Pseudo Cloud, ou Cloud Natif ?
01/10/2019
En 2019, connaissez-vous un seul DSI, un seul fournisseur de solutions numériques qui ne se déclare pas être un très grand fan du Cloud ? Moi, non.
Après 15 ans d’existence, l’expression “Cloud Computing” fait partie des “meubles numériques” et plus personne n’ose se déclarer ouvertement contre.
Petit problème : le mot Cloud a autant de significations différentes que de personnes qui l’utilisent.
Il devient urgent de clarifier la situation ; je vous propose de simplifier l’analyse en séparant en deux grandes familles les visions “Cloud” des entreprises :
- Pseudo Cloud : utilisation de solutions Cloud pour faire comme avant, pour ne rien changer en profondeur.
- Cloud Natif : utiliser intelligemment les nouveaux potentiels du Cloud pour repenser ses usages numériques, autrement.
Le Cloud, le vrai, aujourd’hui
J’écrivais déjà en 2012, il y a plus de 7 ans, un billet sur le “faux cloud”, et ce texte reste, hélas, d’actualité.
Les fondamentaux du cloud sont très stables, depuis les années 2007 :
- Des infrastructures IaaS, Infrastructure as a Service, que l’on paye à l’usage, en OPEX.
- Des applications SaaS, Software as a Service, multi-tenant, avec une même instance pour tous les clients.
- Des outils de développement PaaS, Platform as a Service, de plus en plus indépendants des infrastructures, avec les démarches Serverless.
Ce ne sont pas des concepts d’une extrême complexité ! Fournisseurs et DSI sont tous capables de les comprendre.
Pourquoi faut-il, en 2019, que je rencontre encore des personnes intelligentes qui, en apparence, parlent de Clouds qui n’ont rien à voir avec ces idées simples ?
Pseudo Cloud : comment le reconnaître
Vous ne rencontrerez jamais une personne qui vous dira qu’elle a une démarche “pseudo cloud”. Il y a heureusement des indicateurs clefs qui ne trompent pas, et qui permettent d’identifier cet animal bizarre qui se dit cloud, essaie de ressembler au cloud, mais n’a rien de commun avec un cloud natif.
La liste qui suit, de décisions Pseudo Cloud, n’est pas exhaustive, mais permet d'identifier les entreprises Pseudo Cloud avec une marge d’erreur inférieure à 10 %.
Migrer ses machines virtuelles (VM) sur le cloud.
Oui, il est possible de porter rapidement des VM sur Azure, GCP de Google ou AWS. Ces trois grands acteurs industriels du cloud public ont tous signé des accords avec VMware pour faciliter cette migration.
Porter ses applications historiques sur le cloud.
Exécuter Oracle Applications sur AWS ou SAP sur Azure, c’est possible depuis longtemps. Cela a un nom, depuis plus de 30 ans : l’hébergement d’applications, qui existait bien avant l’arrivée du premier cloud public, AWS en 2007.
Choisir une application en “mode SaaS”.
Derrière ce vocable “mode SaaS”, les éditeurs historiques proposent le plus souvent des applications traditionnelles hébergées, multi-instances, mono-tenant, qui n’ont aucune des caractéristiques des véritables applications SaaS, multi-tenant.
Migrer ses applications SAP vers S/4 HANA
J’ai écrit un billet entier pour dire tout le “bien” que je pense de cette démarche.
C’est beaucoup plus dangereux qu’un simple portage à l’identique d’une application SAP classique sur une infrastructure Cloud. Avec HANA, la malheureuse entreprise qui se laisse piéger devient doublement prisonnière de SAP, pour ses applications et pour ses… infrastructures en étant obligé de choisir une base de données propriétaire SAP.
Choisir des applications de BI, Business Intelligence à installer sur poste de travail
On peut citer, parmi les plus connues, Qlik Sense ou Tableau. Comme tous les usages Cloud Natif, les applications de BI doivent pouvoir être utilisées depuis un navigateur ; DataStudio de Google en est un bon exemple.
Utiliser des outils bureautiques installés sur PC.
