S 243803557Je souhaite aujourd’hui porter un message positif, un message d’espoir.

Toutes les personnes qui travaillent, dans les bureaux et en première ligne, illettrées ou pas, peuvent maintenant collaborer et devenir acteurs de la transformation numérique de leur entreprise, pour l’ensemble de leurs activités.

La bureautique, portée dans les années 1980 à 1990 par l’arrivée des PC et de logiciels tels que Word et Excel, a été le catalyseur de la diffusion du numérique pour les équipes bureaux.

La frontique, portée par les smartphones et des logiciels comme WizyVision qui s’appuient sur l’image et la voix, peut et doit devenir à partir de 2023 le catalyseur de la diffusion du numérique pour tous les collaborateurs sur le terrain.

Dans un monde où les nuages noirs de la guerre, du déréglement climatique et de l’inflation sont omniprésents, cela fait du bien de pouvoir porter un message aussi fort, aussi positif.

 


Jumeaux numériques : la France du Numérique qui gagne

 

Xio-base annonce biarritzJeudi 22 septembre 2022, j’ai eu le plaisir de participer à la journée organisée à Biarritz par Teréga Solutions pour présenter leur solution numérique io-base.

Avec GRTGaz, Teréga est l’un des deux grands acteurs français du transport de gaz, sujet au combien stratégique en ce moment! Les installations gérées par Teréga représentent plus de 5 000 km de tuyaux de transport de grandes dimensions, à haute pression.

XTeréga stockage lussagnet gaz STeréga est aussi, comme Storengy, un acteur clé du stockage de gaz, avec comme principal site celui de Lussagnet, dont l’origine remonte aux gisements de gaz de Lacq. Lussagnet dispose d’une capacité de stockage de 3GNm3.

Teréga a démarré en 2017 une exceptionnelle et très rapide Transformation Numérique, que j’ai eu le grand honneur d’accompagner. Comme toute Transformation Numérique moderne, elle s’appuie sur l’usage intensif des Clouds Publics, AWS et GCP dans le cas de Teréga.

Très rapidement, les dirigeants de Teréga ont décidé que les infrastructures physiques de transport et stockage de gaz devaient rester à 100% déconnectées du Cloud et d’Internet. Toute cyberattaque réussie sur ces infrastructures physiques pourrait entraîner la mort de nombreuses personnes.

La démarche de construction d’un jumeau numérique c'est imposée comme la seule réponse solide et pérenne à ces dangers.

La solution io-base, développée au début pour les usages internes de Teréga, est ensuite devenue un produit numérique, commercialisé par la filiale Teréga Solutions.

Dans ce billet, je vous propose de:

  • Rappeler les principes des jumeaux numériques.
  • Comprendre les avantages de la solution io-base.
  • Découvrir quelques premiers usages d’io-base.
  • Voir comment la France peut s’appuyer sur io-base pour devenir un leader européen et mondial des solutions de jumeaux numériques.

 

Jumeaux numériques : principes de base

Le principe du jumeau numérique est simple: il s’agit de construire une “image numérique” d’une installation physique.

Ce schéma en présente les principaux composants.

XPrincipe Jumeau numérique

Sur la partie gauche, j’ai représenté l’environnement physique:

  • Des équipements à piloter: la variété de ces installations est grande.
    • Installation de transport et de stockage de gaz, d’eau ou d’électricité.
    • Hôpitaux et établissements de santé.
    • Réseaux ferroviaires ou de métro.
    • Usines de traitement de matières nucléaires.
  • Des informations à saisir. Des capteurs de pression, de vitesse, de vibration… envoient les mesures dans des bases de données. La variété des données, des outils de saisie et le fait que ce sont souvent des technologies numériques très anciennes rendent complexe cette saisie de données.
  • Des logiciels d’analyse de ces données, regroupées sous le nom de SCADA, vont ensuite permettre d’agir sur les installations physiques.
  • La seule manière efficace de protéger ces installations physiques des cyberattaques est de les déconnecter à 100% d’Internet et du Cloud. Une seule porte d’entrée ouverte suffit pour créer un risque majeur. Elles doivent donc impérativement être “on premise”, sur des infrastructures numériques, serveurs, réseaux et objets d’accès qui n’ont aucun lien vers le monde extérieur.

Sur la partie droite, on trouve le jumeau numérique:

  • La flèche verte indique que l’on recopie 100% des données venant de l’environnement physique dans une base de données externe.
  • La flèche rouge montre qu’il est impératif d’interdire tout retour d’information depuis le jumeau numérique vers l’informatique “on premise”.
  • Ce jumeau numérique est construit dans les Clouds Publics, pour avoir accès à toute la puissance de calcul et de stockage dont on a besoin dans les IaaS, Infrastructures as a Service.
  • Le jumeau numérique reçoit aussi les données externes dont on a besoin pour gérer efficacement les installations physiques: météo, demandes des clients et des fournisseurs… Ceci est représenté par la flèche jaune.
  • L’entreprise peut utiliser toutes les ressources logicielles disponibles dans les Clouds Publics en SaaS, Software as a Service, et créer les applications métiers indispensables avec les outils PaaS, Platform as a Service.

Au milieu, j’ai représenté le poste de pilotage des installations physiques:

  • Les personnes responsables de ce pilotage disposent de deux écrans, l’un relié au SCADA, l’autre au jumeau numérique.
  • Ces deux écrans sont totalement indépendants: aucune donnée ne peut passer de l’un à l’autre.
  • L’écran du jumeau indique les opérations à réaliser sur les installations physiques. La personne utilise ensuite l’écran relié au SCADA et aux équipements pour exécuter les opérations nécessaires.

 

Les apports de io-base aux jumeaux numériques

Cette journée io-base du 22 septembre 2022 avait pour objectif de démontrer que cette solution numérique avait atteint un niveau de maturité suffisant pour pouvoir être déployée dans toutes les entreprises ayant besoin d’un jumeau numérique, et elles sont nombreuses!

Objectif réussi.

Teréga Solutions avait construit une maquette de démonstration pour simuler le pilotage d’une installation fournissant des énergies renouvelables, éoliennes et solaires.

Xio-base maquette éolienne + panneau solaire

Sur cette maquette, on trouve, de bas en haut:

  • La partie réseau qui communique avec les installations physiques.
  • La “box” Indabox, l’innovation technologique inventée et brevetée par Teréga Solutions. Elle comporte trois composants physiques indépendants:
    • Un connecteur qui capte les données venant des installations physiques.
    • Un boîtier qui fait office de “diode numérique” en permettant le passage de données dans un seul sens, du physique vers le jumeau numérique.
    • Un connecteur qui envoie les données vers le jumeau numérique.
    • C’est Indabox qui garantit que la flèche rouge sur mon schéma d’un jumeau numérique est bien protégée.
  • La partie réseau qui communique vers le jumeau numérique.
  • En haut, un panneau solaire et un ventilateur utilisés pour simuler les sources d’énergies renouvelables.

Avec Indabox, Teréga propose une solution unique au monde qui sécurise parfaitement les échanges entre les installations physiques et les jumeaux numériques.

Xio-base jumeau numérique éolienne + solaireSur ce graphique, produit en temps réel par le jumeau numérique, on visualise la production d’énergie par les éoliennes et les panneaux solaires. Il suffisait de passer sa main devant le panneau solaire pour voir immédiatement la production d’énergie se réduire.