C’est l’exemple le plus classique, le plus répandu que je connais de Pseudo Cloud. Une majorité d’entreprises font aujourd’hui le choix d’Office 365 et croient, ou font semblant de croire qu’elles… migrent sur le Cloud. Dans 90 % des cas, elles continuent à déployer la version PC d’Office, avec Word, PowerPoint ou Excel, ce qui est la négation d’une solution Cloud Native.
Tous ces indicateurs ont un point commun : ils permettent aux entreprises de continuer à fonctionner “comme avant le cloud”. Ils représentent :
- Des changements homéopathiques dans tous les domaines d’infrastructures, d’applications, d’externalisation, de développement.
- Des changements homéopathiques dans les modes de travail des collaborateurs, qui continuent à utiliser leurs applications paléontologiques telles que Microsoft Office sur leur PC ou SAP.
- Des changements homéopathiques dans la gouvernance des SI, toujours considérés comme des centres de coûts.
Rappel : la France vient de décider que l’homéopathie avait des résultats “peu probants”, mais n’était pas dangereuse pour la santé. La même remarque peut être faite pour les démarches “Pseudo Cloud” : elles n’ont aucune efficacité prouvée, mais sont sans risques à court terme.
Cloud Natif : signes distinctifs
Aujourd’hui, les géants du IaaS proposent des offres d’une exceptionnelle richesse, et qui s’améliorent tous les ans.
Ce double tableau montre l’évolution du nombre de services proposés par GCP, Google Cloud Platform, entre février 2017 et juillet 2019. L’évolution des offres AWS est très similaire.
La majorité de ces services n’existe pas dans les solutions numériques “pré cloud”. Connaître, maîtriser et savoir utiliser ces centaines de services, c’est un travail à temps plein, qui demande des compétences exceptionnelles, réparties dans des équipes de haut niveau.
Ce deuxième tableau, d’avril 2018, présente les logos de… 5000 logiciels SaaS pour les seules fonctions marketing et commerciales ! Malgré mes efforts et une veille technologique quotidienne de 2 heures, je n’en connais pas plus de 3 % à 5 %.
Avoir une démarche “Cloud Natif”, c’est comprendre et accepter que le panorama des offres du Cloud n’a plus rien à voir avec ce qui était disponible il y a 10 ou 15 ans. C’est aussi comprendre et accepter qu’il faut tout repenser, remettre à plat, dans les infrastructures, les usages et les développements.
- Essayer de répliquer dans ses petits centres de calcul privés la richesse fonctionnelle d’un AWS ou d’un GCP : absurde, impossible, ridicule, hors de prix…
- Continuer à penser ERP intégré, quand des dizaines de milliers de solutions SaaS remarquables, chacune dans leurs créneaux proposent des solutions plus ergonomiques, plus économiques, plus performantes, plus rapides à déployer, c’est conduire une voiture du début du 20è siècle à l’époque des véhicules électriques et autonomes.
J’ai regroupé ces quatre images automobiles qui illustrent bien ces différences d’approches :
- Une des premières voitures à moteur était une voiture à cheval à laquelle on avait ajouté un moteur thermique (Musée de Mulhouse). Une bonne représentation des ERP des années 1990.
- A côté, j’ai mis une photo de la “nouvelle” Porsche électrique Taycan annoncée en septembre 2019. Rien ne vous choque sur cette photo ? Regardez bien ! Elle porte la mention “Turbo” ! Turbo sur un véhicule électrique, ils ont tout compris chez Porsche ! Une excellente illustration des ERP en 2019, tels SAP/4 HANA, qui n’ont rien compris à la profonde évolution des solutions cloud natives.
- En dessous, il y a deux photos, externes et internes, d’un nouveau véhicule électrique, de l’entreprise Canoo. Tout a été repensé, de A à Z, pour profiter des innovations rendues possibles par des moteurs électriques placés dans les roues.
Les entreprises cloud natives ont compris et accepté qu’il est indispensable de tout remettre à plat. Quelques exemples de décisions Cloud Natif :
- Fermer le plus vite possible tous mes centres de calculs archaïques.