J’ai une excellente nouvelle pour toutes les entreprises qui gèrent des infrastructures physiques critiques qu'il faut impérativement sécuriser: elles peuvent maintenant créer leur jumeau numérique en toute confiance.

Quand la France innove dans le numérique, je suis vraiment très heureux de pouvoir en parler et en faire la promotion.

 

Importance de la logique d’indépendance dans les architectures numériques

Les lecteurs de mon blog sont familiarisés avec le modèle B I S D que j’utilise depuis de nombreuses années:

  • I = Infrastructures
  • B = Usages cœur métier (Business)
  • S = Usages Support, universels
  • D = Données

XBISD Indépendances Dans la logique de ce modèle, je milite aussi pour créer une indépendance aussi forte que possible entre:

  • Les infrastructures et les données.
  • Les usages et les données.

C’est ce que j’ai représenté sur ce schéma.

La création d’un jumeau numérique confirme à quel point cette double démarche BISD et indépendances est au cœur des architectures numériques modernes.

Que ce soit dans l’environnement industriel ou dans le jumeau numérique, ces indépendances infrastructures, données et usages permettent de créer des jumeaux numériques pour tout type d’entreprise, dans toutes les configurations envisageables.

Quand Indabox transmet les données depuis le monde industriel vers le jumeau numérique, elle ne fait aucune hypothèse sur les solutions techniques utilisées pour gérer les données dans le jumeau numérique.

XJumeau numérique - indépendances

Ces données, une fois disponibles dans le jumeau numérique, pourront être utilisées pour des dizaines de cas d’usages différents, que l’on n’a pas à définir à l’avance.

C’est ce que l’on va découvrir dans les paragraphes suivants.

 

Jumeaux numériques au service de la Frugalité Numérique

L’objectif initial de Teréga en créant son jumeau numérique était de sécuriser ses infrastructures industrielles, et cela reste un objectif prioritaire.

Très vite, Teréga a aussi entrepris une démarche ambitieuse de frugalité numérique et, plus généralement, de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.

Xdominique mockly S biarritzDans son intervention pendant cette journée, Dominique Mockly, PDG de Teréga, a présenté les objectifs très ambitieux de l’entreprise dans ces domaines pour 2050:

  • Teréga 100% décarboné.
  • 100% du gaz transporté décarboné.
  • Et bien sûr, le numérique est indispensable pour réussir ces deux défis.

Les données transmises au jumeau numérique permettent maintenant à Teréga de suivre tous ses usages et d’améliorer immédiatement la frugalité des installations industrielles existantes. Cet usage au service de la frugalité numérique n’était pas prévu au départ, mais a été rendu possible par la mise disposition des données dans le jumeau numérique.

Xio-base daniel widera et emilie boucher SDans leur intervention qui a suivi, Daniel Widera, Directeur Transformation, Digital et Performance chez Teréga et Emilie Bouquier, Directrice de la Business Unit Multi-énergie et Digital de Teréga Solutions ont présenté les résultats impressionnants obtenus dans la réduction de la consommation d’énergie des infrastructures serveurs et réseaux de Teréga: 96%!

Sur le même sujet de la frugalité numérique, ou plutôt de la sobriété numérique pour utiliser leur vocabulaire, un représentant du CIGREF (Club Informatique des Grandes Entreprises Françaises) a fait le point des travaux de leur groupe de travail sur ce thème. Un nouveau rapport, en complément de celui déjà produit en 2021, devrait être publié rapidement.

XCIGREF Sobriété Numérique 100 bonnes pratiques

La suite logique de cette réunion me paraît évidente: 100% des entreprises du CIGREF qui gèrent des infrastructures industrielles, et elles sont nombreuses, peuvent déployer en 2023 un jumeau numérique en utilisant la solution française io-base proposée par Teréga Solutions!

 

Exemples d’usages des jumeaux numériques

Deux tables rondes ont clôturé la matinée.
La première était consacrée aux usages de la solution io-base. J’ai choisi de parler de deux des cas présentés.

XIo-base table ronde usages

Raphaël Di Pace est directeur de projets chez IDEC Groupe. Ils installent des panneaux solaires sur les toits des entrepôts logistiques qu’ils construisent. io-base sera utilisé pour gérer et commercialiser la production d’électricité par ces installations.

Bernard Plano est maire de Lannemezan et Président de ESL, Energies Services Lannemezan, fournisseur de gaz, d’électricité et d’eau pour sa ville. io-base sera utilisé pour optimiser, mesurer et réduire les consommations dans ces trois domaines. Comme il l'a déclaré: “tous les maires de France sont concernés”. 

Et un beau marché de plus pour io-base!

 

Un écosystème de partenaires technologiques pour io-base

Teréga Solutions a fait le choix intelligent de créer un écosystème de partenaires technologiques pour accompagner la croissance des activités autour d’io-base.

Plusieurs d’entre eux ont participé à la deuxième table ronde, dont:

Xio-base table ronde technologique participants

  • AWS, le Cloud Public utilisé pour le jumeau numérique. C’est un choix logique, quand on connaît l’avance d’AWS dans le domaine des usages industriels des Clouds Publics par rapport à ses grands concurrents.
  • MP Data, spécialiste des solutions de gestion d’installations industrielles dans le secteur de l’énergie. Un des cas d’usages concerne les fermes d’éoliennes. La casse d’une pale se traduit par une immobilisation de plusieurs mois. Il existe de nombreux capteurs sur ces installations, mais les données ne sont pas utilisées. Avec io-base, il est possible de faire de la maintenance préventive dans le jumeau numérique et d’éviter ces pannes en anticipant les réparations nécessaires.
  • Yogosha est un acteur innovant du monde de la cybersécurité. Ils font travailler des “hackers éthiques" pour tester la robustesse des solutions numériques. Teréga Solutions utilise ses services. C’est une bonne assurance qualité pour les clients potentiels de io-base! 

 

Quels potentiels pour la France et l’Europe, immédiatement

Vous l’avez compris, construire des jumeaux numériques est urgent et indispensable pour protéger toutes les organisations dont l’attaque de leurs installations techniques par des cybercriminels pourrait avoir des conséquences dramatiques pour la vie de leurs clients ou des populations.

Avec io-base, la France dispose d’une solution innovante, unique au monde et opérationnelle qui permet de construire en toute sécurité des jumeaux numériques.

Je vois trois priorités pour l’année 2023:

  • Les entreprises qui gèrent de grands réseaux de transport d’énergie, gaz, électricité, pétrole…
  • Toutes les organisations qui gèrent la distribution de l’eau en France. À côté des géants du secteur, il y a des centaines de petites entreprises ou de mairies qui font ce métier et n’ont ni les compétences ni les ressources pour protéger efficacement leurs installations contre des cybercriminels de plus en plus performants.

Xads dpc digital twin hospital S 383178062

  • Et … les hôpitaux! Il y a plus de 1500 établissements hospitaliers en France, et aucun, j’insiste, aucun, n’est aujourd’hui capable d’isoler efficacement ses installations opérationnelles auxquelles sont reliés les personnes soignées. Combien faudra-t-il de morts avant que l’on prenne les décisions qui s’imposent?