- Créer des équipes d’infrastructures de haut niveau qui maîtrisent les solutions IaaS.
- Essayer de trouver parmi les milliers de solutions SaaS disponibles des réponses “raisonnables” aux attentes des métiers pour les fonctions support.
- Développer, avec des équipes internes de “builders”, les applications cœur métiers en microservices, Serverless…
- Redonner leur indépendance aux données, les sortir du carcan des applications historiques.
- Repenser les échanges avec la DG et les directions métiers, se mettre à leur service et répondre rapidement à leurs demandes légitimes d’innovations rapides.
Rien de tout cela n’est facile, dans un monde Cloud Natif, j’en suis conscient. Je sais aussi que c’est totalement impossible dans une démarche Pseudo Cloud.
Les “Exits” vers un Cloud Natif
Ce billet est écrit début octobre 2019, avant qu’une décision définitive sur le Brexit ne soit prise.
Sans attendre le résultat du Brexit, je propose aux responsables de la Transformation Numérique de leur entreprise de mettre en chantier trois “Exit” numériques ; ceci ne concerne que les entreprises qui ont encore comme “membres” de leur espace numérique ces solutions historiques.
- SAPExit : c’est de loin le plus difficile ! J’ai écrit l’année dernière un long billet qui présente les nouvelles compétences nécessaires à la DSI pour réussir à sortir de SAP. En y mettant beaucoup d’énergie et de courage, il faudra probablement 3 à 7 ans aux grandes entreprises pour réussir leur SAPExit. Raison de plus pour démarrer, immédiatement !
- OraclExit : il peut prendre deux formes, selon les entreprises, exit des bases de données et/ou des applications. Cet Exit est probablement celui qui sera le plus rentable, surtout pour la partie bases de données, qui sont omniprésentes dans les grandes entreprises.
- VMExit : Passer d’une plateforme VM à des containers est de loin le plus rapide et le plus facile de tous les Exit. Bravo à VMWare qui a bien compris que les containers ont gagné la partie et propose maintenant Tanzu, sa solution maison containers.
Un test simple : êtes-vous Pseudo Cloud ou Natif Cloud ?
Je vous propose un test simple pour vous aider à comprendre à quel groupe appartient votre entreprise. Il comporte dix thèmes et pour chacun vous devez choisir une seule des deux réponses, en mettant 1 dans la colonne PC (Pseudo Cloud) ou CN (Cloud Natif).
Important : il ne s’agit pas d’évaluer la situation actuelle, mais la cible que vous avez définie pour votre Transformation Numérique.
Ce tableau, que vous pouvez agrandir et copier, vous servira pour enregistrer vos réponses.
Une rapide explication pour chacun de ces thèmes :
- ERP intégrés vs Best of Breed. Est-ce qu’un ERP intégré fait partie de votre démarche ou est-ce que vous optez en priorité pour des solutions SaaS “Best of Breed”.
- Souhaitez-vous garder des applications historiques, en mode hébergé, ou basculer au maximum sur des solutions SaaS multi-tenant.
- Voyez-vous un avenir aux grandes applications monolithiques ou avez-pris la décision de privilégier des applications microservices, qui communiquent par API.
- Est-ce que l’externalisation des développements restera la règle ou allez-vous reconstruire des équipes importantes de développement en interne pour reprendre la maîtrise de vos applications cœur métier.
- Allez-vous continuer à utiliser des VM ou vont-elles être rapidement remplacées par des containers.
- Des centres de calcul privés, aussi appelés Clouds Privés, garderont-ils une place importante dans le futur ou voyez-vous l’avenir de vos infrastructures dans des solutions IaaS, avec une démarche DataCenterLess (sans centres de calculs privés).
- Pensez-vous que vos collaborateurs ne peuvent pas travailler sans Office sur leurs postes de travail ou qu’une bureautique “Web” comme G Suite est la meilleure réponse pour eux.
- Serez-vous capable, ou non, d’éliminer pour la grande majorité des collaborateurs toutes les applications installées sur les PC pour basculer vers des solutions navigateurs.