Face à l’urgence et à la gravité des menaces qui pèsent sur ces milliers d’installations industrielles, je propose que tous les organismes publics qui ont le pouvoir d’agir dans ce domaine, ministères, ANSSI et autres, changent immédiatement leurs positions sur ces sujets et décrètent que:

  • Tous les systèmes informatiques qui gèrent les infrastructures industrielles sont déconnectés à 100% d’Internet et du Cloud. À 100% et pas à 99%!
  • La construction d’un jumeau numérique dans les Clouds Publics opérationnels aujourd’hui est possible et encouragée. L’anathème porté par trop de responsables politiques français contre les Clouds Publics sous le prétexte idiot qu’ils sont américains doit cesser, et vite.
  • La solution française io-base est utilisée pour tous ces jumeaux numériques, pour garantir l’inviolabilité des informatiques industrielles.

Tout ceci est possible, dès 2023, en utilisant les technologies et solutions numériques existantes sur le marché.

Dans mon billet de blog “j’ai mal à mon Europe du Numérique”, publié fin 2021, j'ai identifié sept DC2E (Digital Commando of Excellence in Europe), domaines dans lesquels l’Europe et la France doivent concentrer leurs efforts.
Les jumeaux numériques sont en quatrième position dans cette liste.

Je reviens de cette journée io-base à Biarritz encore plus optimiste sur la possibilité pour la France de devenir un leader mondial du numérique dans la construction des jumeaux numériques.

L’avance prise par la France dans ce domaine peut ensuite s’exporter dans… 100% des pays du monde. Ils ont tous, absolument tous, les mêmes défis urgents de sécurité à résoudre.

Réussir cette percée technologique spectaculaire dans le monde numérique ne demande pas d’investissements qui se mesurent en milliards d’euros et dizaines d’années. Toutes les solutions sont disponibles pour passer à l’action, dès 2023.

AdS DPC Change mind set Cloud 315679727La seule chose qui manque, mais c’est hélas la plus difficile à rencontrer, c’est le courage politique des décideurs en France.

Pour cela, ils doivent remettre en question des dogmes dangereux et démodés sur ce que sont les bonnes pratiques en matière de sécurité numérique des organisations.

Est-ce que je serai écouté?
Est-ce que je serai entendu?

Est-ce que les idées simples et opérationnelles que je propose aujourd’hui seront mises en œuvre?

 


Frugalité Numérique: les usages

 

XCitroën AMI CargoJ’ai déjà publié sur ce blog plusieurs billets sur le thème de la Frugalité Numérique. Ils traitaient tous des infrastructures numériques, qui consomment de l’énergie et des matières premières:

J’ai aussi publié deux billets plus généraux sur les technologies et la planète:

Il y a quelques jours, le Président Emmanuel Macron a parlé de “La fin de l’abondance et de l’insouciance”. Ceci m’a donné l’envie de revenir sur ce que peut faire le numérique pour répondre à ces préoccupations.

Ce nouveau billet aborde le thème des usages numériques, des applications. 

Ces usages ne consomment pas directement de l’énergie, mais mettent en œuvre des infrastructures qui, elles, consomment énergie et matières premières.

Comme la majorité de mes textes, je me concentre sur les usages professionnels, domaine dans lequel j’ai une raisonnable compétence. Je n’aborderai pas le sujet des usages personnels.

Je m’adresse donc aux dirigeants, aux DSI et à tous les collaborateurs d’une entreprise pour les aider à mieux comprendre comment ils peuvent avoir une utilisation efficace du numérique tout en ayant un impact positif sur la planète.

 

Frugalité ou Sobriété

XAdS DPC Sobriété vs Croissance S 65326193Faut-il parler de frugalité numérique ou de sobriété numérique? Deux camps se livrent un combat “à mort” pour savoir quelle est la bonne expression!       

Cet article récent, août 2022, compare les deux expressions.

Il fait référence à un texte de 2019 d’Hervé Chaygneaud-Dupuy. J’aime bien la manière dont il différencie ces deux concepts, très proches. Je cite:

 La sobriété c’est l’économie des ressources dans une logique de remise en cause volontaire de la société de consommation. C’est avant tout une démarche d’ascèse personnelle.”

“La frugalité c’est la capacité à faire fructifier les ressources dont on dispose sans en abuser. C’est la conception d’un système économique viable et durable à la manière dont est conçue l’économie jugaad des indiens.”

Chacun de nous choisit l’expression qui lui paraît la plus pertinente. De mon côté, j’ai une préférence pour la frugalité, que je perçois comme moins punitive.

Sobriété ou frugalité numérique, l’important ce ne sont pas les mots choisis, mais les actions que les entreprises mettent en œuvre pour réduire leurs impacts carbone liés au numérique.

 

Frugalité Numérique en 2022 : des discours nuls, aberrants, dangereux

Je suis atterré quand je lis ou entends ce qui se dit sur la Frugalité Numérique. C’est du grand n’importe quoi!

Des personnes, des associations ont un a priori fort, le numérique est mauvais pour la planète. Elles s’expriment pour jeter l’anathème sur le numérique et démontrer que “moins de numérique, c’est bon pour la planète”.

Je vais l’illustrer par cette vidéo d’une conférence donnée devant des étudiants par l’une des grandes vedettes de la défense de la planète, Mr Jean-Marc Jancovici.

Sa réponse à une question sur le télétravail (1h 23), c’est une critique des usages vidéos d’Internet, considérés comme des pertes de temps: Netflix, porno, YouTube… C’est un grand moment… de bêtise.       

Regarder un film sur Netflix, c’est meilleur pour la planète que d’acheter un DVD que l’on regardera le plus souvent une seule fois.

Tout est dit dans cette phrase méprisante: " Dans le digital, on va trouver essentiellement des gadgets”.

C’est un message dangereux, faux et qui fait partie de ce grand mouvement de rejet de l’innovation et du progrès.

Ce graphique illustre parfaitement les absurdités qui sont dites sur la nocivité du numérique.

XDifférentes mesures CO2 30 minutes Netflix

Il donne les évaluations d’émissions de CO2 correspondant à la visualisation d’une vidéo de 30 minutes sur Netflix.

Le “célèbre” Shift project français y est cité deux fois:

  • Sa première évaluation, encore trop souvent reprise, annonçait 16 kg de CO2!
  • Devant la levée de boucliers des scientifiques qui démontrent l’absurdité de ce chiffre, ils ont “révisé” leurs calculs pour arriver à 2 kg, huit fois moins.
  • Comme le montrent les chiffres plus sérieux de grands pays et de l’UEA (Energy Agency), les chiffres réels sont beaucoup plus bas.
  • Dans le billet de mon blog sur les réseaux, référencé plus haut, j’ai montré, par des calculs basés sur des chiffres fiables, qu’une heure de vidéo Netflix consomme l’équivalent de deux watts.

Vous comprendrez pourquoi je ne fais aucune confiance au Shift Project: les chiffres qu’il publie sont biaisés et suspects de fortes erreurs.

XJournées été écologistesJ’étais sur le point de terminer ce billet quand j’ai lu avec effarement cette déclaration faite durant les journées d’été des écologistes à Grenoble, fin août 2022. Je cite:

40% de ce que l’on peut émettre pour respecter les limites planétaires sont consommées par le seul numérique

Toutes les études sérieuses sur le sujet chiffrent la part du numérique dans le changement climatique entre 4% et 6%. C’est déjà beaucoup, mais 40%!!