- Vos dirigeants et directeurs financiers sont-ils prêts à accepter que les budgets du numérique basculent d’une culture CAPEX, investissements, à une approche OPEX, coûts de fonctionnement.
- Pour la sécurité, allez-vous continuer à faire confiance à des pare-feux traditionnels, périmétriques, qui protègent vos lieux de travail, ou acceptez-vous de déployer des pare-feux dans le cloud, tels que Zscaler, qui protègent les accès de vos collaborateurs où qu’ils soient.
Comment analyser vos résultats
Comptez combien de “1” vous avez dans la colonne CN, Cloud Natif :
- De zéro à trois : votre entreprise a clairement choisi une démarche Pseudo Cloud.
- De quatre à six : vous hésitez entre les deux démarches, mais êtes bien parti pour devenir rapidement Cloud Natif.
- De sept à dix : vous avez basculé dans une véritable logique Cloud Natif.
En synthèse : la situation actuelle en France
Je vais réutiliser la courbe de Gauss de l’innovation, qui répartit les entreprises en cinq grandes familles.
Sur la courbe de gauche, j’ai représenté la situation du Pseudo Cloud : il ne reste plus qu’un tout petit nombre d’entreprises retardataires à considérer qu’elles ne sont pas Cloud, mais au sens Pseudo Cloud.
La courbe de droite correspond aux entreprises qui sont vraiment Cloud Natives. Elles sont encore dans la famille des premiers adopteurs, largement minoritaires.
Dirigeants et responsables de la Transformation Numérique, le plus dangereux est de se mentir à soi-même et de se persuader que l’on est Cloud Natif quand en réalité on est resté dans une démarche Pseudo Cloud.
J’espère que ce billet vous aidera à mieux comprendre à laquelle de ces deux familles appartient votre entreprise.
Bonjour Louis,
Article très pertinent, et pourtant zéro commentaire de la profession.
Pourquoi ?
Cordialement
Maurice
Rédigé par : Maurice | 18/10/2019 à 17:41
Merci, Maurice, pour votre commentaire positif.
L'une des raisons, à mon avis, et qu'il y a eu beaucoup d'échanges à propos de ce billet sur... LinkedIn.
Il a été repris sur LinkedIn et les groupes orientés cloud ont laissé de nombreux commentaires.
Rédigé par : Louis Nauges | 19/10/2019 à 10:54
Bonjour,
J’apprécie vos analyses, cependant je ne suis pas sur qu'il soit nécessaire de créer 2 nouveaux termes.
Je me satisfais de votre definition du SaaS (Multi-tenant, Mono-version etc..)
Le SaaS est par définition "cloud natif"
Chaqu'un est libre ensuite de choisir une combinaison d'applications de differents éditeurs ou "best of breed" (et les frais d'intégrations et de maintient des interfaces qui va avec) ou une suite intégrée.
Comme vous le savez, une entreprise ne prends pas des décisions sur la base de l'innovation mais du risque et du cout.
Il est donc "logique" que les éditeurs se soient adaptés et proposent tous des suites (workday et salesforces y compris...) d'autant que le mille feuille d'application de differents editeurs n'est pas non plus la panacée.
Rédigé par : frederic hemmi | 05/11/2019 à 16:46
J’ai un peu de mal avec l’indépendance des données…sur les applications cœur de métier, il est très difficile, voire impossible de rendre des applications indépendantes du service Cloud qui les héberge…et ça, c’est un vrai soucis pour l’avenir : quand vous avez collé une application chez AWS ou GCP, n’espérez pas pouvoir en sortir. Les Cloud sont des solutions captives pour lesquelles les coûts ne sont pas seulement liés à l’usage, mais surtout à l’architecture applicative et cela peut vite s’envoler dès qu’on rajoute une instance ou 2 de base de données.
Rédigé par : David Scrève | 28/11/2019 à 22:36
@David
Deux thèmes différents dans vôtre commentaire :
- Indépendance des données : Ce sujet est "indépendant" d'une problématique cloud, même si ce sont en priorité des solutions clouds qui seront utilisées.