Ce qui est scandaleux, gravissime, inacceptable, c’est que ce chiffre ridicule est annoncé par un représentant de haut niveau du ministère de l’Environnement, énarque, Mr Thomas Cottinet.

Je ne connais pas Thomas Cottinet, mais prononcer de telles âneries devant des responsables politiques, en s’appuyant sur la crédibilité que lui donne son poste, c’est une faute professionnelle majeure.

Ce qui est dramatique, c’est que ce chiffre va être repris avec délectation par tous les pseudoécologistes antinumériques pour “démontrer” que le numérique, c’est la pire des choses pour la planète. Comme “fake news” climatique, difficile de faire pire.

Il serait sain pour l’avenir de la France qu’on lui trouve immédiatement un autre poste dans le secteur public, mais dans un domaine qui n’a aucun lien avec l’écologie ou le numérique.

 

Rappel: quelques chiffres clés sur les infrastructures

Ce sont les infrastructures qui consomment de l’énergie et des matières premières, pas les usages.

Ce double graphique, publié en 2022 par l’ARCEP, est un bon résumé des impacts respectifs des différents composants d’infrastructures, objets d’accès, réseaux et centres de calcul.o

XPart énergie Objets d'accès serveurs réseaux

Le diagramme circulaire évalue l’empreinte carbone de ces trois briques.

  • Les objets d’accès: ils représentent plus des ¾ de l’empreinte carbone du numérique.
  • Les réseaux: autour de 8% du total.
  • Les centres de calcul: environ 15% de l’empreinte carbone.

L’histogramme donne une autre information fondamentale: 

  • L'impact carbone des usages des outils numériques est de l’ordre de 20%, 20% seulement.
  • 80% des impacts carbone sont liés à la fabrication des équipements numériques.

Il faut bien comprendre les implications majeures de ces chiffres. Un outil numérique qu’une entreprise achète et n'utilise pas ou très peu a déjà eu 80% de ses impacts sur la planète avant même son premier usage!

Dit autrement: si demain une entreprise arrêtait 100% de ses usages numériques, elle ne réduirait que de 20% ses impacts carbone liés au numérique si elle gardait toutes ses infrastructures en l’état. 

S’il fallait passer UN seul message aux dirigeants et collaborateurs d’une entreprise concernant les outils numériques d’infrastructures, il serait: “Faire durer au maximum la durée de vie utile d’un équipement numérique doit être votre priorité absolue en matière de frugalité numérique”.

Les principales raisons qui doivent être prises en compte pour accepter un éventuel renouvellement d’un outil numérique sont:

  • XADS dpc broken keyboard S 328065799Une panne majeure qui le rend inutilisable. La facilité de réparation des outils doit avoir un poids majeur dans les critères d’évaluation au moment de l’achat. La lutte contre l’obsolescence programmée est un combat à mener en permanence.
  • Des performances qui ne sont plus en phase avec les véritables besoins et peuvent avoir un impact négatif sur l’efficacité des collaborateurs. La bonne nouvelle: c’est de moins en moins le cas. La croissance exponentielle des performances des outils numériques fait que la majorité est surdimensionnée pour la majorité des usages et des collaborateurs. Qui aura vraiment besoin, après les annonces le 7 septembre 2022 par Apple des nouveaux iPhone? La réponse est simple: 0% des collaborateurs de votre entreprise.
  • Des impacts forts sur la sécurité numérique. Les progrès réalisés par les cybercriminels sont très rapides et peuvent mettre en péril la sécurité du Système d’Information d’une entreprise si des solutions anciennes ne peuvent plus être protégées contre les attaques les plus récentes. Dans ce domaine essentiel, trop de fournisseurs créent une obsolescence sécuritaire inacceptable.

 

Repenser les usages pour une meilleure Frugalité Numérique

Les usages les plus vertueux: ceux que l’on évite.

Gérer intelligemment les usages numériques, ce n’est pas les rejeter, c’est les optimiser pour avoir un minimum d’impacts sur la consommation d’énergie par les infrastructures numériques.

La majorité des usages numériques professionnels sont bons pour la planète, sous réserve, bien sûr, de  modifier en profondeur les processus pour profiter des potentiels des nouvelles solutions numériques.

Prenons l’exemple simple de la réservation d’un billet d’avion:

  • Il y a 20 ans, il fallait se déplacer dans une agence pour réserver son billet = coût en temps et en énergie.
  • Cette agence physique consommait de l'énergie pour son éclairage et son chauffage.
  • On imprimait sa carte d’embarquement sur un papier, que l’on jetait ensuite.
  • Les nouvelles compagnies aériennes, EasyJet, Vueling et Ryanair, sont nées dans l’ère numérique et ont mis en œuvre des processus qui éliminent toutes ces étapes physiques.
  • Aujourd’hui, toutes les compagnies de transport, aérien, ferroviaire, autobus ou automobile ont basculé dans ce modèle Internet. Ce n’est pas la planète qui s’en plaindra.

J’ai choisi d’illustrer mon propos par trois cas d’usages différents.

 

Cas d’usage un: solutions de communication et de collaboration

Les usages universels de tous les cols blancs s’appuient sur les outils bureautiques : écrire, calculer, communiquer…

En 2007 est arrivée la première solution bureautique construite dans le Cloud, Google Apps, devenue depuis Google Workspace.

Ce schéma résume l’avant et l’après des échanges entre quatre personnes qui souhaitent rédiger ensemble un document.

XEmail vs Cloud Collaboration

  • Dans l’ancien monde, précloud, chaque personne envoyait par courriel aux trois autres la version du document Word qu’elle avait rédigée. Chaque destinataire apportait ses modifications et renvoyait le document aux trois autres. En quelques jours, des dizaines de versions différentes de ce document étaient stockées dans les fichiers individuels des personnes, sur leur poste de travail.
  • Dans le monde Cloud actuel, il n’existe qu’une seule version du document. Chaque modification réalisée par l’une des quatre personnes est immédiatement disponible pour les trois autres.

Indépendamment des avantages majeurs de ce mode de travail Cloud en matière d’efficacité et de rapidité, ce schéma met clairement les avantages de la démarche Cloud dans la consommation de ressources numériques:

  • Stockage: dans la démarche Cloud, une seule version du document est stockée, partagée. Dans l’ancien monde, chacun avait sur son poste de travail plusieurs versions du même document.
  • Réseaux: dans la démarche Cloud, les seuls échanges qui ont lieu sont les modifications apportées par chaque collaborateur, des flux qui se mesurent en dizaines de caractères. Dans l’ancien monde, des versions entières du document étaient envoyées trois fois, après chaque modification. Les volumes de données échangées sont réduits de plus de 95%.

Il y a hélas encore en 2022 plus de 80% des entreprises et de leurs collaborateurs qui continuent à envoyer des documents de plusieurs Mo en pièces jointes, et à de nombreuses personnes en même temps.