Il existe d'excellentes solutions open source de gestion des données qui sont présentés sur les principaux clouds publics (Ingres...) qui permettent de changer, sans trop de difficultés de fournisseurs clouds si nécessaire.
-Prisonniers du Cloud : toute migration est pénible, cloud ou pas. Par contre, la portabilité des applications et des données d'un AWS à GPC ou Azure est beaucoup plus facile que dans le monde ancien (SAP, Oracle Applications...)
Les offres autour de Kubernetes, proposées par Google (Anthos) ou Azure (Arc) permettent de porter ses usages d'un cloud à l'autre très facilement.
En résumé : les solutions cloud natives ne sont pas parfaites, elles sont simplement des ordres de grandeur plus performantes, plus flexibles que les solutions legacy "on premise".
Rédigé par : Louis Nauges | 29/11/2019 à 09:36
Bof…si vous coller une application dans GCP en utilisant les services proposés, votre application ne sortira jamais de GCP sans réécriture… et chez AWS c’est également très insidieux parce qu’il faut faire gaffe à chaque pour éviter les services spécifiques de chaque Cloud…
Faites l’exercice de déployer la même application dans 2 Cloud différents : vous verrez, c’est un exercice très complexe et qui conduit à une vraie dépendance applicative qui n’existait pas en location de serveur physique.
Il est donc important de savoir à quoi on s’engage quand on choisit un fournisseur Cloud.
Rédigé par : David Scrève | 29/11/2019 à 23:58
@David
Rien n'est parfait, et vous avez raison de faire référence à des difficultés réelles.
Il y a plusieurs cas où le problème se pose peu :
- Portage de ses applications sous VMWare : ceci est possible automatiquement sur les trois grands clouds publics.
- Création de nouvelles applications développées directement sur le cloud en "Kubernetes container". ces applications peuvent, elles aussi, être portées d'un cloud à l'autre, comme je l'ai indiqué dans ma réponse précédente.
Oui, des compétences de très haut niveau sont nécessaires en interne pour tirer profit des potentiels des Clouds Publics et éviter les erreurs qui mènent à une dépendance trop forte.
Rédigé par : Louis Nauges | 30/11/2019 à 08:52
L'exemple de Kubernetes est un peu simplistes dès lors qu'on souhaite aller au bout de l'exercice et offrir de la haute disponibilité. Les approches de différents fournisseurs ne sont pas forcément compatibles.
Néanmoins, avec un bon découpage des rôles, cela peut être pris en charge par des équipes cloudOps qui s'assureront de la bonne mise en oeuvre des contraintes opérationnelles propres à chaque fournisseur.
Rédigé par : Kirschenmann | 21/01/2020 à 08:25
@ Kirschenmann
Kubernetes n'est pas parfait et demande une bonne maîtrise des solutions numériques pour en tirer profit, vous avez raison.
Tous les grands fournisseurs de Clouds Publics proposent maintenant des sur-ensembles de Kubernetes qui en rendent l'usage... un peu plus simple.
Rédigé par : Louis Nauges | 21/01/2020 à 10:40
Bonjour,
après quelques recherches sur les fonctions actuellement possibles des SaaS, je suis tombé sur votre article.
En définitive, je comprends que les Saas sont principalement liés à de la gestion de projets, au marketing, outils RH, ERP...
Quel pourcentage de part de marché de logiciels cela concerne-t-il ? Par exemple, des logiciels de type Dassault System (mécanique...) ne seront probablement jamais de type Saas, car le tandem uC-carte graphique ne passera déjà pas les délais d'internet.
Par ailleurs, les logiciels SaaS passent-ils finalement tous par un navigateur internet ? Si oui, c'est une limite assez forte pour un logiciel.
Donc les SaaS ne sont-ils pas voués à rester une partie émergée de l'iceberg des logiciels (en terme de parts de marché) ?
J'arrive à la question que je voulais vous poser : si par exemple un logiciel type ERP est codé en PHP et lié à une base MySQL le tout herbergé en ligne, accessible à 100 utilisateurs en même temps via des navigateurs web, ce logiciel ayant été développé pour se substituer à Excel, ça correspond exactement à un SaaS ou je n'ai rien compris ?