Si l’on souhaite vraiment avoir un impact fort et immédiat au service de la planète dans ses usages numériques quotidiens, il suffit de prendre une décision “simple”: 

En 2023, tout envoi d’un document en pièce jointe d’un courriel est strictement interdit

Seuls sont acceptés les envois de liens vers des documents stockés dans le Cloud. Après dix envois de pièces jointes, un collaborateur recevra un avertissement et devra payer une somme à déterminer pour usage abusif des réseaux et des mémoires sur son poste de travail.

Pourquoi une règle aussi simple, qui concilie efficacité et réduction des impacts du numérique sur la planète est-elle aussi difficile à prendre dans la majorité des entreprises?

Cela fait plus de 15 ans que je travaille en mode collaboratif Cloud…

 

Cas d’usage deux: applications intégrées vs microservices

Ce deuxième cas d’usage est de loin celui qui peut avoir le plus d’impacts positifs sur les impacts de vos usages numériques sur la planète. C’est aussi le plus difficile à mettre en pratique.

Dans l’immense majorité des entreprises, et en particulier les plus grandes, des solutions intégrées, lourdes sont déployées. Les plus célèbres sont bien sûr les ERP de SAP, Oracle, Microsoft et quelques autres fournisseurs.

Je n’analyse pas ici les avantages ou inconvénients des ERP intégrés comme réponses aux attentes des entreprises. Je me concentre uniquement sur leurs impacts sur la planète.

La réponse à cette question est très claire: les solutions intégrées sont les pires pour la planète.

XMaxi ServeursPourquoi? Ce schéma permet de comprendre les défauts majeurs d’une solution intégrée.

  • Pour héberger cette application ERP intégrée, il est nécessaire d'utiliser un ou plusieurs serveurs de grande taille, disposant de fortes capacités de mémoire.
  • Cette application intégrée comporte des milliers de lignes de code. À chaque instant, moins de 1% du code est actif, les 99% restant de code en mémoire consommant de l’énergie sans réaliser la moindre activité utile.
  • Vous trouvez cela satisfaisant pour la planète? Moi, non!

XFrugalité MicroServicesDans une architecture moderne, construite dans des Clouds Publics, les entreprises peuvent construire des applications modernes sous forme de microservices.

Quels sont les avantages de cette démarche microservices?

  • Pour fonctionner, les microservices utilisent des microserveurs, très économes en énergie.
  • Dès qu’un microservice a terminé son activité, il est fermé et le microserveur qui l'hébergeait se libère pour un autre microservice.
  • Le taux d’usage des serveurs est maximal, et peut atteindre ou dépasser 80%.

La disponibilité d’outils “serverless” tels que Lambda chez AWS améliore encore cette efficacité énergétique. 

Comme l’explique très bien ce schéma présenté à la conférence AWS Re-invent en 2021 par Werner Vogels, CTO d’AWS, un outil serverless va automatiquement instancier le serveur optimisé pour chaque application. Le développeur n’a plus le risque de sur-dimensionner ou sous-dimensionner le serveur. Il ne faut pas oublier qu’il est aujourd’hui possible d’instancier un serveur pour des périodes très courtes, qui se mesurent en millisecondes. Conséquence: la consommation de ressources serveur est strictement alignée sur les besoins de l’application.

XAWS Reinvent 2021 - Keynote Werner Vogels - Normal vs Cloud vs Lambda usage

Voilà un “beau” chantier pour les entreprises qui souhaitent vraiment réduire les impacts de leurs usages numériques sur la planète: remplacer les ERP intégrés par des milliers de microservices.

 

Cas d’usage trois: choisir entre différentes régions dans clouds publics

Les grands acteurs du Cloud Public proposent un service à leurs clients permettant de prendre en compte la dimension des impacts carbone.

Pour l’illustrer, j’ai pris l'exemple du service “Region Picker” de GCP de Google.

XGoogle region picker

Vous avez des réglettes qui vous permettent de donner plus ou moins d’importance à trois paramètres:

  • Impacts carbone.
  • Coûts.
  • Latence.

En fonction de vos choix, GCP vous proposera plusieurs zones géographiques pour déployer vos usages.

Les résultats changent en permanence. Il se peut qu’un centre de calcul américain, alimenté par des panneaux solaires, soit meilleur pour la planète quand il fait jour aux États-Unis, si la latence n’est pas une contrainte forte pour une application.

Je vous laisse le soin de trouver des dizaines d’autres cas d’usages qui vous permettront d’avoir un impact positif pour la planète.

 

Interactions infrastructures et usages

Agir sur les usages numériques pour en réduire au maximum les impacts sur la planète, c’est une bonne démarche.

Il pourrait être tentant de se dire que, les usages ne représentant que 20% des impacts carbone du numérique, une diminution de 50% des usages ne réduirait que de 10% les impacts du numérique.

C’est oublier l’essentiel! Les infrastructures numériques n’existent que parce qu’il y a des usages.

XDynamique usages infrastructuresLa boucle d’amélioration usages - infrastructures peut jouer un rôle majeur dans la réduction des impacts du numérique sur le changement climatique. 

Toute réduction des usages entraîne potentiellement une réduction de la demande d’infrastructures. C’est plus facile à gérer dans une démarche moderne de Clouds Publics qui permet de faire que la demande de ressources physiques évolue au même rythme que celle des usages.

Il y a un effet multiplicateur important dans la réduction des usages. Il peut théoriquement atteindre un rapport quatre: 20% pour les usages, 80% pour les infrastructures. Il est plus raisonnable de viser un rapport deux, ce qui serait déjà remarquable.

 

Résumé

Xmail et ampoule 25 wattConsidérer que les usages numériques sont mauvais pour la planète est une aberration. Hélas, cette vision négative des usages numériques est encore trop répandue dans la société française, et en particulier dans une grande partie de la classe politique.

Il existe de nombreux moyens de réduire les impacts carbone des usages numériques, et j’en ai donné quelques exemples.

Encore faut-il avoir le courage de s’attaquer en profondeur à la manière dont sont construites ces applications informatiques, et le courage est une denrée rare par les temps qui courent…


Dirigeants, vos rôles dans la transformation numérique au service des équipes terrain

 

XScénarios équipement équipes terrainDans un billet récent, j’ai abordé la dimension financière de l’équipement numérique des équipes terrain.

J’en reprends uniquement le tableau final, qui donne le coût complet d’une solution frontique, à savoir un smartphone et des applications numériques universelles.

Le coût mensuel par personne est compris entre 8 € et 25 €.

Je terminais en disant que la dimension financière était la plus simple à régler et que les dimensions management sont les plus complexes à régler.

C’est le thème de ce billet.

 

Les défis posés par l’équipement numérique des équipes terrain

Remarque préliminaire: ce que j'écris dans ce billet ne concerne pas votre entreprise !

Chez vous, tout est parfait, impeccable et les équipes terrain disposent des meilleurs outils numériques du monde.

C’est chez les autres que l’on rencontre les problèmes que j’expose ici:

● Dans la majorité des entreprises, les équipes terrain n’ont pas leur mot à dire sur le choix des outils numériques que l’on met à leur disposition.

● Dans la majorité des entreprises, les dirigeants n’ont pas la moindre idée de la réalité des activités des équipes terrain.

● Dans la majorité des entreprises, les équipes informatiques et numériques achètent ou développent des solutions numériques pour les équipes terrain sans faire le moindre effort pour aller sur le terrain et essayer de comprendre quelles sont leurs véritables attentes.

XAdS DPC filling forms S 37816129● Dans la majorité des entreprises, équiper tous les cols blancs d’un PC haut de gamme et d’un smartphone est une évidence quand on refuse trop souvent de fournir aux équipes terrain un smartphone professionnel, les obligeant à utiliser des formulaires papier, en 2022!

Dans toutes ces entreprises, cette fracture numérique entre les cols blancs et les équipes terrain doit cesser, et vite.

Comment ? En demandant aux dirigeants de prendre le problème en main et… de le résoudre.

La bonne nouvelle: c’est possible, rapidement.

 

Démarche Top Down - Bottom Up

La démarche proposée a déjà été suivie avec succès par un petit nombre d’entreprises innovantes.

Elle répond aux quatre défis que j’ai identifiés dans le paragraphe précédent et s’appuie sur un double mouvement, “Top-Down” et “Bottom-up”.

XWIzyVision - Top Down & Bottom Up

Pour la partie Top-down, les équipes dirigeantes ont la responsabilité d’impulser une stratégie claire, avec plusieurs objectifs:

● Faire de la réduction de la fracture numérique entre cols blancs et équipes terrain une priorité.

● Proposer des outils numériques qui encouragent une collaboration entre ces deux populations et rendent plus facile le partage d’information.

● Choisir des outils qui garantissent la pérennité des solutions proposées et évitent la prolifération d’un “Numérique Fantôme” comme on l’a connue pour les cols blancs.

● Mettre la sécurité et la protection des données au cœur des préoccupations.

Pour les équipes terrain, la démarche bottom-up répond à d’autres objectifs:

● Accepter le fait que les solutions numériques n’ont pas pour premier objectif de contrôler l’activité des équipes terrain, mais de les rendre plus efficaces dans leurs métiers.

Ceux qui font, savent. Ce sont les équipes terrain qui sont les mieux placées pour déterminer quels sont les outils numériques qui peuvent les aider dans leurs activités.

● Comprendre que la variété des activités demandées aux équipes terrain est beaucoup plus grande que ne le pensent les dirigeants.

● Instaurer une confiance réciproque entre les équipes terrain et les cols blancs.

● C’est en mettant entre les mains des équipes terrain des outils numériques universels, “frontiques”, qu’elles seront capables d’imaginer les dizaines de cas d’usage simples, à forte valeur ajoutée, qui les aideront dans leurs activités quotidiennes.

 

Les dirigeants acteurs

J’ai identifié quatre familles de dirigeants dont les rôles sont prioritaires pour assurer le succès d’une transformation numérique au service des équipes terrain.

XQuatre familles managers pour équipes terrain

L’ordre dans lequel je les présente n’ai pas dû au hasard; il va du plus important au moins important:

1. DRH, Direction des Ressources Humaines.

2. Directions métiers opérationnels, où travaillent les équipes terrain.

3. DSIN, Direction des Systèmes d’Information et du numérique.

4. DG, Direction Générale.

Par contre, la chronologie de l’ordre des interventions n’est pas la même: DRH, DSI, DG et Directions métiers opérationnels. C’est celui que je vais suivre dans mon analyse.

 

Rôle de la Direction des Ressources Humaines

Quand on parle d’équipes terrain, on fait référence à des personnes. Il est logique que la DRH d’une entreprise soit en première ligne pour orchestrer la disparition de la fracture numérique interne entre les cols blancs et les équipes terrain.

En France, les collaborateurs des équipes terrain, les personnes qui ne peuvent pas télétravailler, représentent environ 60% des salariés. C’est très variable selon les secteurs d’activités.

Faire rentrer les équipes terrain dans le monde numérique, toutes les personnes de ces équipes, quelle que soit leur formation initiale, ou souvent leur absence de formation, c’est investir sur la capacité de ces hommes et de ces femmes à progresser dans leurs compétences et leurs apports à l’entreprise.

C’est l’une des plus belles missions que puisse prendre en charge une DRH innovante.

J’ai participé il y a quelques semaines à un débat organisé par l’UODC, Université ouverte des compétences, qui avait invité Sandra Hazelart, DRH du Groupe Monoprix.

XDRH Monoprix

Avec l’accord total du DG du Groupe, la démarche qu’elle pousse pour prendre en compte les attentes des équipes terrain est exceptionnelle par sa portée et les innovations qu’elle porte.

Gérer les évolutions de carrière, en particulier pour les caissières dont on sait que le nombre va baisser, mettre plus de collaborateurs au contact des clients, équiper 22000 collaborateurs de smartphones sont quelques-unes des actions les plus spectaculaires poussées par Sandra Hazelart.

Les entreprises françaises ont besoin de beaucoup plus de DRH aussi exceptionnelles!

 

Rôle de la Direction des Systèmes d’Information et du Numérique

Quand on parle d’informatique et de numérique au service des équipes terrain, il est essentiel que les équipes de la DSIN soient impliquées dès le début du projet.

Dans le cas des usages frontiques à destination des équipes terrain, leurs rôles sont orientés en priorité vers les infrastructures.

Pourquoi? Les usages seront imaginés dans une démarche bottom-up par les équipes terrain, sans que les équipes de la DSIN n’aient à s’en occuper.

La DSIN doit proposer une plateforme numérique pérenne qui servira de support à tous les usages déployés par et pour les équipes terrain.

XFLW Modèle BISDUne fois de plus, le modèle B I S D (Business, Infrastructures, Support, Données) que je propose depuis des années s’applique très bien pour les usages au service des équipes terrain:

● I = Infrastructures Cloud pour la puissance et la pérennité.

● S = Usages support, ce que sont les applications frontiques.

● D = Base de données indépendante des usages.

● B = Usages métiers, pour des applications métiers spécifiques des équipes terrain.

La DSIN doit garantir:

● La cohérence de tous les usages qui seront imaginés par les équipes terrain.

● Que ces usages ne vont pas générer une nouvelle vague d’informatique fantôme comme cela c’est passé avec les cols blancs.

● Que la solution proposée ne va pas créer un nouveau “silo de données”.

● Que les échanges entre les solutions existantes au service des cols blancs et celles construites pour les équipes terrain seront possibles, chaque fois que nécessaire.

C’est avec tous ces objectifs en tête dès le premier jour et en travaillant en étroite collaboration avec les équipes informatiques et numériques d’entreprises innovantes comme Teréga que Wizy.io a construit la solution frontique WizyVision.

XComposants WizyVisionWizyVision a tout pour répondre aux attentes d’une DSIN:

● Basé sur GCP, le Cloud Public de Google: garantit une puissance sans limites et la possibilité de déployer les solutions sur tous les continents.

● DAC, Digital Asset Center: la seule base de données professionnelle au monde construite pour gérer et sécuriser tous les contenus photos créés par les équipes terrain.

● Frontspace: application mobile au service des équipes terrain.

● ML Studio: permet de construire des applications de Machine Learning en mode No-Code, permettant de reconnaître des objets métiers spécifiques.

● API: toutes les fonctionnalités de WizyVision sont ouvertes par API pour échanger, dans les deux sens, avec les applications existantes.

Oui, il est possible en 2022 à une DSIN de proposer rapidement une plateforme technologique moderne et pérenne qui permet de construire des dizaines de cas d’usages pour les équipes terrain.