Merci pour votre réponse ;)
Rédigé par : Marc | 14/06/2020 à 14:57
@ Marc
Les logiciels SaaS répondent en priorité aux besoins des fonctions "support" que vous évoquez en RH, Commerce, Finance...
Ils représentent aujourd'hui plus de 50 % du marché mondial des logiciels et ce pourcentage augmente très vite.
Oui, ils passent tous par un navigateur Web, c'est une condition indispensable, comme pour 90 % des usages grand public.
Dassault Systèmes propose déjà des accès à ces outils de construction 3D dans le cloud, avec des accès Web.
Des jeux vidéos haut de gamme sont disponibles depuis un navigateur ; Stadia de Google en est un bon exemple.
Votre dernière question est importante.
Il ne faut pas confondre un logiciel hébergé, comme celui que vous présentez, avec un logiciel SaaS.
LA carastéristique clef d'un logiciel SaaS est la dimension "multitenant" : la même version du logiciel est accessible par des milliers, ou des millions d'entreprises en même temps.
En 2025, plus de 90% des logiciels seront SaaS...
Rédigé par : Louis Nauges | 14/06/2020 à 18:39
Merci pour votre réponse.
Ce que je présentais est un logiciel codé en PHP pour un affichage en HTML, exécuté sur le serveur d'un hébergeur et accessible par 100 personnes (ou plus selon les capacités du serveur "loué") avec une même version et surtout des données à lire ou modifier en même temps, connecté à une base de donnée MySQL pour la mémorisation des données traitées : ça correspond précisément à votre "true cloud" ?
Mais je comprends moins le "pseudo cloud" décrit : des logiciels avec une partie "client" sur le PC de l'entreprise, mais hébergés et surtout exécutés sur des serveurs distants, par essence mono-tenant notamment sans partage de données dans une même base ?
Plusieurs entreprises qui accèdent à la même version d'un logiciel en SaaS ne doit pas exiger que le même code de ce logiciel soit exécuté sur un même serveur, il suffit d'avoir plusieurs serveurs mis à jour sensiblement en même temps.
La dimension "en même temps" du multi-tenant que vous évoquez correspond à de l'échange de données mise à jour immédiatemment entre plusieurs utilisateurs je pense.
Exécuter des logiciels de type Dassault System sur un navigateur suppose que ce soit le processeur du PC client qui soit sollicité, et non celui du serveur distant, auquel cas les possibilités sont réduites à celle d'un navigateur (faibles). Pour ces logiciels, même avec la fibre et des temps d'accès très faibles, le passage entre les calculs du processeurs et l'affichage à l'écran par la carte graphique ne peuvent mécaniquement pas être "dans le cloud". Ces logiciels ne sont pas les plus connus ni les plus nombreux, mais bien les plus chers, leur part de marché est plus que conséquente, disons 25% aujourd'hui.
En 2025, si 90% de part de marché des logiciels est dans le cloud, c'est que les fonctions supports RH, commerce, finance correspondront à 90% du travail à effectuer, les robots feront le reste : ils feront seuls les plans mécaniques, les simulations thermiques, les dossiers de conception des immeubles ou des avions, etc... ? Je parie plutôt au contraire à titre personnel pour une automatisation logicielle beaucoup plus facile à mettre en oeuvre de ces fonctions supports RH, commerce, finance... Cela sera à 90% dans le cloud en effet en 2025, mais pour une part de marché comme vous l'avez justement estimée de 50% aujourd'hui à je dirais 25% en 2025 (simplification oblige).
Et à mon humble avis, pas de magie concernant le hardware malheureusement, un concepteur en robotique (ou mécanique ou électronique ou thermique ou autre domaine) a besoin d'une carte graphique au plus proche de son écran, il faut en avoir conscience, c'est la limite de ce "cloud" : la puissance de calcul peut être distante si l'affichage n'a pas à être immédiat, sinon ce n'est pas possible.