 

Rôle de la Direction Générale

AdS DPC Rowing boat S 307629349Il est classique de dire que toute action dans une entreprise doit être initiée par la Direction Générale. Dans la pratique, il est illusoire de demander à une Direction Générale d’être le chef d’orchestre de toute transformation; ils n’en ont matériellement pas le temps.

Sur ce grand chantier de la suppression de la fracture numérique des équipes terrain, comme sur beaucoup d’autres, la DG doit être une facilitatrice et une coordinatrice des actions menées par les dirigeants plus directement impliqués.

 

Rôle directions métiers opérationnelles

Les équipes terrain travaillent dans ces directions opérationnelles, que ce soit dans l’industrie, le transport, la logistique, la distribution, l’hospitalité, la santé, la construction ou l’agriculture.

J’inclus aussi dans les directions métiers les managers de premier niveau, en contact direct avec les équipes terrain. Ce sont eux qui ont le plus de capacité à piloter la transformation numérique opérationnelle des équipes terrain.

Les objectifs de ces directions métiers sont clairs:

● Augmenter les compétences de leurs équipes terrain.

● Accroître leur efficience.

● Accepter que la démarche “bottom-up” soit la plus efficace.

Pour y parvenir, le plus efficace est de mener une première opération d’expérimentation, par échantillonnage:

● Mettre entre les mains d’un groupe le plus représentatif possible de collaborateurs des outils numériques universels frontiques.

● Leur demander de trouver les premiers cas d’usages.

● Faire la synthèse des meilleures pratiques nées sur le terrain.

L’entreprise peut ensuite industrialiser la diffusion des solutions numériques et généraliser les cas d’usage identifiés comme les plus pertinents à l’ensemble des collaborateurs.

Comme le montre ce schéma, de nouveaux cas d’usages naîtront en permanence, au fur et à mesure que les collaborateurs s’approprient ces outils frontiques.

XEtapes équipement FLW

 

Illustration de la démarche sur un cas concret

Pour illustrer cette démarche, je vous propose un exemple concret: une entreprise du secteur de la distribution qui emploie 4000 collaborateurs dans les équipes terrain, répartis entre 150 points de vente, 100 supermarchés et 50 supérettes de centre-ville.

XProjet FLW dans supermarchéQuelles sont les étapes de la phase d’expérimentation de l’équipement numérique des équipes terrain de cette entreprise?

● Sélectionner 20 supermarchés et 10 supérettes, les plus différents possibles en matière de localisation, de taille et de marché.

● Choisir 200 collaborateurs volontaires et motivés, 5% des effectifs, dans ces 30 points de vente, aux profils et activités les plus variés possibles.

● Équiper ces 200 personnes d’outils frontiques de base: un smartphone et une application telle que WizyVision.

● Leur donner carte blanche, pendant 15 jours, pour trouver et documenter des cas d’usages pertinents qui les aideraient dans leurs activités quotidiennes.

● Faire ensuite l’inventaire de toutes les propositions de cas d’usages.

Les chiffres qui suivent sont une estimation, mais ils sont basés sur des réalisations de ce type déjà menées à bien:

● Nombre moyen de cas d’usages proposés par chacun des 200 collaborateurs: 4.

● Nombre total de cas d’usages proposés: 200 x 4 = 800.

● Des cas d’usages similaires seront proposés par ces 200 collaborateurs. En faisant l’hypothèse que le taux de redondance des cas d’usages proposés est de 70%, on aura quand même identifié 240 cas d’usages différents!

Il est alors possible de passer à la phase industrialisation avec la certitude que ce sera un succès pour l’entreprise:

● Equiper les 4 000 collaborateurs avec un smartphone et les cas d’usages pertinents. Selon les métiers, on peut décider:

    ○ D’équiper la personne d’un smartphone individuel.

    ○ De la mise à disposition d’un smartphone partagé, en particulier pour les personnes qui travaillent à tour de rôle sur les mêmes métiers.

● Présenter, par petits groupes, métier par métier, à tous les collaborateurs les cas d’usages proposés. Ce sont les salariés qui ont identifié les cas d’usages qui seront chargés d’en faire la promotion et la démonstration.

● Demander à tous les salariés maintenant équipés de proposer eux aussi des cas d’usages qui n’avaient pas encore été identifiés. Ceci devrait rapidement générer un minimum une centaine de nouveaux cas d’usages.

● À la fin de ce processus en deux étapes, qui peut se réaliser en moins d’une année, 350 applications simples, à forte valeur ajoutée auront été déployées pour les 4 000 collaborateurs, dans les 150 points de vente.

 

Synthèse: réduire la fracture numérique pour les équipes terrain, un beau défi management des 5 prochaines années

Fracture numérique cols blancs FLWIls sont 2 700 millions dans le monde, ils sont dramatiquement sous-équipés en outils numériques, les collaborateurs des équipes terrain vous demandent à vous, les dirigeants, d’enfin penser à eux.
DG, DRH, DSIN, Dirigeants métiers, vous avez une responsabilité forte, une obligation morale devant vous: faire que, d’ici à 2025, il n’y ait plus de fractures numériques entre les cols blancs et les équipes terrain dans vos entreprises.

Ce billet est le cinquième que je publie sur ce sujet essentiel, et voici, en rappel, les quatre premiers:

Problème : après les cols blancs, priorité aux FLW, Front Line Workers.

Comment : après un ordinateur pour chaque col blanc, un smartphone pour chaque FLW.

Pourquoi : fractures numériques.

Finances : coûts des solutions numériques: cols blancs et équipes terrain.

Management : ce billet.

Il ne vous reste plus... qu’à passer à l’action.


Coûts des solutions numériques universelles : cols blancs et équipes terrain

 

XFLW & Woman Office workerCela fait deux ans que je parle dans ce blog des deux grandes populations clientes du Système d’Information des entreprises, les cols blancs et les équipes terrain, les FLW, Front Line Workers en Anglais.

Les outils universels cols blancs, bureautiques, sont massivement déployés depuis les années 1990. Les entreprises investissent “naturellement” pour ces cols blancs sans se poser la question de la rentabilité de cet investissement, jugé indispensable pour que les cols blancs puissent travailler.

À l’inverse, chaque fois que je propose à une entreprise d’équiper les équipes terrain d’outils numériques universels, j’ai droit à la question : quelle est la rentabilité de ce projet?

Je vous propose dans ce billet de comparer les coûts de mise à disposition d’outils numériques universels pour les cols blancs et pour les équipes terrain.

 

Un résumé de l’histoire informatique des entreprises

Comment résumer l’évolution de l’informatique professionnelle depuis ses premiers pas?

J'ai l’ambition de faire en quelques lignes et deux schémas!

Xusages structurés - universels cols blancs FLWSur ce premier schéma, je vous propose une matrice à quatre cases:

● Usages structurés et usages universels.

● Cols blancs et équipes terrain.

La première segmentation est liée à la nature des applications:

● Les usages structurés correspondent à des processus complexes, qui suivent des règles strictes, telles que la comptabilité, la paye ou la facturation. L’automatisation de ces processus structurés a été la priorité des entreprises, et c’est logique.

● Les usages universels, peu structurés, correspondent à des applications dont tout le monde a besoin. Pour les cols blancs, il s’agit d’outils bureautiques pour écrire, calculer, envoyer un courriel, gérer son agenda…

La seconde dimension correspond au profil des personnes:

● Cols blancs.

● Équipes terrain.

J’ai analysé les différences entre ces deux populations dans plusieurs billets de ce blog:

Après les cols blancs, priorité aux FLW, Front Line Workers.

Après un ordinateur pour chaque col blanc, un smartphone pour chaque FLW.

Fractures numériques.

Le deuxième schéma présente le calendrier des grandes dates de l’informatique dans ces deux dimensions, usages et population.

XEvolution informatique Cols Blancs FLW

Ce schéma met en évidence quelques idées fortes:

● L’équipement des cols blancs a précédé celui des équipes terrain.

● Les solutions structurées ont été déployées avant les outils universels.

● C’est la naissance de nouvelles générations d’objets d’accès qui accélère ces évolutions.

Il y a quatre dates clés:

1960: arrivée des premiers ordinateurs universels comme l’IBM 360 et des terminaux à écran 3270 IBM. Ils sont utilisés en priorité pour des applications structurées de gestion.

1990: démocratisation des premiers PC et arrivée simultanée des outils bureautiques tels que le traitement de texte ou le tableur. Microsoft réalise un hold-up sur ce marché avec Windows et Office.

XSteve Jobs with Iphone  12010: les premiers smartphones font leur apparition dans le monde professionnel et des entreprises innovantes commencent à équiper les équipes terrain avec des applications structurées. L’annonce en 2007 par Steve Jobs du premier iPhone restera une date majeure dans l’histoire du numérique mondial.

2020: démocratisation des smartphones dans le monde entier et émergence des premières applications universelles, frontiques, pour les équipes terrain.

L’accélération exponentielle de ces évolutions est confirmée par la réduction des écarts entre ces dates:

● 30 ans entre 1960 et 1990.

● 20 ans entre 1990 et 2010.

● 10 ans entre 2010 et 2020.

 

Cols blancs : coûts bureautiques

Remarque préalable: tous les calculs qui sont faits dans ce paragraphe et le suivant s’appuient sur des hypothèses moyennes raisonnables. Chaque entreprise pourra utiliser ses propres chiffres pour calculer ses coûts en utilisant le même modèle de calcul.

XCoûts outils universels cols blancsPour simplifier les calculs et avoir des chiffres qui sont les plus pertinents possibles pour un maximum d’entreprise, j’ai fait les hypothèses suivantes:

● Tous les cols blancs disposent d’un PC et d’un smartphone.

● La durée de vie d’un PC est de 5 ans et celle d’un smartphone de 3 ans.

● Tous les cols blancs utilisent une solution bureautique cloud, Office 365 de Microsoft ou Google Workspace.

● Les calculs sont faits dans deux situations, hypothèse de base et hypothèse haute.

● Je ne tiens compte que des coûts directs. Les coûts indirects, tels que formation ou support, ne sont pas chiffrés.

● Les coûts réseaux, très variables d’une entreprise à l’autre, d’un pays à l’autre, ne sont pas pris en compte.

Résultat : la mise à disposition de solutions bureautiques pour les cols blancs représente un coût direct mensuel compris entre 61 € et 115 € par personne.

 

Équipes terrain : coûts frontiques

XCoûts outils universels équipes terrainPour les équipes terrain, les hypothèses sont les suivantes:

● Les collaborateurs des équipes terrain sont équipés d’un smartphone.

● La durée de vie d’un smartphone de 4 ans. Le fait que la majorité de ces smartphones soient des modèles “durcis” permet de les garder plus longtemps.

● Pour garantir la sécurité et faciliter leur gestion, tous les smartphones sont équipés d'un logiciel EMM, Enterprise Mobile Management.

● Les collaborateurs des équipes terrain utilisent une solution frontique cloud. J’ai pris comme exemple WizyVision.

● Les calculs sont faits dans deux situations, hypothèse de base et hypothèse haute.

● Je ne tiens compte que des coûts directs. Les coûts indirects, tels que formation ou support, ne sont pas chiffrés.

● Les coûts réseaux, très variables d’une entreprise à l’autre, d’un pays à l’autre, ne sont pas pris en compte.

Résultat : la mise à disposition de solutions frontiques pour les équipes terrain représente un coût direct mensuel compris entre 12 € et 39 € par personne.

 

Comparaison des coûts bureautiques et frontiques

Ce petit tableau de synthèse regroupant les chiffres clés des calculs faits pour les solutions bureautiques cols blancs et les solutions frontiques pour équipes terrain donne un résultat intéressant:

L’équipement bureautique des cols blancs coûte entre 3 et 5 fois

plus cher que l’équipement frontique d’une équipe terrain.

XCoûts universels cols blancs vs équipes terrainCet écart est le plus grand quand on fait le choix des solutions de base, ce qui correspond à la situation la plus fréquente dans les entreprises.

Le paradoxe soulevé au début de ce texte devient encore plus surprenant:

● Les entreprises équipent sans justifications économiques tous les cols blancs de solutions numériques.

● Les mêmes entreprises exigent des justifications économiques pour équiper de solutions numériques les équipes terrain alors que les montants en jeu sont entre 3 et 5 fois plus faibles!

 

Equipement numérique des équipes terrain : principaux scénarios

Vous avez décidé d’équiper vos équipes terrain de solutions frontiques : quels sont les budgets à prévoir?

Pour faire les calculs, j’ai pris pour les coûts la moyenne entre l’hypothèse de base et l’hypothèse haut de gamme.

XScénarios équipement équipes terrainDans ce tableau, je propose trois hypothèses sur la situation initiale:

H1 : les équipes terrain sont déjà équipées d’un smartphone et d’applications structurées. Dans ce cas, le coût additionnel est uniquement celui de l’application frontique.

H2 : les équipes terrain ne sont pas équipées de smartphones et chaque collaborateur reçoit un smartphone individuel. Le coût par personne est celui de la solution complète, smartphone et application frontique.

H3 : les équipes terrain ne sont pas équipées de smartphones et les smartphones seront partagés entre plusieurs personnes. Ce sera le cas dans des entreprises où les horaires de travail exigent que plusieurs personnes occupent successivement les mêmes postes. Le coût par personne est celui de la solution complète, divisé par le nombre de collaborateurs qui partagent le smartphone. L’hypothèse choisie est d’un smartphone partagé en moyenne par trois personnes.

Selon le scénario retenu, le coût par personne pour équiper de solutions frontiques les équipes terrain est compris entre 8 € et 25 € par mois.

Chaque entreprise peut maintenant calculer facilement le bénéfice minimum qu’elle doit obtenir pour justifier cet investissement. Le paramètre souvent utilisé pour ce calcul sera le temps gagné par les collaborateurs des équipes terrain.

 

Résumé

Faire tomber l’alibi financier comme excuse pour ne pas déployer des solutions frontiques auprès des équipes terrain, c’est l’objectif de cette analyse.

XAdS DPC course de haie 110 m S 70653933Trouver une rentabilité rapide aux solutions frontiques, c’est presque le plus facile!

Il reste des barrières plus difficiles à faire tomber avant que l’équipement des équipes terrain avec des solutions universelles, frontiques, ne devienne aussi “naturel” que l’équipement des cols blancs avec des outils bureautiques.

Ce sera le thème d’un prochain billet.