Rédigé par : Marc | 19/06/2020 à 13:44
Errata : je viens de regarder le fonctionnement de Stadia de Google, contrairement à ce que je viens d'écrire, c'est à ma grande surprise en effet possible de faire passer le flux complet vidéo à 60 images par secondes en 4K pour des jeux, avec une latence inférieur à 50ms aller-retour. L'intérêt est de centraliser/mutualiser les puissances de calcul et d'éviter de produire des PC / consoles en masse comme actuellement. L'inconvénient et non des moindres est d'engorger (le mot est faible) les réseaux internets mondiaux, comme le font la TV par internet (absurde car la TNT remplit bien mieux ce rôle) ou Netflix (intérêt du "à la demande"). Tout cela est surprenant, mais il est possible que le cloud prenne le dessus sur les PC / consoles avec l'émergence de la fibre, à condition que les saturations de réseau ne viennent pas faire vent contraire pour une grande marche arrière. J'imagine que ce sujet anime toutes les sociétés éditrices de logiciels & jeux vidéos. Intéressant, difficile de se faire une idée sur l'avenir, mais le cloud a plus d'avenir que ce que j'écrivais plus haut.
Rédigé par : Marc | 19/06/2020 à 14:51
Merci de vos longs commentaires intéressants.
Bravo aussi pour votre courage à reconnaître que vous vous étiez trompé sur Stadia.
Ce basculement vers des solutions Cloud demande beaucoup de bande passante, oui, mais la croissance de la capacité des réseaux va beaucoup plus vite que celle de leurs usages.
La probabilité d'une saturation mondiale des réseaux internet est proche de zéro.
Que ce soit pour les jeux vidéos, les travaux en 3D ou tout autre usage numérique, la logique du partage va s'imposer. On ne paiera et ne consommera que ce dont on a vraiment besoin.
Combien de milliards de DVD dorment, prennent la poussière dans les maisons ? Netflix permet de voir un film sans en devenir propriétaire et rares sont les films que l'on regarde plus de 2 ou 3 fois.
L'économie de l'usage se substitue rapidement à celle de la possession. Tous les domaines seront touchés, et l'un des prochains est celui de l'automobile.
Rédigé par : Louis Nauges | 19/06/2020 à 16:52
En effet oui, je comprends bien la logique "économie d'échelle" du cloud, mais je ne peux m'empêcher de revenir aux fondamentaux technologiques : certes pour les jeux vidéos, une latence au max de 200ms reste acceptable (d'ailleurs les concepteurs de jeux en réseau sont malins, ils fluidifient les mouvements des sujets pour palier à ce défaut). Sachant aussi que le wifi sera proscrit (latence supplémentaire), ce qui est déjà une sérieuse limitation technique. Mais surtout, je me suis imaginé utiliser des logiciels professionnels nécessitant une puissance importante de processeur et de carte graphique, et il y a un autre élément magique (on ne dit jamais assez à quel point cette invention est révolutionnaire) qui va poser problème : la souris (ou le pad) ! Une latence de 200ms sur la souris, c'est rédhibitoire, je viens d'essayer, même à 100ms ce n'est pas possible, c'est à proprement parler inutilisable. La vitesse de la lumière est donc la limite définitive à l'extension des parts de marché cloud pour les logiciels nécessitant de la puissance de calcul ? Peut-être qu'il existera aussi une parade à cela ? Il faudrait revoir la façon de coder ces logiciels en prenant en compte ce nouvel élément, ne mentons pas, ce seront de nouveaux logiciels avec une interaction homme-machine forcément différente : en bonus une puissance très supérieure à un bon PC, mais en malus un temps de traitement des commandes (surtout la souris) supérieur. Il est possible que de nouveaux PC de type "terminaux" très simples et peu coûteux voient le jour. Au final, le vrai grand intérêt de ce cloud pour les entreprises sera la gestion de données centralisée, si c'est très bien fait, estimons à 5 ans pour bien essuyer les plâtres, infine ce sera une belle avancée... J'en conclus que l'amélioration des routeurs optiques pour réduire leur latence est un marché très prometteur et que les "vidéos de chats sur Youtube" occuperont enfin un pourcentage réduit de la bande passante mondiale.
Rédigé par : Marc | 21/06/2020 à 16:35